Mandarins 1, élus 0

Il y a quelque chose de l’ordre de la guéguerre entre les hauts fonctionnaires et les élus dans cette histoire. La commissaire à l’éthique a été blessée par les propos du ministre de l’Économie. Elle ne lâchera pas l’affaire tant qu’elle n’aura pas eu le tête de Fitzgibbon. Pas juste une moitié de tête, l’entièreté ! Je comprends que les députés et ministres soient soumis à un code de déontologie. Mais nous sommes là dans une situation inédite : un ministre qui est un vrai entrepreneur et qui possède des parts dans une entreprise privée. Ce n’est jamais arrivé, semble-t-il, que le gouvernement se retrouve dans une situation pareille. Le ministre en question fait-il preuve de mauvaise foi ? Il semble que non. Il a vendu ce qu’il possédait dans la très grande majorité des cas. Il reste deux cas difficiles, il ne peut vendre ses actions dans les deux entreprises restantes. Lesquelles n’ont aucun lien avec le gouvernement, sauf des prêts accordés il y a plusieurs années. Pourquoi ne peut-on arranger une forme d’accord pour laisser la possibilité à un élu de posséder une participation à une PME sans briser l’esprit du code de déontologie ? Tout simplement parce qu’une des parties ne le veut pas. Qui reprocherait à Mme Mignolet de faire preuve d’un peu d’esprit d’ouverture dans ce dossier ? On lui reprochera peut-être bientôt la perte d’un des meilleurs ministres de l’Économie, dont même les ministres fédéraux saluent aujourd’hui l’efficacité et l’ouverture d’esprit.

Mariette Parent

Plus catholique que le pape

Je suis très familier avec le concept, ayant siégé à des conseils d’administration. Dans un conseil, les administrateurs doivent déclarer annuellement leurs intérêts dans les sociétés qui font affaire avec l’entreprise dont ils font partie du conseil. S’il y a apparence de conflit d’intérêts, l’administrateur se retire pour les discussions et les décisions sur le sujet, et l’administrateur ne reçoit pas la documentation pertinente. Vous comprendrez qu’en affaires, il serait assez difficile de recruter des administrateurs qui n’ont aucun intérêt commercial ! Le cas qui nous concerne est d’autant plus regrettable que, pour avoir travaillé brièvement près des gouvernements, nous savons que ce ne sont pas les ministres qui transigent au quotidien avec les demandes de subventions ou les décisions d’investissement. Ce sont les sous-ministres, les sous-ministres associés et les directeurs généraux. Les dossiers arrivent ficelés aux ministres pour décision. L’important, c’est qu’il y ait transparence. On aurait pu fort bien décider que tout dossier d’entreprise appartenant à M. Fitzgibbon serait traité par un autre ministère. À force de se vouloir trop catholique, on finit dans une secte !

Pierre Cyr

Pourquoi ce frein ?

Je suis entièrement d’accord avec votre position. Pourquoi, avec plus de souplesse, n’y a-t-il pas plus de corruption dans les autres provinces ? Pourquoi les Québécois ont-ils encore ce frein face à des gens ayant réussi dans les affaires ou financièrement ? Un bon partage de gens d’affaires et de personnes à vocation sociale est aussi souhaitable qu’une présence égale d’hommes et de femmes dans les divers postes décisionnels.

Michel Latour

Suivre les règles

Les règles étaient connues d’avance. Peu importe la qualité de l’individu, du cas par cas ouvre la porte à toutes les justifications. Si les règles existent, il faut les appliquer. Sinon, où est la gouvernance ?

Bernard Deschamps

Une personne d’envergure

Je serais parfaitement d’accord à ce que le code d’éthique soit plus élastique afin de permettre à une personne d’envergure comme Pierre Fitzgibbon de pouvoir rester aux commandes de l’économie du Québec. Je suis de très près tous les articles en regard à l’économie qui sont publiés dans La Presse et je suis impressionné par le nombre de projets que Pierre Fitzgibbon a fait progresser pendant qu’il était en poste. Ce n’est pas le gars qui s’enfarge dans les fleurs du tapis. Je ne me souviens pas d’un autre ministre de l’Économie qui ait fait avancer autant de projets pendant son séjour en politique au Québec.

Jean-Luc Blais

Le code d’éthique doit primer

Un code d’éthique est nécessaire et doit être respecté de tous. Il ne doit surtout pas être modifié pour qu’on puisse contourner ses règles ou pour permettre à quiconque de le faire une fois pris en défaut. Tout cela n’a rien à voir avec les compétences et l’importance de l’individu estimé être en défaut à ce code. M. Fitzgibbon est en faute depuis le début de son rôle de ministre et il le sait très bien. Il doit obligatoirement se retirer de son poste ou se conformer car ce sont les deux seules options présentes. Avant lui, d’autres ont occupé ce ministère et d’autres l’occuperont dans le futur. Tout le monde est remplaçable et les lois s’appliquent aussi à tout le monde.

