Nous avons reçu de nombreux commentaires de parents et d’éducateurs à la suite de la publication des éditoriaux de Philippe Mercure et Laura-Julie Perreault* sur le manque de places en garderie. En voici un aperçu…

Un outil obsolète

En juin 2019, nous avons eu le grand bonheur d’apprendre que ma conjointe Juliana était enceinte et que nous attendions un petit garçon pour décembre. Nous nous sommes empressés d’inscrire ce bébé à venir sur le site de la Place 0-5.

Ma conjointe a travaillé d’arrache-pied pour bâtir son entreprise et se construire une réputation. Pour ma part, je travaille comme directeur logistique dans une entreprise de génie civil.

À partir d’août 2020, nous avons contacté plus de 60 endroits pour une réponse quasi identique partout : pas de place jusqu’en 2022. Les gens du milieu me disent que la « Place 0-5 » est un outil obsolète, que les milieux familiaux ne prennent que sur référence d’autres parents. Les CPE et garderies favorisent très souvent les enfants et connaissances du personnel, ce qui crée un entre-soi qui défavorise grandement les familles qui ne sont pas « connectées » à ces réseaux-là.

Au final, nous sommes rendus en février 2021, nous n’avons toujours pas de garderie. Juliana a mis sur pause son activité pour garder notre fils. Cette situation lui crée une grande anxiété et elle se fait suivre par un psychologue pour prévenir une dépression.

– Vincent Coustès

Une année exigeante

Il manque beaucoup de ressources pour les enfants qui ont des besoins particuliers. Je suis moi-même éducatrice en CPE. J’ai une formation en éducation spécialisée et en éducation à l’enfance. Il y a quelques années, pour mon seul groupe de 10 enfants de 4-5 ans, j’ai accueilli deux enfants TSA (trouble du spectre de l’autisme) et un enfant avec un trouble d’opposition ! J’ai eu droit à 9 heures par semaine d’aide.

J’ai passé à travers mon année parce j’ai pu utiliser mes compétences d’éducatrice spécialisée, parce que je cumulais plus de 25 ans d’expérience, parce que mon équipe m’a soutenue et parce que je suis une passionnée de ma profession et que j’ai toujours en tête le bien-être des enfants.

– Marie-Josée Bellefleur

Indigne

Ça dépasse l’entendement ! Que le premier critère de sélection d’un enfant en attente d’une place pour certains CPE est d’être référé par le C.A., quand les CPE sont subventionnés à raison de 15 000 $ par enfant par an par notre gouvernement (par nous, contribuables), est indigne, tout à fait inacceptable. On penserait que les critères de sélection seraient les mêmes dans tous les CPE et qu’une reddition de comptes serait nécessaire !

– Lise Desjardins

Maigre salaire

Le nerf de la guerre, c’est l’argent. Il faudrait juste bonifier notre salaire ! Qui travaille 60 heures par semaine pour un salaire de 13 $ de l’heure maintenant ? Il faut savoir tout faire : le ménage, les papiers, la cuisine, l’infirmier, des centaines d’heures de formation, des heures de travail non rémunérées. Je connais beaucoup de filles qui attendent la fin de la pandémie pour pouvoir se replacer.

– Rodolphe Chene

Concurrence déloyale

Hier matin, en passant en voiture dans le quartier Auteuil à Laval, j’ai remarqué une affiche annonçant l’ouverture du CPE Aux quatre vents prévue pour l’été 2021. Nombre de parents vont sauter de joie ! Le problème est que ce CPE se trouve à moins de 1 kilomètre de ma garderie privée non subventionnée. Vous voyez où je veux en venir ? Mon cœur s’est arrêté net.

À l’âge de 27 ans, j’ai ouvert ma garderie de 44 enfants. Depuis maintenant 12 ans, j’offre un service impeccable et sans reproche à des enfants du quartier. Il y a eu des hauts et il y a eu des bas, mais j’ai toujours tenu le coup parce que gérer une garderie non subventionnée est une vocation, une passion et non un moyen de s’enrichir.

Et maintenant, je vois une concurrence déloyale de la part du ministère de la Famille qui vient implanter un CPE de 78 places à moins de 1 km de ma garderie. On nous a remerciés de notre dévouement, au cours des derniers mois, d’avoir continué d’offrir un milieu de garde sécuritaire à nos enfants… Cependant, on vient encore nous mettre les bâtons dans les roues. J’en aurais long à dire, mais je suis épuisée. Épuisée de devoir me battre pour pouvoir tenir à bout de bras ma garderie qui emploie 12 éducatrices, une employée d’entretien, une cuisinière, un homme de maintenance, une employée de bureau, une directrice (moi) et qui accueille 44 merveilleux enfants tout au long de l’année.

Malgré la mauvaise presse des garderies privées, les parents adorent mon service de garde, même si je dois avouer que les places subventionnées disponibles sont une denrée rare et que souvent les parents n’ont d’autre choix que de se tourner vers nous. Par contre, il est arrivé au fil des années que des parents nous ayant quittés pour une place en CPE nous reviennent après quelques semaines.

Il est inconcevable que tous les parents du Québec ne soient pas égaux lorsque vient le temps de choisir un milieu de garde pour leur enfant. Avec le retour du tarif unique, les caquistes ont réinstauré un système où les parents magasinent un prix et non le milieu de vie qui convient le mieux à leur tout-petit.

« Ultimement, il faut tendre vers un réseau qui sera un jour 100 % subventionné », a mentionné le ministre. M. Lacombe, je vous adore ! Mais vous et moi serons probablement à la retraite le jour où cela se réalisera. Dans l’attente de la mise en place de ce beau projet, j’ai une suggestion tellement simple pour vous : augmentez le crédit d’impôt pour frais de garde d’enfant. Les deux plus grands avantages de cette solution seraient premièrement un coût moindre que la construction de nouveaux CPE (des centaines de garderies en installations sont déjà en activité) et surtout, surtout, la rapidité avec laquelle on pourrait mettre en place cette mesure. Et cela évitera l’hécatombe attendue lorsqu’un autre CPE viendra s’établir près d’une garderie privée non subventionnée que les parents adorent, mais qui doit jongler avec un budget serré.

– Joëlle St-Laurent, directrice de la Garderie de la gare

Honteux

Quand allons-nous corriger ces injustices et accorder aux familles à faible revenu la possibilité d’inscrire leurs petits dans des CPE afin de leur permettre un développement harmonieux ? J’ai honte.

– Diane Croft

*Lisez « Vite, des CPE plus justes et plus mixtes ! »

*Lisez « Le curieux aveu d’échec du ministre »