Laisseriez-vous sous respirateur artificiel un patient qui a si bien récupéré qu’il est prêt à courir le marathon ?

Certainement pas.

Alors pourquoi le gouvernement fédéral devrait-il maintenir des prestations d’urgence alors que le marché du travail roule à fond de train ?

En juillet dernier, Ottawa avait prolongé jusqu’au 23 octobre le versement de la Subvention salariale d’urgence et de la Prestation canadienne pour la relance économique (PCRE) qui a succédé à la fameuse Prestation canadienne d’urgence PCU.

C’était juste avant le déclenchement des élections, quelle coïncidence !

Comme la date butoir approche maintenant à grands pas, les appels se multiplient pour que le fédéral étire une énième fois ces programmes qui ont aidé les travailleurs et les entreprises à passer à travers la pandémie.

Mardi, par exemple, les PME inquiètes ont lancé une pétition réclamant leur prolongation, et même leur bonification. La Fédération canadienne des entreprises indépendantes plaide que beaucoup de petites et moyennes entreprises en arrachent encore. À travers le pays, seulement 40 % d’entre elles ont retrouvé leur chiffre d’affaires normal.

En septembre, l’organisme Manufacturiers et Exportateurs du Québec avait aussi demandé à Ottawa de prolonger la subvention salariale.

Techniquement, la ministre des Finances, Chrystia Freeland, qui a déjà été reconfirmée dans ses fonctions, pourrait repousser la date limite jusqu’à la fin de novembre, sans nouveau projet de loi.

Sauf que voilà… les choses vont mieux.

La quatrième vague de la pandémie devrait « commencer à s’estomper » dans les prochaines semaines, selon les projections dévoilées, vendredi dernier, par la dirigeante de la Santé publique du Canada, la Dre Theresa Tam.

Les mesures sanitaires s’assouplissent. À partir de novembre, les bars et les restaurants pourront rouvrir à pleine capacité, a annoncé Québec hier, et les Canadiens pourront franchir la frontière terrestre, ont indiqué les États-Unis mercredi.

Et la semaine dernière, on a appris que l’emploi est revenu à son niveau pré-pandémique au Canada, bien avant nos voisins américains, soit dit en passant.

Jamais n’avait-on vu une reprise du marché du travail aussi fulgurante, marquée par une forte création d’emplois à temps plein, dans tous les secteurs, dans toutes les provinces. Lors des récessions des années 1980 et 1990, il avait fallu deux à trois fois plus longtemps pour récupérer les pertes.

Avec la pénurie de main-d’œuvre, les entreprises s’arrachent le personnel.

Alors les mesures d’aide aux travailleurs n’ont plus leur raison d’être. Même si la somme a déjà été réduite de 500 $ à 300 $ par semaine, la PCRE peut décourager des travailleurs à temps partiel de reprendre du service.

Il est temps d’y mettre fin.

Les entreprises vont aussi devoir se sevrer de l’aide gouvernementale qui ne peut pas être éternelle.

La subvention salariale a déjà coûté 94 milliards de dollars au Trésor public. Cette somme colossale a heureusement permis de sauver des entreprises qui risquaient de se noyer à cause de la chute temporaire de leurs revenus, même si on peut déplorer que de grandes entreprises ont eu accès à la cagnotte, alors qu’elles n’étaient pas du tout en péril.

Dans l’ensemble, la bouée de sauvetage a bien joué son rôle. Tellement bien que le nombre de faillites et de cas d’insolvabilité chez les entreprises a fondu de 20 % au cours des 12 derniers mois, alors que la pandémie faisait rage.

Manifestement, les entreprises respirent mieux, quoique certaines restent aux soins intensifs. Pensons à l’agence de voyages qui est loin d’avoir retrouvé sa vitesse de croisière ou au petit café du centre-ville qui se ronge les sangs en attendant le retour des travailleurs dans les tours de bureaux.

Le gouvernement a déjà réduit de 75 % à 20 % du salaire des employés la subvention qui reste toutefois offerte à l’ensemble des entreprises dont les revenus sont en baisse de 10 %.

Alors qu’une grande partie de l’économie a repris le pas, il serait temps d’éliminer la subvention salariale, quitte à offrir davantage d’oxygène aux secteurs qui cherchent encore leur souffle.

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