Faisons payer les riches! Lors du discours sur l'état de l'Union mardi, le président Obama a fait un plaidoyer inspiré et attendu pour une meilleure justice fiscale.

Devant ce Congrès qui lui est hostile au plan économique, le président Obama est revenu à la charge avec la «taxe Buffett». Empruntée au milliardaire Warren Buffett, l'idée consiste à rééquilibrer le taux d'imposition des Américains les mieux nantis avec celui de la classe moyenne, soit environ 30%. De 1992 à 1998, le fardeau fiscal des 400 Américains les plus riches est passé de 29,2% à 21,5%. M. Buffett a lui-même payé 17,4% d'impôts en 2010, comparativement à 36% pour sa secrétaire Debbie Bosanek, qui a assisté au discours sur l'état de l'Union dans la loge de la Première dame. «Demander à un milliardaire de payer au moins autant que sa secrétaire? La plupart des Américains appelleraient ça le gros bon sens», a dit Barack Obama.

Pour revenir au «gros bon sens», l'administration Obama devra convaincre le Congrès de hausser considérablement le taux d'imposition sur les gains en capital, réduit de 28% à 20% sous Bill Clinton puis à 15% sous George W. Bush. C'est de cette façon que Mitt Romney n'a payé que 15,4% d'impôts en 2011. Vrai, les gains en capital sont imposés après les profits des entreprises à 35%, mais trop de contribuables bien nantis profitent de ce déséquilibre fiscal en se payant des revenus d'investissement plutôt que des salaires. Les États-Unis n'ont plus les moyens de passer l'éponge. La question mériterait aussi réflexion au Québec, où le taux d'imposition maximal des gains en capital est de 24,1%.

Rentable au plan financier comme au plan électoral, la taxe Buffett ne règlera pas tous les problèmes fiscaux du gouvernement américain. Après tout, les millionnaires américains ne représentent que 9,5% des revenus de tous les contribuables. L'administration Obama s'est bien gardée de chiffrer son impact sur le déficit, mais selon les calculs du Tax Foundation, une «super taxe Buffett» (50% d'impôts après un million et 100% après 10 millions) réduirait le déficit de seulement 20%.

L'autre partie de la solution, Barack Obama n'en parlera malheureusement pas durant la campagne électorale: une taxe nationale sur la consommation, comme la TPS au Canada. Les États-Unis sont le seul pays du G20 à ne pas imposer une telle taxe. Contrairement à la taxe Buffett, personne ne veut prendre le bâton du pèlerin. Dès que l'idée est évoquée dans les cercles académiques - à l'Institut Brookings cet automne -, plusieurs lobbys s'y opposent, dont la Fédération nationale des commerces de détail qui brandit l'épouvantail de 850 000 pertes d'emploi.

Pourtant, les taxes à la consommation sont un modèle d'équité fiscale à l'épreuve des meilleurs fiscalistes, en plus d'encourager l'épargne. Mais cette taxe-là n'est pas à l'agenda de Barack Obama.

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