Négocier avec Donald Trump, c’est un peu comme jouer aux échecs avec un pigeon, a écrit l’an dernier le journaliste Pascal Riché.

« Le pigeon bat des ailes et tourne en rond, fiche toutes les pièces en l’air, fiente sur l’échiquier, puis se vante d’avoir gagné la partie. »

Il utilisait cette métaphore pour parler de l’attitude de Donald Trump dans le dossier iranien. On y a également fait référence à la suite du premier débat présidentiel, mais elle reflète aussi en tous points le comportement du président à l’égard de l’élection.

Le problème, c’est qu’un bon paquet de partisans indéfectibles du président font comme si tout ça était parfaitement normal.

Y compris plusieurs de ses alliés au sein du système politique américain. Même s’il s’ébroue comme un pigeon, d’une façon particulièrement odieuse, ils ne semblent pas prêts à le laisser tomber.

Ils ont épousé sa cause pour le meilleur et pour le pire.

Prenez par exemple le leader républicain à la Chambre des représentants, Kevin McCarthy. Il a lui aussi soutenu que Donald Trump « a gagné cette élection ». Il a même affirmé sur Twitter, l’air indigné, que « les républicains ne seront pas réduits au silence ».

Il n’est pas le seul, parmi les républicains au Congrès américain, à crier à la fraude. À serrer les rangs derrière un président fabulateur qui dit être victime d’une escroquerie. À insister, comme le vice-président Mike Pence sur Twitter, pour que tous les votes LÉGAUX soient comptés (les majuscules sont de lui).

Ce n’est pas surprenant. Au cours des quatre dernières années, les républicains ont presque tous cautionné les pires niaiseries de ce président.

Il y a un mot pour ça : béni-oui-oui.

PHOTO BRENDAN SMIALOWSKI, AGENCE FRANCE-PRESSE

Donald Trump, jeudi soir à la Maison-Blanche

Oh, il y a bien eu, parfois, des exceptions ! Mais la plupart du temps, ceux qui ont osé dénoncer certains de ses égarements étaient des politiciens qui n’avaient plus rien à perdre.

Au début de son mandat, les sénateurs républicains Jeff Flake et Bob Corker l’ont critiqué vertement… puis ont pris leur retraite de la vie politique.

Lors du procès en destitution en janvier dernier au Congrès américain, un seul sénateur républicain n’a pas voté pour innocenter Donald Trump : Mitt Romney. Il est – jusqu’à un certain point – devenu la conscience morale du parti. Comme jadis le sénateur John McCain, hélas mort en 2018.

Les autres ont toujours craint de voir leur carrière politique connaître une fin abrupte s’ils lâchaient leur président.

Grâce à eux, Donald Trump a pu donner libre cours à toutes ses lubies, alors pourquoi s’arrêterait-il aujourd’hui ?

Pour qu’il sache tirer sa révérence le moment venu, ses alliés républicains vont forcément devoir jouer un rôle clé. Ils vont devoir lui dire, lorsque cela ne fera plus aucun doute, qu’il est cuit.

Et il n’est pas trop tôt pour préparer le terrain.

Certains semblent d’ailleurs avoir compris que c’est la seule solution possible pour mettre un terme au psychodrame national que le président est en train d’alimenter.

Déjà, ce ne sont plus tous les républicains qui défendent Donald Trump bec et ongles. Certains expriment leur dissidence, soulignaient vendredi des médias américains. Ce mouvement devra s’étendre tel un feu de brousse, rapidement. Il y va de la transition pacifique du pouvoir.

Les républicains peuvent d’ailleurs s’inspirer de leur passé.

C’est la pression de membres républicains du Congrès américain qui a poussé le président Richard Nixon à démissionner, en 1974, dans la foulée du scandale du Watergate.

Après l’avoir soutenu pendant longtemps, des ténors du parti l’ont rencontré à la Maison-Blanche pour lui dire qu’ils en avaient assez.

Le lendemain, il annonçait sa démission.

« Partir heurte toutes les fibres de mon corps. Mais l’intérêt des États-Unis doit passer le premier », avait alors dit Nixon.

Il n’y a pas trente-six solutions. Pour que l’intérêt du pays passe en premier cette année, les républicains devront faire comprendre à Donald Trump qu’il doit partir… avant de faire trop de dégâts.

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