Des terrasses ! Des spectacles ! Du sport ! Même des « petits partys » !

Cela faisait 14 mois qu’on attendait ce moment et on ne se privera pas pour fêter. Le plan de déconfinement annoncé mardi par François Legault provoquera – avec raison – un énorme élan d’enthousiasme.

On voit déjà un grand défi de communications avec l’avalanche d’allègements et de dates annoncés en vrac mardi. Pariez qu’on va beaucoup se demander, dans les prochaines semaines, ce qui est permis ou non.

On espère aussi que les variants, notamment le fameux B.1.167 identifié en Inde, ne viendront pas jouer les trouble-fête.

Mais on peut surtout voir dans cette réouverture du Québec le début d’un projet : faire progressivement de la COVID-19 une maladie comme les autres.

Une maladie qui restera sans doute parmi nous longtemps, qui causera encore des drames et fera encore des morts. Une maladie qui nous obligera à continuer à nous protéger et à protéger les autres en modifiant certains de nos comportements.

Mais une maladie qui, si tout va comme prévu, sera de moins en moins une affaire d’État.

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Si ce virus a fait dérailler notre société comme aucun autre de mémoire de Québécois, c’est surtout parce qu’il menaçait de faire déborder nos hôpitaux. C’est la protection de la capacité hospitalière qui a justifié les mesures sanitaires les plus difficiles, comme le couvre-feu et l’interdiction de voir nos proches.

Or, cette crainte est aujourd’hui beaucoup moins aiguë. Les hospitalisations et les admissions aux soins intensifs sont maintenant bien en deçà des seuils critiques. Surtout, les modélisations prévoient qu’avec la vaccination qui se poursuit à plein régime, elles continueront de baisser.

Les justifications pour maintenir les mesures les plus dures comme le couvre-feu se sont donc grandement atténuées.

Ça ne veut pas dire que tout roule comme sur des roulettes dans nos hôpitaux. Il s’y fait encore 21 % moins d’interventions chirurgicales qu’en temps normal – une proportion qui bondirait à 33 % si les cliniques privées n’étaient pas mises à contribution. Après 14 mois de lutte, les équipes médicales sont à genoux.

Cela explique que les allègements annoncés mardi soient partiels et graduels. Et ça montre qu’il est trop tôt pour déclarer que la COVID-19 n’est plus un drame collectif.

Dans notre bataille pour transformer la COVID-19 en une maladie normale, nous sommes quelque part à mi-chemin.

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On peut aussi voir la réouverture graduelle du Québec annoncée mardi comme un transfert de responsabilités. Si la COVID-19 est de moins en moins une menace collective, elle fait toujours courir un risque individuel.

À mesure que les règles édictées par l’État disparaissent, elles doivent donc être remplacées par la responsabilisation des citoyens.

Le 28 mai, lors de l’ouverture des terrasses, certains d’entre nous seront vaccinés depuis plus de trois semaines et auront une bonne immunité contre le virus. D’autres, non. Deux amis non vaccinés qui iraient trinquer sur une terrasse bras dessus, bras dessous, ne s’exposeraient peut-être pas à une contravention. Mais ils se mettraient quand même en danger.

Après avoir été incités à suivre les règles aveuglément, il nous faudra donc apprendre à exercer notre propre jugement – de la même façon qu’on le fait pour limiter nos risques de développer des maladies cardiaques ou de contracter une gonorrhée.

La COVID-19 étant une maladie respiratoire contagieuse, le civisme doit aussi faire partie de l’équation. On connaît aujourd’hui les comportements à risque pour les autres.

À tort ou à raison, on a beaucoup accusé François Legault d’être « paternaliste » dans sa gestion de la pandémie. Le voilà qui relâche son autorité sur ses citoyens majeurs (pour la plupart) et vaccinés (de plus en plus).

C’est maintenant à nous de prendre nos responsabilités. Et c’est tant mieux.

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