Des juges réduisent les peines de prévenus parce qu'en attendant la tenue de leur procès, ils sont détenus dans des conditions insalubres à la prison surpeuplée de Bordeaux. Êtes-vous d'accord?

Jean Bottari

Préposé aux bénéficiaires



PENDANT CE TEMPS, DANS NOS CHSLD

La prison de Bordeaux est vétuste et insalubre? À ce que je sache, une prison n'est pas un camp de vacances et le prévénu n'avait qu'à penser aux conséquences avant de commettre un crime. Suis-je démagogue? Probablement que j'en serai accusé et honnêtement, le sort des détenus ne m'importe pas autant que le sort peu enviable réservé à nos aînés parqués dans les CHSLD et les résidences privées. Je compare des pommes avec des oranges, me direz vous? Non, pas du tout. Un criminel participe de par ses actions à la démolition de notre société. L'aîné, lui, a participé dans la grande majorité des cas à bâtir la société dans laquelle nous vivons. Les juges réduisent les peines des prévenus parce qu'ils se plaignent des conditions de vie à la cour? Soit, mais qui écoute les «vieux» qui vivent en institution dans des conditions aussi outrageuses et irrespectueuses que les bandits? Les gouvernements, tant au fédéral qu'au provincial, vont probablement investir beaucoup d'argent afin d'améliorer la qualité de vie des «résidents» de la prison de Bordeaux. Normal, une juge dénonce et fait les nouvelles. Mais l'aîné en résidence privée et en CHSLD, qui parle en son nom? Je n'ai jamais encore entendu un magistrat parler au nom de nos parents et grands-parents qui sont trop souvent laissés pour compte et servent ni plus ni moins à grossir les coffres de multinationales prêtes à tout pour faire des profits, ainsi qu'aux hommes d'affaires qui gèrent les CHSLD et qui engrangent malgré le caractère public de ces entreprises, de faramineux profits.

Jean Bottari

Jean Baillargeon

Expert-conseil en communication stratégique et en gestion d'enjeux



UNE BONNE CAUSE POUR VOTRE RÉHABILITATION, M. HARPER!

L'État fédéral se déresponsabilise en adoptant des lois plus sévères au niveau des sentences criminelles tout en n'ayant pas de places salubres dans les prisons pour loger les détenus adéquatement. J'appuie l'attitude des juges visant à réduire les sentences afin de faire pression sur le gouvernement fédéral pour qu'il agisse rapidement, soit en construisant de nouvelles prisons, soit en agrandissant celles déjà existantes ou, au moins, en ne les fermant pas comme ce fut le cas avec l'Institut Leclerc. Quand la main droite gouvernementale contredit la main gauche, il est temps pour les élus fédéraux de dépasser le stade du « façadisme politique » et d'agir au plus vite. Sinon, notre problème de gouvernance publique ne fera que s'accentuer et les citoyens auront raison de ne plus croire à notre système de justice, puisque les sentences ne seront pas purger entièrement, faute de place adéquate. Nous sommes capables de lancer des satellites, sommes-nous capables de gérer adéquatement nos prisons fédérales en offrant aux détenus des conditions décentes pour purger leur peine? M. Harper, un peu d'humanisme et d'ouverture face à la réhabilitation des prisonniers, cela ne pourra qu'être bénéfique pour votre propre réhabilitation politique au Québec, vous en avez encore plus besoin que les détenus.

Photo

Jean Baillargeon

Jonathan Guilbault

Séminariste



ENCORE CHIFFRER L'ENFER

L'initiative de la juge Isabelle Rheault et de quelques autres de ses pairs ne manque pas de magnanimité ni d'une apparence de bon sens : relâcher plus tôt que prévu certains détenus allège cet engorgement rendant les conditions de détention inconvenantes. Néanmoins, leur pratique relève de l'arbitraire le plus vertigineux : comment déterminer si tel détenu contribue au climat de violence, ou en est la victime? Dans quelles proportions? Comment chiffrer la profondeur de l'enfer de Bordeaux par rapport à celui des autres prisons? Même si l'on pouvait apporter des réponses à ces questions demeurerait le fait inquiétant que l'initiative alimente une logique pénale archaïque, car elle tente d'évaluer ce qu'il faut de souffrance pour qu'un criminel acquitte sa dette. La souffrance d'un détenu ne m'apporte aucune satisfaction. Je souhaite plutôt que celui-ci fasse acte de réparation, par exemple par des travaux communautaires, et qu'il bénéficie d'un contexte favorable pour redevenir un citoyen responsable - ce qui n'est manifestement pas le cas dans nos prisons à l'heure actuelle. Bref, en dépit de leur bonne foi pour compenser une détresse humaine injuste, les juges concernés retardent les véritables réformes que le ministère de la Justice devrait entreprendre.

Photo fournie par Jonathan Guilbault

Jonathan Guilbault

Stéphane Lévesque

Enseignant au secondaire



L'ASPECT PUNITIF DE LA DÉTENTION

La base, le fondement même de ce problème, c'est la surpopulation carcérale. Les centres de détention ne fournissent plus à la demande. Toutefois, dans le contexte socio-économique actuel, on comprendra facilement qu'il est politiquement plus avantageux de travailler à l'élimination des moisissures dans les murs des écoles ou des hôpitaux que de chercher à améliorer le milieu de vie des prisonniers. En ce qui me concerne, je m'oppose à la décision des magistrats qui allègent les peines sous prétexte que les conditions de détention ne respectent pas la dignité humaine. Ici même à Montréal, les banques alimentaires sont de plus en plus visitées par d'honnêtes travailleurs qui n'arrivent plus. Par ailleurs, plusieurs familles du Québec doivent malencontreusement vivre dans des logements probablement aussi insalubres que les cellules de Bordeaux. Quelqu'un cherche-t-il à alléger leur fardeau? L'idée derrière la détention, c'est avant tout l'aspect punitif, la contrainte d'être privé de ses droits, de ses libertés. Si on n'arrive pas, dans notre système, à offrir un milieu de vie sain et digne aux gens respectueux des lois, je ne vois pas pourquoi on devrait se soucier d'alléger la peine de ceux qui enfreignent ces mêmes lois.