Pas besoin d'être membre d'un des nombreux comités de soutien d'Ingrid Betancourt pour ressentir la joie immense de savoir cette femme enfin libre. Nous étions probablement des millions dans le monde à avoir les larmes aux yeux et la gorge serrée à la vue du visage émacié mais souriant de la célèbre otage.

Honnêtement, on n'y croyait plus. Les dernières images de l'ancienne candidate à la présidence de la Colombie nous avaient révélé un femme prostrée, affaiblie, défaite. Les rumeurs à propos de sa santé n'étaient pas bonnes. Puis ce petit miracle. Une opération digne d'un film hollywoodien qui a permis la libération de 15 otages, certains prisonniers des FARC depuis 10 ans!

Médiatisation oblige, c'est d'abord le sort de Mme Betancourt qui occupe l'avant-scène. Normal. Depuis six ans, nous suivions, de loin, le récit de sa détention. En espérant très fort la revoir un jour. Vivante. De la voir si rayonnante aux côtés de sa mère, mercredi, était non seulement réjouissant, c'était carrément bouleversant. On se dit qu'il faut une force de caractère hors du commun pour survivre à une telle épreuve avec autant de classe et de dignité.

L'émotion était tout aussi vive hier lorsqu'on a vu la mère et ses deux enfants enfin réunis. Tous les parents peuvent imaginer, l'espace d'un instant, l'immense douleur d'être séparés de leurs enfants pendant six ans. Mme Betancourt n'aura pas connu le bonheur de voir son fils et sa fille devenir de jeunes adultes. La cruauté de la situation aurait pu avoir raison de sa persévérance. Elle l'a plutôt décuplée. En effet, depuis sa libération, l'ex-otage a déclaré à plusieurs reprises à quel point le désir de revoir ses enfants l'avait soutenue durant toutes ces années.

Sa volonté impose notre respect. À peine 24 heures après sa libération, Mme Betancourt parlait déjà de son éventuelle participation politique. Elle n'a pas perdu un instant pour nous rappeler qu'il y a d'autres otages qui ont plus que jamais besoin de soutien. Ce n'était sans doute pas la dernière fois qu'Ingrid Betancourt interpellait la communauté internationale à ce sujet. Cette femme n'a visiblement pas l'intention de se taire. Malgré les horreurs de la détention, sa détermination est intacte.

Les prochains jours seront consacrés au bonheur du retour et des retrouvailles. Les présidents de la Colombie et de la France se féliciteront, avec raison, d'avoir réussi l'impossible, chacun à leur façon, sans avoir négocié avec la guerilla. On en saura sans doute plus sur les conditions de détention de Mme Betancourt dans la jungle colombienne (ses premiers commentaires ont confirmé qu'elle a subi un traitement inhumain).

Une fois la poussière retombée, cette femme devra se reconstruire. Réapprendre la liberté. Renouer avec son mari, sa famille, ses amis. Aspirer à une vie plus calme, à défaut d'une vie normale. Et accepter qu'aux yeux du monde, elle est et restera pour toujours un modèle de courage.

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