Jacques Charest

Attirer les meilleurs

Je crois que le service public est déjà très exigeant pour un ministre : rémunération peu élevée, heures de travail incroyables. Si, en plus, il faut s’appauvrir pour le faire, je comprends qu’on n’ait pas plus de gens du milieu des affaires, de la technologie qui se présentent. Mettons-nous à jour et là comme ailleurs, allons chercher les meilleurs.

Pierre Brazé, Eastman

L’homme d’affaires ou l’opportuniste ?

Que choisissez vous ? Un homme d’affaires indépendant de fortune qui fait de la politique par conviction ou un opportuniste sans le sou qui voit la politique comme moyen de s’enrichir ? Le premier est somme toute plus difficile à corrompre, contrairement au deuxième. C’est beau, la vertu, mais nous venons de perdre un économiste chevronné dont le Québec avait grand besoin pour se relever de la pandémie.

Pierre Pelletier

Une qualité

À force d’élire des personnes qui n’ont rien, on s’expose à avoir des lois qui leur ressemblent. Être capable d’accumuler de la richesse n’est pas un défaut, mais une qualité.

Robert Nadon

De belles réalisations

Tout à fait d’accord avec votre conclusion. Si on relit avec attention l’article de votre confrère Joël-Denis Bellavance, les réalisations de M. Fitzgibbon depuis deux ans et demi sont impressionnantes et son intervention dans les dossiers problèmes ont fait réaliser au Québec des développements économiques que peu de députés, toutes formations politiques confondues, auraient pu faire. La vengeance politique et la jalousie des députés qui ont peu de réalisations à leur dossier mais qui critiquent tout ce qui bouge expliquent en grande partie la rigidité des prises de position.

Pierre Lamothe

Plus blanc que blanc

Comme d’habitude le Québec veut toujours laver plus blanc que blanc, on se prive encore une fois d’expériences et de connaissances essentielles.

Stéphane Monarque, Lac-Brome

Basse politicaillerie

Les partis de l’opposition se sont réjouis à l’unisson de l’abdication de Pierre Fitzgibbon de son ministère de l’Économie, et ce, en dépit de l’avis déçu des chambres de commerce et de ses homologues fédéraux qui le considéraient comme le ministre le mieux réseauté, le plus efficace et compétent depuis belle lurette. Il est quand même ironique que les libéraux, hier directement dans la ligne de mire de la commission Charbonneau pour de multiples et soutenues malversations, mènent aujourd’hui la charge moralisatrice pour soulever les apparences de manque à l’éthique de Pierre Fitzgibbon. N’est-il pas quand même curieux, voire indécent, qu’on puisse se féliciter de perdre un atout majeur dans la relance économique post-pandémie ? Le code d’éthique du Parlement doit être révisé impérativement pour que la basse politicaillerie cesse de nuire aux intérêts entrepreneuriaux et économiques du Québec.

Alain Dupuis

Un grand ministre

Il est dommage que M. Fitzgibbon doive se retirer de son poste de ministre. Il a prouvé qu’un ministère peut être en contrôle de l’économie de sa province. Il a l’étoffe d’un homme d’affaires qui règle des dossiers assez rapidement. Il est en contrôle de tous les dossiers économiques qu’il touche. Cependant, les règles actuelles ne lui permettent pas de garder des placements dans des entreprises. Si ces deux entreprises avaient été cotées en Bourse, il aurait pu vendre ses placements plus rapidement, mais si le cours des actions était à la baisse, il aurait quand même assumé une perte. Personne n’aime perdre de l’argent sur ses placements, encore moins s’il s’agit de 1 million. Mais la loi, c’est la loi. Alors il n’a pas eu le choix. Le Québec perd un grand ministre qui a fait beaucoup pour le Québec. Si nous avions de ce genre de ministre à la Santé, je pense que le Québec serait gagnant.

Serge Leduc, Pincourt

Soyons réalistes

Bien d’accord avec vous. Arrêtons de pratiquer l’angélisme et soyons réalistes. Je crois que les gens qui vont en politique sont foncièrement honnêtes, mis à part le discours partisan qui souvent frôle la malhonnêteté intellectuelle. La démocratie n’a pas toutes les vertus…

Raynald Marin

D’autres entrepreneurs prendront la relève

Le Québec a existé bien avant l’arrivée de M. Fitzgibbon au gouvernement. Et je suis certain que même avec son départ nous allons survivre ! Des entrepreneurs avec des idées et de l’énergie vont continuer à faire grandir le Québec économiquement. M. Legault et son ami M. Fitzgibbon veulent gérer notre nation comme une entreprise. Comme ils aiment le dire, ce qui compte, ce sont les gros salaires… Heureusement que nous avons les petits salariés et pendant cette pandémie, nous avons pu prendre conscience de leur importance.

Remi Côté

La gauche a gagné

Il est vraiment déplorable de perdre une personne qui avait les réflexes et la rapidité de décision de la plupart des gens qui sont en affaires. Pour moi, c’est une perte pour le Québec et l’on devrait vraiment réfléchir à la façon de modifier ce fameux code pour le rendre un peu plus permissif sans tomber dans le n’importe quoi. Encore une fois au Québec, la gauche a gagné, pilotée par le parti Québec solidaire et son député Vincent Marissal. De plus, ce matin, M. Bellavance dans son article explique comment M. Fitzgibbon avait établi des contacts directs avec le fédéral. Encore une chose négative, je suppose, selon M. Marissal !

