Bravo, mais à suivre… On pourrait résumer ainsi la réforme de la collective sélective annoncée mardi par le ministre de l’Environnement, Benoit Charette.

Bravo, car Québec repense complètement la logique du système. Les villes ne géreront plus la collecte de matières recyclables. Désormais, les entreprises qui mettent des produits sur le marché en seront responsables du début à la fin. C’est plus juste et ce devrait aussi être plus efficace. Si ceux qui mettent en circulation des emballages en carton, en plastique ou des produits en papier doivent en assumer autant les coûts que la gestion, ils auront alors un incitatif à en produire moins et à en recycler plus. Du moins, si tout est bien fait…

D’où l’important « à suivre ». En effet, plusieurs détails cruciaux sont encore inconnus.

Il reste à savoir quel sera le taux de recyclage exigé pour chaque matière, quelle sera la pénalité imposée en cas d’échec et enfin, quelle sera la traçabilité ou la transparence pour ces informations. Tout cela, M. Charette le précisera par règlement d’ici 2022. Le système entrera ensuite en vigueur en 2025.

Ce n’est malheureusement pas très rapide… N’empêche qu’au moins, M. Charette peut se féliciter d’avoir accompli beaucoup. Mardi, les municipalités, l’industrie ainsi que les écologistes appuyaient les grands contours de sa réforme.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a annoncé mardi une réforme de la collective sélective.

Fini, l’époque où chaque ville concluait un contrat avec un des 22 centres de tri du Québec. Et fini, espérons-le, l’époque où chaque centre fonctionnait selon ses propres normes sans qu’on sache précisément ce qui en entrait et en sortait.

Ce manque de normes et de planification a mené à des situations absurdes comme celle des papetières québécoises qui achètent leur papier recyclé à l’étranger, car celui des centres de tri était trop contaminé.

Recyc-Québec agréera un nouvel organisme qui supervisera désormais la collecte pour l’ensemble du Québec. Toute l’industrie y collaborera. Les papetières, par exemple, pourront y faire connaître leurs normes afin de développer chez nous un marché correspondant à leurs besoins.

Mais avant tout, ce nouvel organisme devra faire quelques diagnostics. Pour comprendre entre autres si les produits mis en marché sont assez recyclables, si le mode de collecte avec le bac bleu ou vert permet de les récupérer sans les contaminer, et si les centres de tri sous leur forme actuelle permettent de bien les traiter et les acheminer vers des marchés locaux.

Pour cela, le gouvernement caquiste a déjà donné un sérieux coup de pouce il y a deux semaines aux centres de tri. En ayant le courage d’élargir la consigne aux contenants de plastique et de verre, M. Charette s’est assuré que le taux de recyclage augmente pour ces bouteilles tout en réduisant le volume et la contamination des matières traitées dans les centres de tri.

Il faut maintenant poursuivre le travail en agissant en amont.

On l’oublie, mais le « R » le plus important n’est pas « recycler ». C’est « réduire ». Moins le Québec consommera de matière, mieux se portera le recyclage. Pour les citoyens, cela passe par une réflexion sur la surconsommation. Et pour l’industrie, cela passe par l’écoconception. Avec des incitatifs financiers qui font en sorte que les solutions ne dépendent plus de la vertu.

On aimerait que le nouvel organisme réfléchisse aussi à notre bon vieux bac de récupération. Les citoyens continuent d’y placer leurs matières pêle-mêle. Et même avec l’élargissement de la consigne, le risque de contamination demeure, comme pour le plastique qui corrompt le carton et le papier. Mener des collectes séparées pour différentes catégories de matières serait une option à envisager sérieusement.

On le constate, beaucoup de travail reste à faire. Mais il faut saluer cette excellente décision de M. Charette, qui s’ajoute à celle sur la consigne et à laquelle il prévoit faire suite avec des annonces attendues au printemps sur le compostage et le plastique.

Avec la récente menace de fermeture de centres de tri, les caquistes n’avaient pas le choix de bouger.

Reste qu’ils ont le mérite de lancer aujourd’hui une réforme que les libéraux n’avaient pas osé entreprendre.

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