Le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion (MIDI) souligne ces jours-ci le premier anniversaire de l'opération d'accueil spéciale des personnes réfugiées en provenance de la Syrie. Dans une « ambiance festive », le gouvernement en profite pour se féliciter de l'atteinte de sa cible de 7300 personnes réfugiées syriennes d'ici la fin de l'année. Au-delà de l'image et des chiffres, qu'en est-il réellement de la performance du Québec en matière d'accueil et d'intégration ?

Il y a à peine quelques mois, dans le contexte de l'arrivée de milliers de personnes en provenance de la Syrie, les lacunes dans le système d'accueil apparaissaient au grand jour. Stéphan Reichhold, de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI) a fait, au printemps dernier, ce constat accablant : « C'est un fouillis pas possible, il n'y a rien qui est documenté [...] Personne au Ministère n'a le mandat de les suivre au moment où ils arrivent. »

Un cafouillage qui est la conséquence directe du retrait du Ministère depuis 2012 du processus d'accueil des personnes immigrantes.

Aujourd'hui, l'annonce en grande pompe de l'accueil de quelque centaines de personnes parrainées par l'État ne doit pas faire oublier que l'immense majorité des personnes réfugiées syriennes sont plutôt prises en charge par leur famille ou par des groupes privés. N'ayant pas droit à l'aide sociale, ces personnes sont dans une situation de vulnérabilité particulière, et sont pour ainsi dire complètement hors de l'écran radar de l'État si leur parrain faillit à ses obligations.

Depuis plusieurs années, le SFPQ en appelle à la responsabilité de l'État vis-à-vis des nouveaux arrivants, et plus particulièrement envers les réfugiés. Ces personnes proviennent en majorité de pays ou de zones de guerre, plusieurs ont subi des traumatismes et ont connu la longue et pénible route de l'exil. La plupart ne connaissent ni la langue ni les pratiques culturelles de leur société d'accueil.

AUCUN SUIVI

Accueillir des nouvelles personnes sur notre territoire, de futurs citoyens, est un geste d'État. Au-delà du symbole, ce premier contact est aussi nécessaire pour donner aux nouvelles personnes arrivantes l'heure juste sur leurs droits, leurs obligations, et les services auxquels elles ont accès. Il est inconcevable que non seulement le MIDI ait, depuis 2012, complètement abandonné l'accueil des personnes immigrantes, mais qu'il ait à ce point abdiqué son rôle qu'il n'assure aucun suivi auprès de ces personnes, après qu'elles aient foulé le sol québécois.

On connaît leur nombre, point. Le Ministère ne dispose d'aucun portrait complet et à jour du cheminement des personnes récemment accueillies sur le territoire ; ces données sont pourtant indispensables pour moduler adéquatement l'offre de services publics et évaluer le succès des programmes.

Que dire des chances d'intégration et de francisation de ces personnes réfugiées qui fréquentent par milliers des banques alimentaires de Montréal, faute de ressources suffisantes pour se nourrir ?

Actuellement, le triste constat est que le MIDI se décharge entièrement de son mandat sur le dos des familles et des groupes parrains de même que sur les organismes communautaires débordés, qui ont hérité des responsabilités autrefois du ressort du Ministère, mais qui subissent aussi les politiques d'austérité du gouvernement. Cela ne nous apparaît pas constituer les bases d'une saine complémentarité des rôles, tant s'en faut. Le Ministère est le chaînon manquant du processus.

La ministre doit corriger cette anomalie et rétablir le rôle du Ministère comme partie prenante du processus d'accueil et d'intégration des nouveaux arrivants et pour accompagner les organismes partenaires. À défaut d'être impliqué, il lui est impossible, en amont, de déterminer les principales lacunes du système actuel, les besoins non comblés, et intervenir en cas de rupture de parrainage. Ce virage est urgent.