Richard Berthiaume

Ramenons le gros bon sens

Trop de fracas et dommages collatéraux ont été faits à propos de cette histoire navrante. Quand le gros bon sens s’absente, trouvons rapidement une solution. À voir s’agiter les partis de l’opposition avec des répliques inadéquates, l’éthique, la vraie, n’est-elle pas enfreinte ? Pourquoi ne peut-on prévoir une exception à la loi et élaborer un règlement rapidement ? Pourquoi ne pas inscrire que toute transaction impliquant un organisme gouvernemental dans de telles sociétés fasse l’objet d’une approbation par des tiers totalement étrangers au pouvoir, tel qu’un comité de trois personnes de l’opposition, du bureau de la commissaire à l’éthique ou de la vérificatrice générale ? Quand il y a consensus sur l’intégrité, revenons-en à l’essentiel… Et trouvons une solution plutôt que de répéter ad nauseam « la loi, c’est la loi ». L’être humain n’est-il pas une bête intelligente ?

France Castonguay

L’exemple d’Henry Paulson

Je suis entièrement d’accord avec la proposition de procéder à une bonne mise à jour des règles actuelles du code d’éthique. Ces règles ont été adoptées sous le gouvernement Charest qui faisait face à divers scandales, ce qui a probablement influencé les règles adoptées. Cette mise à jour doit couvrir l’ensemble des règles, mais aussi celles reliées aux conflits d’intérêts du type de ceux affectant le ministre.

Comme vous le mentionnez, ailleurs au Canada, les règles sont plus souples, permettant à des gens comme Paul Martin (propriétaire à l’époque de Canada Steamship Lines) de se lancer en politique et de devenir premier ministre du Canada. Le but de ces modifications est de permettre le recrutement en politique de gens provenant du milieu des affaires qui sont plus susceptibles de détenir des placements de tous genres que la vente forcée pourrait empêcher de se présenter comme candidats.

Généralement, ces gens amènent une expertise pointue, rare et indispensable pour un bon gouvernement. La situation actuelle entourant M. Fitzgibbon le démontre assez clairement. Certains peuvent se conformer plus facilement aux règles, mais certaines situations sont plus difficiles à résoudre.

Techniquement, le ministre a un problème qui ne pouvait être résolu qu’avec le dénouement qu’on a vu. Par contre, son intégrité n’a jamais été mise en doute. Sa grande compétence ressort encore plus dans tous les commentaires exprimés dans les médias récemment. On a besoin de gens comme lui dans des positions de haute responsabilité au gouvernement.

Voici un exemple de situation qui a été prévue, aux États-Unis, pour éviter autant que possible ce genre de problème. L’objectif est de ne pas dissuader des candidats compétents qui détiennent beaucoup d’actions d’entreprises de se joindre au gouvernement. Une exemption fiscale a été adoptée en 1989 qui ne s’applique qu’au président des États-Unis, au vice-président et aux membres du Cabinet (genre de Conseil des ministres). Ces membres du Cabinet ne sont pas des élus, mais sont nommés par le président. Je ne peux corroborer les faits, mais ma description provient d’articles spécialisés sur ce sujet dans les médias américains.

Henry Paulson a été recruté en 2006 par le président Bush pour devenir le secrétaire au Trésor. Paulson était alors président-directeur général de la prestigieuse banque d’affaires Goldman Sachs. En 2005, M. Paulson avait reçu une rémunération de 37 millions de dollars américains. Sa valeur nette était alors estimée à environ 700 millions US. Il détenait un nombre important d’actions de Goldman Sachs évaluées à environ 600 millions US. Les règles requéraient qu’il se départisse de ses actions pour éviter tout conflit d’intérêts. Le poste de secrétaire au Trésor venait avec un salaire de 183 500 $ US !

En 1989, les États-Unis ont modifié la loi de l’impôt pour permettre, dans ce genre de situation, à l’individu de disposer de ses actions et de ne pas payer, à ce moment, les impôts sur le revenu autrement dus sur cette vente. L’individu doit placer le produit de la vente dans des placements « autorisés » et alors il diffère effectivement l’impôt sur ses placements jusqu’à la vente des dits placements. L’impôt était alors estimé par les journalistes à environ 200 millions. Sans cet « accommodement », Paulson n’aurait probablement pas accepté. Colin Powell est l’un de ceux qui ont pu bénéficier de cette clause, ainsi que d’autres. La politique peut exiger des sacrifices, mais il y a une certaine limite.

Michel Lamarre, Boucherville

Une solution éthique

Oui, il faut que le code d’éthique soit suivi. Mais oui aussi, il faut que le code d’éthique soit revu en fonction des réalités d’aujourd’hui. Il n’est pas normal qu’un homme d’affaires soit pénalisé de la sorte lorsqu’il va en politique. Il doit y avoir moyen d’arranger cela de façon éthique.

Pierre Beaudry

*Lisez « Fitzgibbon et le test de la réalité »