Les résidants des environs de Lachenaie vont se faire empester par nos ordures durant au moins cinq autres années, vient d'annoncer le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. Pire: tant qu'on ne s'organisera pas pour traiter les déchets organiques de la région de Montréal, il va falloir continuer à agrandir ce fichu dépotoir. Gênant.

Surtout que ça fait un bout de temps qu'on aurait dû s'attaquer au problème. Déjà en 2003, le BAPE avait refusé d'évaluer la demande d'agrandissement qui lui avait été soumise tant que la Communauté métropolitaine de Montréal n'aurait pas de plan de gestion des matières résiduelles. Cinq ans plus tard, le plan existe, mais on n'est guère plus avancé.

Cette année, les municipalités membres de la CMM, dont Montréal, auraient dû récupérer 60% de leurs résidus organiques. C'est l'objectif qu'avait fixé Québec dans sa politique de gestion des matières résiduelles. On est très loin du compte: 8% en moyenne pour l'ensemble de la CMM. Lamentable.

Les matières putrescibles représentent pourtant près de 40% des déchets enfouis à Lachenaie. Presque un sac sur deux... et la majorité des problèmes d'odeurs et de goélands dont se plaignent les voisins du site. Pour arrêter de nourrir ce monstre, il va falloir s'occuper des déchets de table. Et pas seulement en compostant chacun sur son balcon. Une bonne partie des Montréalais n'ont pas d'espace, ou d'intérêt, pour le jardinage. Pourquoi diable voudraient-ils fabriquer du compost? Par contre, la plupart se donneraient sans doute la peine de mettre leurs trognons et leurs épluchures de côté si la Ville en faisait la cueillette.

Hélas, ni Montréal ni le reste de la CMM ne paraissent pressées de s'y mettre. La CMM se donne encore plus de quatre ans pour en arriver à récupérer 60% de ses matières organiques – objectif qui, rappelons-le, aurait dû être atteint cette année. Et Montréal à part les initiatives de quelques-uns de ses arrondissements, n'est pas partie pour faire mieux.

C'est qu'il faudra des installations pour traiter ce flot de déchets verts. La CMM veut bien les construire, à condition que Québec acquitte 85% de la facture. Bonne chance! Au bureau de la ministre des Affaires municipales, on nous rappelle qu'aucun programme n'est destiné à financer de tels investissements. Reste à voir ce que dira sa collègue de l'Environnement. La ministre Line Beauchamp doit présenter sa nouvelle politique de gestion des matières résiduelles pour toute la province à l'automne. Elle pourra difficilement éviter le sujet des matières organiques. Mais si elle fixe de nouvelles cibles sans que Québec ne donne aux municipalités les moyens de les atteindre, il ne faut pas s'attendre à grands résultats.

Victoriaville, qui récupère les matières putrescibles depuis des années, demeure une exception au Québec. L'enfouissement est trop bon marché: pour les municipalités, toute autre méthode paraît inabordable en comparaison. Sans incitatif financier, la majorité d'entre elles vont continuer à expédier leurs déchets aux dépotoirs.

Le BAPE demande que la CMM rende des comptes sur ses objectifs de réduction en 2012, au moment de revoir l'agrandissement du site de Lachenaie. À moins que le vent ne tourne bientôt, elle n'aura pas grand progrès à signaler.

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