Voici un aperçu des courriels reçus à la suite de la publication de la lettre1 signée par les directrices et directeurs des départements universitaires de médecine de famille du Québec.

Prendre soin de nos professionnels

Très belle lettre qui contextualise très bien la pratique de la médecine de famille au-delà de simples statistiques. Le mépris des dernières semaines de notre premier ministre à l’égard des médecins de famille nous ramène malheureusement le goût amer du bashing de l’ère Barrette. Notre gouvernement a tout intérêt à analyser les choses au-delà des chiffres, ce qu’il n’a pas fait avec les infirmières et voyez où nous en sommes aujourd’hui. Prenons soin de nos professionnels de la santé plutôt que de les mépriser, cela est beaucoup plus constructif.

Maryse Samson, cadre supérieure du réseau de la santé nouvellement retraitée

Un problème systémique

C’est évident qu’il y a un grand nombre de médecins fort dévoués et qui ont la vocation, mais le fait est qu’il est très difficile de rencontrer un médecin. Sans doute y a-t-il un problème systémique d’organisation. La pénurie de médecins de famille qui a été provoquée, écrivez-vous, ne pourrait-elle pas se résorber en créant plus de postes de médecins qui auraient la possibilité de travailler à mi-temps ? Compte tenu de leur niveau de rémunération, cela leur assurerait tout de même un bon niveau de vie.

Jeanne Baillargeon

Il faut une réforme de la prise en charge

Je suis désolée de répondre à votre lettre de cette façon, mais je crois sincèrement qu’il doit y avoir une réforme de la prise en charge des personnes. La pratique de la médecine familiale a tellement changé ces 20 dernières années. Les spécialités médicales se sont raffinées et des protocoles ont été établis pour vous guider. Une infirmière clinicienne pourrait facilement ausculter, évaluer, diagnostiquer et même prescrire certains médicaments ou renouveler les ordonnances. Je crois sincèrement que la médecine familiale au bureau devrait changer, que les médecins devraient tous avoir une spécialité ou se concentrer sur les cas hospitalisés ou problématiques. Les suivis, les évaluations, les diagnostics devraient être faits et dirigés par des infirmières. Je ne comprends pas pourquoi la prise en charge est réservée uniquement aux médecins de famille. Les moyens que nous avons aujourd’hui pour appuyer un diagnostic sont innombrables, les connaissances beaucoup plus grandes acquises par les infirmières devraient leur donner plus d’autonomie et de pouvoir sur la prise en charge. Je comprends donc très bien la baisse d’intérêt pour la médecine familiale, qui ne fera que s’exacerber.

Marie-Claude Lebel

Des médecins travaillants

Bien d’accord avec cette lettre. La plupart des médecins de famille font plus d’heures que la majorité des gens. Enceintes, elles travaillent quand même et arrêtent de travailler à la 37e semaine. Elles ne prennent pas toujours de congé parental d’un an, retournant souvent au travail après quelques mois. De plus, ça n’encourage pas les étudiants en médecine d’aller dans cette spécialité, qui devrait être considérée comme les autres spécialités.

Marlène Lessard, mère d’un médecin de famille

Des propos qui m’ont horripilé

Merci pour cette lettre. Je suis médecin de famille en région, avec 800 patients à ma charge. Je couvre également une semaine sur cinq à l’hospitalisation, de garde 24 heures sur 24 pendant sept jours. Je suis également impliqué dans divers comités au sein de mon CIUSSS. Les propos du premier ministre m’ont horripilé. J’ai même regardé d’un œil intéressé les offres d’emploi dans une autre province. Si moi-même j’ai songé à quitter le bateau, je peux comprendre que malheureusement, de nombreux externes en médecine vont opter pour une autre spécialité. Tous mes collègues sont fatigués de la dernière année et demie. Ça va prendre plus que la compassion de M. Legault pour recoller les pots cassés.

Kevin Girard, médecin de famille

Pas des robots

Considérer les omnipraticiens comme des robots capables de produire à la chaîne un nombre déterminé de patients n’est certes pas une marque de reconnaissance des plus honorables. On peut extrapoler davantage, mais l’enjeu principal est d’avoir accès à un médecin en tout temps dans une clinique et non aux urgences à l’aide d’un meilleur dossier patient électronique. Si le médecin se voit allégé de ce fardeau imposé, il souhaitera demeurer au public au lieu de se sauver ailleurs ou au privé. Je suis convaincue que libérés de cette obligation, l’ensemble des omnipraticiens verront plus de patients que présentement et que les patients auront l’assurance d’obtenir un rendez-vous plus rapidement. Si on a été en mesure de créer des Groupes de médecine familiale (GMF) dont plusieurs ont une clinique sans rendez-vous, on est capable de les faire évoluer à cette étape en les adaptant aux nouvelles réalités professionnelles et familiales.

Lise St-Laurent

Organisation déficiente

Je pense que les médecins de famille effectuent un travail exceptionnel pour 98 % d’entre eux. Il y a toujours des exceptions ! Cependant, l’organisation du travail autour des médecins de famille me semble déficiente. Pourquoi, quand on applique pour obtenir une assurance-vie, l’entreprise nous envoie-t-elle une infirmière pour faire un examen approfondi ? Une infirmière m’a déjà fait passer un électrocardiogramme à la maison ! Si c’est acceptable dans ce cas, ce devrait peut-être l’être en général. Je serais parfaitement à l’aise d’avoir une infirmière de famille !

Jean-Guy Dalpé

Une question de décence

Il n’est pas normal d’avoir plus de médecins de famille par habitant qu’à bien des endroits dans le monde et d’avoir autant de gens sans médecin de famille. Cela est injustifiable. La santé représente près de 50 % des dépenses du budget du Québec. Les médecins ont profité largement d’augmentations de salaire depuis quelques années, très largement même… Il est grandement temps qu’ils cessent de faire les vierges offensées et fassent leur part. Il me semble que c’est une simple question de décence élémentaire.

Pierre Beaudoin

1. Lisez « N’éteignez pas la passion pour notre spécialité ! »