La méthode Legault n’a pas changé. On continue d’assouplir les mesures sanitaires tout en jouant de prudence.

On déconfine lentement, mais sûrement. Et avec circonspection.

C’est ce que Horacio Arruda a qualifié de « stratégie du filet d’eau ».

Les allègements annoncés sont chaque fois comparables à un robinet qu’on ouvrirait pour laisser couler « un petit filet d’eau ».

Une approche progressive qui, au final, finira par nous permettre de remplir un verre d’eau, puis un autre, et de boire à notre soif.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

François Legault à son arrivée à la conférence de presse de mardi

Hors de question d’aller plus vite, dans les circonstances, avec les variants — plus contagieux — qui s’implantent dans la communauté.

Mais pourquoi, alors, annoncer de nouveaux assouplissements ?

Pourquoi repousser le couvre-feu à 21 h 30 en zone rouge ?

Pourquoi permettre de rouvrir les salles de spectacle en zone rouge ?

Pourquoi les élèves du secondaire iront-ils à l’école à temps plein en zone orange ?

Parce que l’augmentation des cas liée à la relâche ne semble pas dramatique et qu’elle est « annulée un peu par la vaccination qui se poursuit », a dit le premier ministre.

Et parce qu’on a besoin d’oxygène.

Tant les autorités de santé publique que le gouvernement caquiste sont conscients des risques associés à la « fatigue pandémique », comme l’a expliqué le DArruda.

Des assouplissements sont donc nécessaires « pour éviter le décrochage total des individus ».

Un exemple parmi d’autres : un couvre-feu à 20 h alors que le soleil brille, ça devient pas mal plus difficile à justifier et à faire respecter.

Par ailleurs, parlant de briller, s’il faut être conscient que les prochaines semaines seront critiques, il reste que la lumière au bout du tunnel est de plus en plus éclatante.

On a annoncé que d’ici la fête nationale, tous les Québécois qui veulent être vaccinés auront reçu une première dose. C’est majeur. Et si les consignes sanitaires sont respectées, peut-être aura-t-on évité la troisième vague qui est en train de forcer le reconfinement dans certaines zones en Europe.

La prudence est une stratégie gagnante.

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Ce qui est dommage, c’est que la CAQ ne fait pas toujours preuve d’autant de circonspection dans la façon dont elle s’exprime au sujet de sa gestion de la pandémie.

Il lui arrive, hélas, de pécher par orgueil. Et ça vient de se reproduire.

À preuve, la controverse qui faisait rage à Québec, avant l’annonce des assouplissements, au sujet d’un texte publié sur le site internet du parti et intitulé « EST-CE QU’UNE AUTRE ÉQUIPE AURAIT PU FAIRE MIEUX ? »

La question étant posée en lettres majuscules, nous nous permettrons d’y répondre de la même façon : OUI !

L’idée n’est pas de défendre le fait que Québec afficherait aujourd’hui un meilleur bilan si un autre gouvernement avait été en place. On donnerait dans la politique fiction. Laissons les uchronies aux romanciers.

Mais il est important de péter la balloune des caquistes. Car ils semblent persuadés qu’ils ont, dans les circonstances, fait preuve d’une virtuosité exemplaire et inégalable. C’est ce qu’on laisse entendre dans ce texte, basé sur le livre du journaliste Alec Castonguay paru récemment.

> Consultez le texte

François Legault s’est distancié de ce texte, rédigé selon lui par « des militants de la CAQ et des gens de la permanence ».

Le problème, c’est qu’il en était arrivé à peu près à la même conclusion le mois dernier.

« Qu’est-ce que j’aurais pu faire de plus, étant donné que c’est nous qui avons été les plus prudents ? », avait-il déclaré lors d’une entrevue au Journal de Montréal.

Comme quoi prudence et modestie ne vont pas toujours de pair.

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On peut comprendre l’objectif politique de faire la promotion d’un tel récit narratif, mais c’est l’équivalent de regarder en accéléré le film des douze derniers mois avec des lunettes roses.

Faut-il le rappeler : la province a été la pire au pays quant au nombre de cas et de décès. Plusieurs ratés ont été soulignés. Du délestage d’aînés hospitalisés vers les CHSLD aux hésitations à recommander le masque, en passant par des problèmes d’efficacité quant au dépistage et au traçage. Donc, oui, on aurait pu faire mieux.

Dans son livre, le journaliste Alec Castonguay explique par ailleurs que l’an dernier, « le groupe autour du premier ministre » a eu « peur de l’effet tour d’ivoire qui pourrait s’installer ». Ils craignaient d’être « déconnectés ».

Cet effet, le groupe en question aurait tout avantage, visiblement, à s’en méfier encore plus !

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