Les libéraux et les conservateurs pensent que vous votez avec votre portefeuille. Pour vous séduire, ils promettent d’y prendre moins d’argent. Il s’agit de leur plus important engagement électoral jusqu’à maintenant, et ils ne s’y prennent pas de la même façon.

Le plan libéral est plus progressiste, car en plus de profiter à la « classe moyenne », il aide aussi les gens à faible revenu. Reste que le plan conservateur aiderait tout de même la « classe moyenne ».

La différence n’est donc pas radicale. Mais elle révèle tout de même leur vision de l’État bien distincte.

Commençons avec l’impôt.

Les conservateurs baisseraient le taux d’imposition sur la première tranche de revenu (entre 12 609 et 47 630 $). Quant à eux, les libéraux hausseraient le revenu à partir duquel les Canadiens paient de l’impôt. Cela signifie que d’ici 2023, un citoyen commencerait à payer de l’impôt à partir d’un revenu de 15 000 $, et non 13 092 $. Cet allègement ne serait pas offert aux contribuables gagnant plus de 147 000 $.

Maintenant, les mesures d’aide.

PHOTO FRANK GUNN, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Andrew Scheer et Justin Trudeau en avril 2018

Les conservateurs voudraient rétablir les crédits d’impôt pour les enfants (activités sportives et artistiques) ainsi que pour les transports en commun. Les libéraux bonifieraient de 15 % leur Allocation canadienne pour enfants (si le bébé a moins de 1 an), et ils élimineraient l’impôt fédéral sur les prestations pour les congés parentaux.

Que faut-il en penser ? La première chose à dire, c’est que les conservateurs ont le mérite d’avoir soumis leurs engagements à l’avance au Directeur parlementaire du budget afin d’en évaluer les coûts de façon indépendante. Les libéraux tardent encore malheureusement à faire preuve de la même transparence.

La deuxième chose qui frappe, c’est que ces partis veulent réduire leurs revenus alors que le fédéral est encore en déficit. Si ce déficit existe, c’est parce que Justin Trudeau n’a pas respecté sa promesse de l’éliminer avant la fin de son mandat. Sur le plan fiscal, ce n’est pas un drame – le ratio dette/PIB du Canada est le plus faible du G7 et il continue de baisser malgré les déficits. Mais sur le plan politique, c’est un réel problème. Les libéraux ont instauré une culture de l’indiscipline budgétaire. Si le déficit ne dérange pas, alors quoi de mal à dépenser un petit milliard ici, un autre là-bas, et ainsi de suite ?

Pour revenir aux promesses, on constate que les conservateurs sont fidèles à eux-mêmes. Comme l’avait fait le gouvernement Harper avec sa baisse de TPS, ils veulent continuer de réduire la capacité fiscale de l’État. Leur baisse d’impôt enlèverait 6 milliards par année aux coffres du fédéral, ce qui l’inciterait à resserrer ses dépenses. C’est aussi dans cette logique que s’inscrivent leurs crédits d’impôt. Au lieu de vouloir gérer des programmes, ils préfèrent redistribuer l’argent aux Canadiens. Toutefois, contrairement à ce qu’ils prétendent, ces chèques augmentent peu la fréquentation des transports collectifs ou des cours de sports et d’arts.

Les libéraux prétendent que les engagements conservateurs visent d’abord « les riches ». C’est grossier. Si M. Scheer se fichait des plus démunis, il ne rendrait pas ses crédits d’impôt remboursables – les Canadiens trop pauvres pour payer de l’impôt seraient compensés, ce qui n’était pas le cas sous Stephen Harper. Quant à la baisse d’impôt conservatrice, elle aidera plus un contribuable au revenu moyen que ne le faisait la baisse libérale de 2015 (elle ne faisait rien pour les Canadiens gagnant moins de 45 000 $).

Par contre, pour cette campagne, les promesses libérales sont bel et bien plus progressistes.

Selon les calculs de l’économiste Kevin Milligan, à partir de 2023, les libéraux permettront à 690 000 personnes à faibles revenus de ne plus payer d’impôt fédéral en plus de sortir 38 000 personnes de la pauvreté. C’est considérable.

En somme, si les conservateurs et les libéraux veulent en remettre dans les poches des Canadiens, ils n’aident pas les mêmes personnes et ils ne le font pas avec la même vision de l’État. Reste maintenant à savoir si leur plan tient la route pour les financer…

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