Le texte de Daniel Breton publié hier, « Chaque droit amène son lot de dérives », n’a pas manqué de faire réagir. Un aperçu des commentaires reçus.

Prendre ses responsabilités

Si les hommes prenaient leurs responsabilités face à la contraception, qui n’est pas que la responsabilité de la femme, on serait ailleurs dans ce débat sur l’avortement !

— Manon Boisvert

Mettez-vous à jour

En lisant ce texte d’un autre siècle, faut-il l’avouer, je suis heureuse de savoir cet enseignant à la retraite. Je ne peux qu’imaginer le genre de valeurs qu’il a véhiculées pendant sa carrière alors qu’il n’avait pas encore « mûri ».

Lire les propos d’un homme à qui on confiait de jeunes élèves afin qu’il les accompagne dans le développement de leur pensée, affirmer en 2019 que la contraception est la seule responsabilité des femmes est aberrant. Il est inimaginable de croire qu’il ait pu ouvrir la conscience de qui que ce soit avec des propos aussi obtus. C’est justement ce genre d’irresponsabilité de la pensée qui a conduit un grand nombre d’hommes à s’approprier la gestion du corps des femmes depuis des siècles.

J’espère, Monsieur, ex-enseignant retraité, que vous utiliserez le temps dont vous disposez maintenant pour mettre à jour vos « connaissances » et élargir votre conscience. Puissiez-vous croiser la route d’un enseignant digne de ce nom. 

— Jacinthe Julien

Et les garçons ?

Je suis toujours sidérée lorsqu’un homme fait porter la responsabilité entière de la contraception sur le dos des femmes. Je vous cite : « Certaines femmes négligent de les utiliser. »

Selon vous, les jeunes hommes qui mettent de la pression sur les jeunes femmes pour ne pas utiliser de condom ne sont pas responsables de leurs actions ? Si on fait porter l’odieux de la contraception sur les femmes, alors on se doit de leur laisser le libre choix de faire ce qu’elles veulent de leur corps. Il faut être conséquent ! Plus d’éducation, certainement ! Commençons donc par éduquer nos garçons à se responsabiliser eux aussi !

— Annie Doucet

L’avortement, moyen de contraception ?

Malheureusement, aucun moyen de contraception n’est efficace à 100 %, mis à part l’abstinence. Pas même le condom, qui est le moyen de contraception que l’homme, lui, peut utiliser. Pour avoir accompagné plusieurs femmes dans leur choix de mettre un terme ou non à leur grossesse, je peux vous assurer qu’il s’agit là d’une décision excessivement difficile et qu’il est très rare que l’avortement devienne un moyen de contraception facile, comme votre lettre d’opinion le laisse entendre.

— Suzanne Villeneuve, médecin

Quelle dérive !

Oui, les dérives de l’avortement. Qu’a-t-on à tant valoriser l’avortement ? C’est le fait de l’extrémisme des militantes pro-choix, comme si l’avortement était une valeur en soi. Eh oui, c’est devenu un moyen de contraception, et gratuit à part ça ! Quelle dérive ! L’avortement ne devrait être utilisé qu’en dernier recours, dans des situations exceptionnelles. Mais je ne ferais pas de rapprochement avec l’aide médicale à mourir, cependant, qui nous conduit vers une autre dérive. Mais elle est pleinement assumée par des adultes consentants, espérons-le, à tout le moins, et prions pour que cela ne soit pas étendu à qui mieux mieux.

— Michelle Collard

Pourquoi blâmer la femme ?

Pourquoi toujours blâmer la femme face aux problèmes de contraception et d’avortement, alors que l’homme en est le premier responsable, en tant que « géniteur » ? Il sème, et il se décharge de toute responsabilité ? Tout comme le fabricant d’armes ? Tout comme les gouvernants qui se croisent les bras ? Tout comme les médecins qui ligaturent au lieu de vasectomiser ? Qui ignorent que le condom est beaucoup moins dommageable que tous ces produits antiavortement que vous lancez en travers du chemin des femmes ? La réflexion est très mal entreprise, sur le sujet, depuis un certain temps. 

— Luc Saint-Amant, ex-enseignant

Se mêler de ses affaires

Je vais vous dire, moi, ce qui m’exaspère dans tous ces débats : nous avons une facilité à nous élever contre tout, l’avortement, l’aide médicale à mourir, les seringues gratuites pour les dépendants (on évite alors bien des maux), et j’en passe.

