Les libéraux aiment bien qualifier Andrew Scheer de « Stephen Harper avec un sourire ». Pourtant, en matière de politique étrangère, les convictions du chef du Parti conservateur ne se démarquent pas beaucoup de celles des… libéraux de Justin Trudeau.

C’est à tout le moins l’impression qui se dégage du discours qu’il a prononcé récemment à Montréal, une des nombreuses allocutions prévues ces jours-ci par le chef conservateur pour présenter sa « vision » aux Canadiens.

Bien sûr, il a longuement critiqué Justin Trudeau, avec l’enthousiasme d’un enfant qui frappe sur une piñata.

Il a par exemple accusé le premier ministre de faire passer « le style avant la substance ». Il lui a reproché d’avoir commis de graves erreurs, « presque toujours attribuables » à son manque de jugement, comme son voyage en Inde. On peut prédire sans crainte de se tromper que la diplomatie des chaussettes connaîtra une fin abrupte si Andrew Scheer prend le pouvoir !

Cela dit, le plan de match du chef conservateur, qui a promis « un Canada plus fort dans un monde turbulent », n’a rien de particulièrement original. Essentiellement, avec Andrew Scheer, le pays « réinventera les liens que nous avons avec nos alliés depuis des décennies » et renforcera le rôle du pays « dans les alliances que nous partageons » avec ces pays. Le libre-échange sera « au centre » de cette approche, a-t-il assuré.

Plusieurs ont fait remarquer que de tels propos ressemblent beaucoup à ceux que l’actuelle ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, tient sur une base régulière. C’est vrai. Mais on ne va pas le lui reprocher.

Car la sortie d’Andrew Scheer semble indiquer qu’il cherche à se démarquer de Stephen Harper, qui était allergique au multilatéralisme et se méfiait des institutions internationales. Et c’est tant mieux.

Le chef conservateur dit évidemment vouloir faire mieux que les libéraux, mais sur plusieurs enjeux, on a du mal à voir comment il pourrait y parvenir. Lorsqu’il promet une meilleure relation avec les États-Unis de Donald Trump, par exemple… C’est le genre de mission impossible que même Tom Cruise ne parviendrait pas à mener à bien.

Et lorsqu’il promet de mieux équiper nos forces armées, on ne peut que s’en féliciter, mais le scepticisme est de mise. Ce n’est pas la première fois qu’on nous promet de tels investissements. Or, on attend encore d’en voir la couleur…

Là où les conservateurs pourraient véritablement et aisément se distinguer, c’est sur le plan de nos relations avec la Chine et avec Israël.

Dans le premier cas, ils estiment que le gouvernement libéral n’est pas assez ferme avec Pékin. Qu’il ne cherche pas à « contrer les tactiques d’intimidation » de cette puissance mondiale avec assez d’aplomb. Ce débat est légitime et il aura assurément lieu au cours des prochains mois.

Par contre, lorsque Andrew Scheer promet d’imiter Donald Trump et de déménager l’ambassade du Canada en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem, il fait fausse route. Le statut de Jérusalem ne doit pas être dissocié d’éventuels pourparlers entre Israéliens et Palestiniens. Et le Canada a tout avantage à préserver sa réputation de médiateur le plus neutre et objectif possible sur la scène internationale.

Si Andrew Scheer pense ainsi pouvoir amadouer Donald Trump plus facilement, il se trompe. Les leaders du monde libre ont tout essayé pour courtiser le président américain et il n’a pas bronché.

En contrepartie, si le chef conservateur ne respecte pas le consensus international quant au statut de Jérusalem, il aura forcément plus de mal que prévu à « réinventer les liens » avec les autres alliés du Canada.

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