La chef du Parti québécois, Pauline Marois, devrait-elle remettre sa démission? Le PQ aurait-il plus de chances d'être porté au pouvoir aux prochaines élections avec un autre chef? Qui, selon vous, ferait mieux que Mme Marois?

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Gaétan Frigon

Président exécutif de Publipage inc. et ancien PDG de la Société des alcools du Québec et de Loto-Québec

ELLE N'A PAS CE QU'IL FAUT

Durant mes cinq années à la tête de la SAQ et de Loto-Québec, j'ai eu trois ministres comme patrons: Bernard Landry, François Legault et Pauline Marois. Autant mon expérience a été positive avec les deux premiers, autant elle a été négative avec Pauline Marois. Et cela n'avait rien à voir avec le fait qu'elle était une femme, mais avec le fait qu'elle était Pauline Marois. Il m'apparaît évident aujourd'hui que les Québécois dans leur ensemble en arrivent à la même conclusion que moi, à savoir que Pauline Marois n'a pas ce qu'il faut pour diriger le Québec et qu'elle devrait tout simplement remettre sa démission. De toute façon, il est déjà tard pour le PQ, car trop de mal a été fait et il est fort possible qu'un nouveau chef n'y change rien. D'ailleurs, Gilles Duceppe est le seul qui pourrait améliorer les choses et peut-être empêcher la disparition pure et simple du PQ. Le train qui s'en vient à grande vitesse s'appelle François Legault et il sera difficile de l'arrêter. Son nouveau parti pourrait même répéter au niveau provincial ce que le NPD a réalisé au niveau fédéral. Et si c'est le cas, le PQ pourrait subir le même sort que le Bloc québécois. François Legault est moins «politique» que les autres chefs mais, dans les circonstances actuelles, cela ne peut que bien le servir. J'entrevois d'ailleurs le résultat des prochaines élections : le nouveau parti de François Legault au pouvoir avec les libéraux formant une opposition forte ou vice-versa. Mais dans un cas comme dans l'autre, le PQ se retrouve loin derrière.

Mélanie Dugré



Avocate

POUR LA SURVIE DU PQ

L'actuelle  dérive du PQ est fort malheureuse puisque Pauline Marois semblait avoir l'étoffe d'une rassembleuse après le court règne d'André Boisclair qui avait divisé le parti. Mais le PQ a été victime d'une série d'événements qui ont affaibli ses fondations. D'abord le désintéressement de la population pour la cause souverainiste, lequel s'explique notamment par un sombre contexte économique et social. Puis, un certain nombre de prises de position douteuses, entre autre concernant le projet de loi 204, auront miné la confiance des membres en leur chef. Est-ce que le PQ est pour autant mort? Certainement pas. Ce serait sous-estimer la fougue, la passion et l'ardeur de plusieurs de ses membres et militants. Je ne crois toutefois pas que la vapeur puisse être renversée pour Mme Marois et cette dernière doit maintenant faire abstraction de ses ambitions personnelles en tirant sa révérence au nom de la survie de son parti. Avant de penser accéder au pouvoir, lointaine illusion pour le moment, le PQ devra surtout se trouver un nouveau capitaine. Plusieurs lui reprochent son autoritarisme et son inflexibilité, mais je serais tentée d'offrir les commandes du navire à Gilles Duceppe et lui donner la chance, malgré une mer fort agitée, de mener ce bateau abimé à bon port.

Guy Ferland

Professeur de philosophie au collège Lionel-Groulx de Sainte-Thérèse

SES JOURS SONT COMPTÉS

Les couteaux volent bas au PQ. Lorsque des députés célèbres demandent à la chef pourquoi elle reste en poste, que d'autres vont à une réunion de Québec solidaire pendant une réunion des députés du parti, que le comité exécutif refuse d'injecter immédiatement de l'argent dans une campagne afin de mousser la personnalité de Mme Marois, que les indéfectibles se comptent sur les doigts des deux mains, que plusieurs péquistes sous le couvert de l'anonymat affirment que la chef ne passe pas et que le parti risque de disparaître aux prochaines élections, on peut supposer légitimement que les jours de Pauline Marois à la tête du PQ sont comptés. Avec des amis comme cela, on n'a pas besoin d'ennemis. Qui pourrait succéder à Mme Marois et tenir en bride ce parti indomptable? Déjà plusieurs noms circulent : Pierre Curzi, Bernard Drainville et Gilles Duceppe. Louise Beaudoin est trop associée à l'ancienne garde pour pouvoir prétendre à la chaise éjectable... euh, au trône du PQ. Son expérience à la tête d'un parti, sa grande classe dans la victoire comme dans la défaite, sa popularité au Québec et sa renommée à l'extérieur de la province font de Gilles Duceppe un choix logique.



