Ça ne marchera pas. Dans un rapport publié la semaine dernière, Greenpeace démonte pièce par pièce le plan pompeusement appelé « zéro déchet plastique d’ici 2030 » du gouvernement fédéral.

Une démonstration convaincante, dont les conclusions reçoivent l’aval des experts que nous avons consultés.

Ce n’est pas très surprenant. Parce que le plan d’action du gouvernement fédéral, malheureusement, n’est pas réellement un plan.

Il fait miroiter un objectif extrêmement ambitieux. Il esquisse les grands principes qui pourraient nous y amener (rendre les producteurs responsables de leurs emballages, mieux recycler le plastique).

Mais nulle part n’explique-t-on les gestes concrets qui permettraient de venir à bout du monstre que forment les 3,2 millions de tonnes de déchets de plastique générés annuellement par les Canadiens.

Pire : certains des objectifs cités dans le plan fédéral, et qui sont tirés d’une charte signée par les pays du G7, laissent croire que le gouvernement joue avec les mots lorsqu’il parle d’un objectif « zéro déchet plastique ».

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

« Nulle part n’explique-t-on les gestes concrets qui permettraient de venir à bout du monstre que forment les 3,2 millions de tonnes de déchets de plastique générés annuellement par les Canadiens », écrit notre éditorialiste.

On dit par exemple vouloir « travailler avec l’industrie pour obtenir 100 % de produits de plastiques réutilisables et recyclables d’ici 2030 ».

On ne parle donc pas d’éliminer le plastique que nous générons, ni même de recycler ce plastique. On parle de le rendre recyclable.

Or, ce n’est pas parce qu’un déchet est recyclable qu’il est recyclé. On n’a qu’à regarder la situation actuelle pour s’en convaincre.

Les Canadiens rincent leurs pots de yogourt et envoient au bac de récupération d’innombrables emballages, sacs et bouteilles de toutes sortes marqués du logo « recyclable ».

Malgré cela, à peine 9 % de nos déchets de plastique sont réellement recyclés au Canada. La vaste majorité (86 %) prennent encore le chemin des sites d’enfouissement.

En s’appuyant sur un rapport de Deloitte, Greenpeace montre que pour recycler 90 % de notre plastique, il faudrait construire plus de 160 nouveaux centres de tri et usines de recyclage au pays – des investissements d’au moins 8 milliards de dollars.

Rien de cela n’est en branle.

Même si c’était le cas, on ne serait pas sortis du bois. Le recyclage mécanique, qui prédomine au pays, est loin d’être une panacée. Ce procédé consiste à déchiqueter, puis à faire fondre le plastique. Mais la plupart du temps, on est forcé d’intégrer du plastique neuf à l’ancien. Et on finit trop souvent avec un matériau de faible qualité, qui servira à fabriquer des objets peu durables qui prendront à leur tour le chemin du bac de récupération.

Le recyclage chimique consistant à dépolymériser le plastique est plus prometteur. Mais la technologie est coûteuse et complexe.

Les solutions ? Elles devront venir de plusieurs fronts. Mais il est clair qu’il faut impérativement réduire notre consommation de plastique.

Le fédéral bannira bien quelques produits à usage unique l’an prochain (sacs d’épicerie, pailles, anneaux destinés à tenir les canettes ensemble). Mais le pas est si minuscule et symbolique qu’il fait sourire les spécialistes.

Greenpeace a raison de dire qu’il faudrait commencer par cesser de subventionner les fabricants de plastique vierge comme on le fait au pays. Le coût du plastique neuf est actuellement si bas que personne n’a intérêt à choisir le plastique recyclé. Le gouvernement fait ici exactement le contraire de l’écofiscalité.

Au moment où nos bacs s’apprêtent à déborder d’emballages de toutes sortes après les achats des Fêtes, le moment est idéal pour réfléchir à notre dépendance au plastique. Au-delà des gestes individuels qu’on peut poser, le gouvernement a un rôle essentiel à jouer. Le système et la réglementation doivent changer.

Notre cure de désintoxication collective doit prendre la forme d’un « plan zéro déchet plastique » qui a les moyens de ses ambitions.

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