On se demande depuis quelques jours si le déconfinement de Montréal et même du Québec est trop rapide. Si on va trop vite en permettant déjà les barbecues et les rassemblements en petits groupes.

Mais ce n’est peut-être pas la bonne question à poser.

Contrairement à la première vague, la deuxième est prévisible. On peut donc la voir venir.

On sait qu’elle frappera. On sait que le virus se multipliera. Mais on ne sait pas quand ni où.

La question qu’on devrait donc plutôt se poser, c’est si on est prêts à y faire face, cette fois. Et surtout si dès demain on est prêts à intervenir efficacement, le plus vite possible, peu importe où se pointe la COVID-19 dans la province, pour en stopper rapidement la propagation.

Et la réponse, malheureusement, est non. Pour l’instant.

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Un des principaux obstacles qui s’est érigé devant le trio Legault-Arruda-McCann depuis le début de la pandémie, c’est « la machine ». Le réseau de la santé est tout simplement trop gros, trop lourd, trop complexe.

C’est, en un mot, un gigantesque mammouth qu’on ne peut pas faire bouger, même avec toute la volonté du monde, même avec le poids et l’autorité du premier ministre du Québec.

La crise sanitaire a prouvé que ce qui est décidé en haut ne descend pas nécessairement jusqu’en bas. Et ce qui se passe en bas ne remonte pas toujours en haut. Si bien que les autorités sont incapables de répondre rapidement lorsque survient une urgence.

PHOTO PEDRO PARDO, AGENCE FRANCE-PRESSE

Québec planche sur le plan d’action de la deuxième vague : mobiliser des équipes d’intervention qui pourraient agir rapidement.

En fait, elles ne savent même pas toujours quand survient une urgence, comme l’a tristement montré le fiasco du CHSLD Herron.

Donc, que faire si on veut agir vite et bien la prochaine fois qu’il y a une éclosion de cas de COVID-19 au Québec ? On n’a pas le choix, il va falloir contourner le mammouth.

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Le gouvernement Legault a tardé à donner l’attention qu’elle mérite à la Dre Joanne Liu. Mais les échos en provenance de Québec laissent croire qu’une des idées de l’ex-présidente de Médecins sans frontières fait réfléchir le sous-ministre adjoint Daniel Desharnais, qui planche sur le plan d’action de la deuxième vague : mobiliser des équipes d’intervention qui pourraient agir rapidement.

Après tout, c’est ce que les organisations humanitaires font lorsqu’une pandémie survient en Afrique ou ailleurs, comme la fièvre jaune, le choléra ou Ebola. Elles créent une rapid response team – une unité de réponse rapide – capable d’intervenir n’importe où en quelques heures.

Pourquoi pas au Québec ?

Imaginons une dizaine d’équipes ayant une agilité d’action, formées d’un expert de la logistique, d’un médecin ou d’un spécialiste de santé publique ainsi que d’une infirmière.

Imaginons qu’elles sont en contact direct et constant avec la cellule de crise nationale.

Imaginons qu’elles puissent débarquer n’importe où au Québec, n’importe quand, à la moindre éclosion. Et ce, en quelques heures à peine.

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À Québec, le scénario qui circule s’appuie sur une deuxième vague (ou plus précisément une série d’éclosions) qui a lieu non pas à Montréal, mais en région, là où les populations ne sont pas immunisées.

Cela signifie que la COVID-19 risque de se pointer le nez n’importe où au cours des prochaines semaines et des prochains mois, de Rouyn-Noranda à Blanc-Sablon. D’où l’importance de donner aux régions un accès aux meilleurs spécialistes capables d’adopter les meilleures pratiques dans n’importe quel contexte.

On a d’ailleurs vu ces dernières semaines la difficulté qu’ont eue certains établissements, même les plus gros, à délimiter avec succès les secteurs « chauds » et « froids » (avec et sans virus), comme l’ont prouvé la demi-douzaine d’éclosions dans des hôpitaux.

Une unité d’intervention rapide prêterait ainsi main-forte là où le besoin se présente. Elle pourrait optimiser la prévention et le contrôle des infections. Elle pourrait créer des « circuits de patients » positifs et négatifs afin d’éviter tout croisement.

Puis elle pourrait former le personnel sur place. S’assurer que tout est en place. Et en quelques jours, elle s’envolerait ailleurs, où se trouve le virus.

La question n’est donc pas de savoir si on déconfine trop rapidement… mais bien si on peut intervenir rapidement lorsque le déconfinement provoquera des éclosions.

La « SWAT team sanitaire » suggérée par la Dre Liu aurait cette capacité.

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