Oui, le climat se dérègle. Oui, cela devient une urgence. Et oui, le gouvernement Legault a fait peu de choses pour l'instant, à part dire qu'il fera quelque chose. Mais on n'en est pas rendu à bloquer le Parlement, comme le menace déjà Québec solidaire.

En réaction au premier budget caquiste, les solidaires ont crié à la « catastrophe » environnementale. Ce fut, pour l'essentiel, leur seule réaction. Ils ont à peine parlé d'éducation, de santé ou d'emploi. Et si le gouvernement caquiste ne dépose pas un plan crédible de réduction des gaz à effet de serre, Québec solidaire menace de rendre le Parlement dysfonctionnel.

On l'a écrit et on le répète : le gouvernement caquiste est pour l'instant décevant en matière d'environnement. Il prétend s'en occuper, mais si on se fie à ses gestes, il s'en fiche. Il met en priorité le troisième lien à Québec et dépense deux fois plus pour les routes que pour le transport collectif.

Reste que le premier ministre Legault n'est pas comme son homologue ontarien Doug Ford, qui démantèle les politiques vertes, notamment en quittant le marché du carbone.

M. Legault reste immobile, mais il ne recule pas. L'opposition doit le pousser dans le dos, mais est-ce vraiment une raison suffisante pour lancer dès maintenant un ultimatum ?

Pour menacer le gouvernement d'un « barrage politique d'une ampleur sans précédent », comme l'a fait la co-porte-parole solidaire Manon Massé ? Et ce, avant même d'avoir attendu le résultat du congrès spécial de la CAQ sur l'environnement en mai ?

En échange de leur « permission » pour laisser le Parlement fonctionner, les solidaires ont déjà posé leurs exigences. Ils réclament entre autres un plan climat approuvé par un expert indépendant. C'est donner beaucoup de pouvoir à un non-élu.

On comprend Québec solidaire de vouloir représenter les jeunes manifestants qui ont défilé dans les rues pour dénoncer l'inaction face à la crise climatique. Mais cela ne justifie quand même pas de paralyser l'Assemblée nationale.

Le parti de gauche, qui prétend parler au nom du peuple, a récolté 16 % des votes. Il n'a pas la légitimité pour empêcher les élus de voter des lois sur les autres grands enjeux de société. Lui-même commence d'ailleurs à réduire ses champs d'intérêt. Par exemple, à toute question sur la laïcité, il prétend que le réel enjeu est le climat. Il n'est pourtant pas compliqué de parler des deux en même temps.

Les conservateurs utilisent en ce moment à Ottawa la même tactique de l'obstruction parlementaire, à cause de l'affaire SNC-Lavalin. Au-delà de la stratégie, eux aussi ont fini par se convaincre qu'ils défendent la justice. Mais ils réussissent surtout à polariser la population. Ils en sont bien contents, d'ailleurs...

La lutte contre les changements climatiques n'est pas un enjeu de gauche ou de droite. Québec solidaire veut mobiliser la population, autant pour la cause que pour le parti. Mais il y a une différence entre mobiliser et polariser. Avec leur stratégie, les solidaires prennent le risque de basculer du mauvais côté de cette ligne. Cela pousserait des citoyens peu politisés dans les bras de la Coalition avenir Québec et son inaction déguisée en pragmatisme. Les caquistes en seraient bien trop contents.

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