Le kirpa, le voile intégral, les chaussettes de Justin... en tout, huit objets choisis par nos éditorialistes qui ont marqué l'année 2017.

La plume 

Ce fut un début d'année pénible pour l'Enquête nationale sur les femmes autochtones disparues ou assassinées. Son mandat était trop vaste, son échéancier était trop court et ses communications étaient confuses. Des membres de la commission ont dû démissionner. Mais cela ne doit pas faire oublier que cette enquête était nécessaire et que les commissaires travaillent avec ardeur pour que la vérité jaillisse. On en a eu la preuve en décembre lors des séances sur la Basse-Côte-Nord. Une femme a pris la plume d'aigle pour trouver le courage de raconter comment un missionnaire l'a violée. « J'avais 8 ans. Je ressens encore l'odeur de son haleine. » 

- Paul Journet

Les chèques 

En ce début de précampagne électorale, c'est Noël tous les jours. Les chèques pleuvent déjà à Québec. Les parents recevront 100 $ pour payer les fournitures scolaires de chaque enfant à l'école. Le palier d'imposition de base a été réduit, passant de 16 à 15 %. Et il y a aussi eu l'allègement fiscal sur la taxe scolaire, qui nivellera le taux sur le plus bas niveau régional. Ces petits cadeaux, qui viennent après des compressions dans les services, seront distribués juste avant le déclenchement de la campagne électorale. Ce n'est pas dans les arbres que l'argent pousse, c'est au bureau du premier ministre. Ho ho.

- Paul Journet

Le flacon d'échantillon d'urine

Afin d'empêcher les athlètes outrageusement dopés de participer aux Jeux olympiques d'hiver de PyeongChang, en février prochain, le groupe de travail créé par le Comité international olympique a multiplié les contrôles ciblés en 2017. Il y en a eu près de 7000 d'avril à novembre dernier (une augmentation de près de 50 % par rapport à la période correspondante avant les Jeux de Rio) et ce nombre devrait atteindre 20 000 d'ici le début des Jeux. Espérons que cela permettra aux vrais vainqueurs de monter sur le podium, au lieu de se faire piquer leur médaille par des athlètes dopés qui, de toute façon, se la feront enlever quelques années plus tard lorsque leurs échantillons seront réanalysés. 

- Ariane Krol

Le couteau de 6 cm 

C'est la controverse-surprise de l'année. Annoncée dans l'indifférence au début de novembre, la décision d'autoriser les canifs munis d'une lame de 6 cm ou moins à bord des avions en partance du Canada* a rebondi aux Communes deux semaines plus tard, lorsque le Bloc québécois a accusé le gouvernement Trudeau d'accommodement envers les sikhs. L'Assemblée nationale a renchéri d'une motion quasi unanime demandant à Ottawa de revenir sur sa décision. Tout cet émoi aura au moins permis de rappeler aux voyageurs canadiens qu'ils étaient déjà exposés à de tels couteaux puisque de nombreux pays les autorisent depuis longtemps à l'embarquement, illustrant encore une fois que « ce qu'on ne sait pas ne nous fait pas mal ».

* sauf à destination des États-Unis.

- Ariane Krol

La bombe de Kim Jong-Un 

Non seulement Kim Jong-Un nous a-t-il tenu en haleine toute l'année avec sa bombe nucléaire, mais il nous l'a montrée... Le régime a diffusé une photo de ce qui semble être une de ces bombes, en septembre dernier, à la suite du sixième essai nucléaire du pays. Ce test et cette photo : un double affront dont le monde n'avait pourtant pas besoin pour être persuadé que la menace est sérieuse. Pendant ce temps, hélas, Donald Trump n'a jamais véritablement tenté de désamorcer la crise. Il a préféré jeter de l'huile sur le feu et traiter Kim Jong-Un de « Little Rocket Man ». Le président américain a le sens du spectacle, mais en matière de diplomatie, on peut difficilement imaginer pire.  

- Alexandre Sirois

Les Casques bleus 

Certains imaginaient le Canada jouer un rôle déterminant dans le cadre d'une des missions de l'ONU, avec quelque 600 soldats. On a plutôt annoncé cette année la formation d'une force de réaction rapide d'environ 200 militaires qui sera déployée on ne sait trop quand. On a aussi prévu l'envoi éventuel d'une force opérationnelle aérienne, incluant un nombre indéterminé de membres des Forces armées. C'est vrai, l'annonce officielle du retour du Canada dans les opérations de paix n'a pas été à la hauteur des attentes. En revanche, elle confirme que l'ère où le Canada tournait le dos à l'ONU, au multilatéralisme et aux opérations de paix est bel et bien terminée. Enfin ! 

- Alexandre Sirois

Le voile intégral 

L'intensité du débat sur le voile intégral aura été, en 2017, inversement proportionnelle à leur nombre. On compte au Québec moins de 100 femmes qui portent le voile intégral, et pourtant, le sujet a fait les manchettes. Il a clivé. Il a forcé tout le monde à se positionner, au point où 87 % des Québécois ont fini par se dire d'accord pour que l'État force ces quelques femmes à se découvrir. Or comme le rappelait Albert Camus, « la démocratie, ce n'est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité ».  

- François Cardinal

Les chaussettes de Justin 

Il y a 100 ans, on a utilisé des bretelles pour passer des messages, en créant l'homme-sandwich. En 2017, le premier ministre canadien a plutôt choisi ses chaussettes pour passer ses propres messages. Il l'a fait, par exemple, le jour de la Gay Pride, en arborant une chaussette aux couleurs de l'arc-en-ciel et l'autre, portant le message « Eid Mubarak », pour souhaiter une bonne fin de ramadan. Une seule paire de bas, donc, trois soutiens : les gais, les musulmans et... les Canadiens, car les chaussettes (d'une valeur de 14,99 $) avaient été conçues et fabriquées au pays. Le New York Times a ainsi applaudi « la diplomatie de la chaussette ». 

- François Cardinal

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