Caroline Moreno

Écrivain

LE PQ N'EXISTE PLUS

Un chef se doit d'être rassembleur. Plutôt que de recueillir les miettes laissées par son prédécesseur, André Boisclair, Pauline Marois les a dispersées. Le PQ n'existe plus. Sans cause à défendre, il a perdu son âme et ses électeurs. 

Lorsqu'on dirige une formation politique qui revendique l'indépendance d'un État, il y a des gestes de rupture à poser, des convictions à défendre, des appels à la population à adresser. Il faut de la suite dans les idées. Rien n'interdit Gilles Duceppe ou Pauline Marois de prendre exemple sur Mahmoud Abbas et de militer en faveur d'une reconnaissance du Québec à l'ONU. Au PQ, les ambitions personnelles des uns et des autres ont pris le dessus sur les idéaux. Les discours n'ont plus de saveur, de tonus, de profondeur. Ils s'inspirent de l'air du temps, des sondages. Remplacer Pauline Marois par un autre péquiste ne changera rien au fait que ce parti n'en est plus un.

Antonin-Xavier Fournier

Professeur de sciences politiques au cégep de Sherbrooke

LA PRESSION TROP FORTE

La situation de Pauline Marois est pour le moins précaire. Aux prises avec des dissensions importantes à l'intérieur de ses propres troupes depuis bientôt six mois, on sent son leadership clairement affaibli. Comme si la situation n'était pas suffisamment préoccupante, les sondages des dernières semaines démontrent, sans l'ombre d'un doute, qu'elle ne réussit plus à profiter de la faiblesse du Parti libéral et de son chef Jean Charest. Bref, il n'y a plus de corrélation entre la chute du PLQ et une hausse possible des intentions de vote à l'endroit du PQ. Plus grave encore, le famélique 20% d'intentions de votes, jumelé à notre mode de scrutin majoritaire à un tour, laissent présager que le PQ pourrait faire élire moins de 10 députés lors des prochaines élections générales. Voilà tous les ingrédients d'une recette bien connue pour organiser une mutinerie et remplacer le capitaine du navire. Force est donc de constater que la pression est actuellement trop forte sur la chef de l'opposition officielle et que son caucus, les yeux rivés sur les sondages d'opinion, n'hésitera pas à la sacrifier. La question est maintenant de savoir si un successeur - Gille Duceppe? - réussira à redresser ce parti dont le déclin semble dépasser la question réductrice du leadership...

Richard Vigneault

Consultant en communication et membre de l'Idée fédérale

LA PORTE TOURNANTE

Cela fait partie de la culture du PQ de mener la vie dure à ses chefs. Lévesque, Johnson (Pierre Marc), Landry, Bouchard, Boisclair... et maintenant Marois.  Il y a fort à parier que si François Legault avait été chef du PQ, il figurerait également sur cette liste.  En démissionnant au lendemain du référendum de 1995, Jacques Parizeau n'a guère laissé le temps à ses troupes de lui montrer la porte. Le PQ servant en priorité la cause de l'indépendance, la popularité de ses chefs se mesure d'abord et avant tout à la ferveur qu'ils démontrent envers cette cause et à leur capacité de rallier en posant des gestes de souveraineté. Le moindre compromis est considéré comme un recul. Pour le noyau dur des militants, incluant de nombreux députés, la cause est toujours bonne même si une majorité de la population souhaite passer à autre chose. Le chef lui, n'est jamais à la hauteur. Il y a toujours un volontaire en réserve de la république, en l'occurrence Gilles Duceppe. C'est un politicien redoutable qui a occupé le meilleur job au Canada jusqu'au 2 mai dernier, moment où le charme a cessé d'opérer. Voudra-t-il malgré tout passer la porte du PQ, sachant que celle-ci est une porte tournante?

Pierre Simard

Professeur à l'ÉNAP

L'HISTOIRE SE RÉPÈTE

Et si on reculait d'un quart de siècle? Selon l'encyclopédie canadienne, «en novembre 1984, une grave crise ébranle le gouvernement péquiste quand René Lévesque annonce son intention de ne pas faire de l'indépendance du Québec l'enjeu des prochaines élections tout en maintenant la souveraineté-association comme raison d'être du parti. Plusieurs ministres démissionnent en signe de protestation, mais le parti reconduit néanmoins le leadership de son chef lors d'un congrès spécial tenu en janvier 1985». Sur le portail de la politique québécoise, on peut lire que « dans les années qui suivent, il n'arrive pas à retrouver ni ses appuis, ni son dynamisme. Lorsque René Lévesque démissionne, il laisse derrière lui un parti affaibli et désorienté, dont la cote de popularité est au plus bas». C'était il y a 26 ans... J'ai l'impression de revivre la même chose aujourd'hui. Comme quoi les histoires d'amour péquistes finissent toujours mal! Que Mme Marois démissionne ou non, il y a fort à parier que ça ne suffira pas à régler les continuelles guerres intestines qui ravagent ce parti politique.







Pierre Simard