On évalue à environ 3100 le nombre de personnes en situation d’itinérance dans la métropole. Avant, le problème était concentré au centre-ville, mais aujourd’hui, la question de l’itinérance dépasse largement les frontières de l’arrondissement de Ville-Marie.

On croise des personnes en situation d’itinérance dans Villeray, Hochelaga-Maisonneuve, Lachine, Montréal-Nord… Et ce n’est plus une réalité exclusivement montréalaise : Longueuil, Laval, Sherbrooke, Québec et Gatineau ont toutes une population itinérante, beaucoup moins importante qu’à Montréal, cela dit, et les problèmes qui viennent avec : détresse humaine, cohabitation difficile avec les résidants des quartiers, manque chronique de ressources pour répondre aux besoins complexes de cette population vulnérable, etc.

Ajoutons à cela la pandémie qui a poussé à la rue des gens qui vivaient à un chèque de paie de la précarité, et le portrait est complet. Nous avons bel et bien une crise sous les yeux.

Preuve que le problème est plus criant que jamais : il est remonté dans la liste des priorités de nos politiciens. Les deux principaux candidats à la mairie de Montréal ont fait de l’itinérance un morceau important de leur programme. Avec raison.

Car on ne peut plus rester les bras croisés. Si on n’agit pas rapidement, le nombre de personnes dans la rue va augmenter… et les problèmes de cohabitation comme ceux qu’on observe dans le quartier Milton Parc, où une centaine de résidants a manifesté au début d’octobre, vont s’intensifier. Personne ne souhaite cela.

La bonne nouvelle, c’est que l’itinérance n’est pas un problème insoluble.

Il existe des solutions concrètes, comme le soutien au logement, une approche qui a donné des résultats un peu partout dans le monde ainsi qu’à Montréal. La plateforme 2000solutions, initiative d’un réseau d’intervenants montréalais en itinérance, annonçait récemment avoir trouvé des logements pour 1829 personnes au cours des cinq dernières années. Pandémie oblige, elle atteindra sans doute son objectif de 2000 l’an prochain.

Le soutien au logement, c’est aussi la clé de voûte du plan quinquennal « Un pas de plus » élaboré par les sept principaux organismes qui œuvrent en itinérance dans la métropole, parmi lesquels on retrouve les missions Bon Accueil et Old Brewery. Elles demandent qu’on mette fin aux solutions temporaires, comme ces refuges qu’on ouvre en catastrophe durant les grands froids ou les vagues de chaleur, et qu’on développe plutôt des mesures pérennes, avec le financement qui vient avec.

Comme ce sont eux qui ont une connaissance fine de la réalité sur le terrain, il faut les écouter.

C’est ce que semblent avoir fait Valérie Plante et Denis Coderre, dont les engagements en itinérance s’inspirent en partie du plan « Un pas de plus ».

Leurs deux formations ont des propositions pertinentes au cœur desquelles on retrouve la création de logements destinés aux personnes en situation d’itinérance, accompagnés d’un soutien psychosocial : pour les quatre prochaines années Valérie Plante en promet 1200, Denis Coderre, 1800.

Le hic, c’est que, comme dans bien des dossiers, la Ville ne contrôle pas tous les leviers financiers pour réaliser ce type de promesses. Sans l’argent d’Ottawa et de Québec, pas de logements et pas de services psychosociaux.

C’est là qu’une des propositions de Denis Coderre prend tout son sens. Sa formation propose de redonner un pouvoir d’agir au Protecteur des personnes en situation d’itinérance, devenu commissaire sous l’administration Plante.

C’est le poste tout désigné pour devenir le lobbyiste des Montréalais les plus vulnérables, celui qui ira frapper aux bonnes portes, qui convaincra tous les intervenants – et il y en a beaucoup – d’arrimer les programmes et d’allouer les ressources aux bons endroits.

Les idées sont là. La volonté semble y être aussi. Ne manque que la détermination et la coordination pour y arriver. La dignité et la sécurité de nos concitoyens en situation d’itinérance en dépendent.

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