Si vous tous aviez à faire face à l’une ou l’autre de ces situations, que feriez-vous ? Moi, personnellement, j’aimerais bien que mon voisin ou ma voisine, peu importe, se mêle de ses affaires. Mais nous vivons dans une société où tous se donnent le droit de critiquer ce qui se passe de l’autre côté de leur clôture.

Dans la vie, certaines personnes ont des choix difficiles à assumer. Laissons-les donc libres de ces choix, mêlons-nous de nos affaires, ce sera déjà un pas dans la bonne direction.

— France J. Tanguay, Saint-Jean-sur-Richelieu

Les deux côtés de la médaille

Pourquoi ne parlez-vous pas de la responsabilité des hommes dans plusieurs de ces avortements et face à ces enfants en devenir ?

Peut-on aussi se poser la question de l’éducation sexuelle de nos jeunes hommes et l’éducation qu’on leur donne, avec l’implication psychosociale qui lui est rattachée ?

Les hommes aussi pourraient s’interroger sur la nécessité d’utiliser un moyen de contraception, du moins le condom !

Il est encore très clair qu’une conception nécessite un ovule et un spermatozoïde. Alors pourquoi les avortements ne seraient-ils que le lot de l’incompétence des femmes face à leur contraception ?

Comme société, nous avons tous un rôle à jouer. Si l’on déplore ces taux élevés d’interruptions volontaires de grossesse (IVG), posons-nous les bonnes questions avant de lancer la pierre aux femmes : le coût de la contraception et ses effets secondaires, l’accessibilité des soins (comme la pose du stérilet, par exemple), l’éducation de nos jeunes, le renforcement et la volonté de véhiculer nos idéaux de société par des publicités, des enseignements de toutes formes et par différentes méthodes, médias sociaux ou autres.

Mettons-nous assez d’efforts pour aider nos jeunes et moins jeunes et changer les comportements et les mentalités ?

Le droit à l’avortement demeure nécessaire et crucial pour les femmes. Il y a des femmes en difficulté, des situations et des facteurs divers, est-ce à nous de juger ? Et du point de vue scientifique, le fœtus ne peut ressentir de douleur. De plus, la présence d’un niveau de conscience demande le développement et la connexion de certaines zones cérébrales ne se produisant pas avant 29 semaines de grossesse. Ce qui peut pour certains, sur le plan éthique, tempérer les jugements.

Je crois que nous devrions être beaucoup plus préoccupés par l’enfant qui naît dans un environnement inadéquat ! Combien de ces tout-petits et de ces jeunes vivent dans des conditions inacceptables ?

Il y a toujours deux côtés à une médaille !

Il est vrai, par contre, que l’aide médicale à mourir devrait être beaucoup plus accessible. Les maisons de soins palliatifs ne devraient-elles pas toutes offrir cette dignité à mourir, cette réduction des souffrances autant physiques que psychologiques ?

L’accès aux soins palliatifs est encore malheureusement trop limité, trop difficile. Pour l’avoir vécu, on a appelé ma mère pour lui offrir une place à l’unité de soins palliatifs de l’hôpital où elle était suivie depuis de nombreuses années en oncologie… après sa mort ! Trop tard !

Les médecins font un excellent travail en soins palliatifs. Ils sont malheureusement trop peu pour notre société vieillissante.

Et pourquoi encore mettre de l’avant la rémunération des médecins ? En soins palliatifs, il n’y a pas vraiment d’avantages monétaires à cette pratique. Ces médecins sont souvent extraordinaires dans leur approche et les soins prodigués. Et pour les IVG, il y a l’offre et la demande.

C’est à la société de tenter de modifier la conscience et les comportements humains tout en demeurant dans le libre choix. Investir des sous et du temps pour le devenir et le bien-être d’une collectivité que l’on désire informée, ayant droit à des soins adéquats et empreints d’humanité, et pouvant bénéficier d’une vie digne de notre ère, doit être la priorité.

Développons aussi ce que l’humain peut avoir de compassion, d’altruisme et de générosité en plus de son savoir pour améliorer cette société devenue individualiste, parfois même déconnectée ou, ma foi, trop connectée !

— Suzanne Guillet