Madame, monsieur. Où que vous soyez au pays, c'est à vous que je m'adresse aujourd'hui.

Pour faire plaisir aux banques, le gouvernement fédéral, financé par votre argent durement gagné, s'apprête à réduire des droits et des protections dont vous bénéficiez.

Les députés voteront, peut-être aujourd'hui même, sur un projet de loi qui veut rayer de la carte les protections offertes aux Québécois face aux banques par la Loi sur la protection du consommateur (LPC). Des lois semblables vous protègent dans vos provinces respectives.

Des exemples ? La LPC interdit aux banques d'augmenter votre limite de crédit sans votre permission. La LPC vous protège aussi contre les frais cachés que les banques voudraient vous imposer. Un recours collectif a d'ailleurs été gagné contre les banques à ce sujet. La Cour suprême avait reconnu, à l'unanimité, que non seulement la LPC ne nuit pas à l'activité des banques mais appuie le régime fédéral qui les gouverne.

Ce que le projet de loi fédéral veut faire, c'est d'éliminer la protection dont vous entoure votre Loi sur la protection du consommateur ou la loi de votre province et les remplacer par un régime de protection du consommateur uniforme à travers tout le pays. Pourquoi ?

La réponse se trouve peut-être dans l'anecdote suivante.

Il y a quelques années à La facture, mon équipe et moi avions réalisé une entrevue avec le porte-parole de l'Association des banquiers canadiens. Celui-ci nous avait déclaré qu'il n'était pas question que les banques canadiennes reçoivent des ordres de Saint-Stanislas-de-Kostka, le nom de ce village de 1600 habitants étant utilisé pour désigner les provinces en général.

Voilà la façon, à la fois arrogante et méprisante dont les banques considèrent les lois des provinces de notre pays qui veulent vous protéger.

Les lois provinciales comme la LPC dérangent les banques. Eh bien moi, je souhaite que ces lois qui vous protègent continuent de déranger les banques.

Le fédéral veut ajouter ses protections à celles qui existent déjà dans la LPC et les autres lois provinciales ? Soit. Mais pourquoi rayer de la carte des lois, du Québec et d'ailleurs, qui fonctionnent très bien ? « If it ain't broke... don't fix it », disent nos amis anglais. Au départ je n'ai aucune confiance dans ce régime fédéral parce que j'ai la conviction que ce sont les banques elles-mêmes qui ont fait pression sur Ottawa pour l'obtenir. Si cette loi passe, ce sera comme donner la gérance de la bergerie au loup.

Si cette loi est adoptée, ce sera sans doute ensuite au tour des transporteurs aériens du pays de demander la même faveur à Ottawa : « Débarrassez-nous des nuisances de ces provinciaux... », diront-ils probablement à des membres influents du gouvernement lors d'un cocktail à 1500 $ la place. Et les lois provinciales qui vous protègent aussi dans ce secteur seront éliminées pour un régime fédéral taillé sur mesure pour l'industrie.

Je suis loin d'être un expert en droit bancaire, l'un des plus complexes qui soient. Mais j'ai très peur que cette loi, qui veut permettre aux banques  « d'exercer leurs opérations de façon cohérente et avec efficacité à l'échelle nationale », ne soit en fait qu'un laissez-passer pour leur faciliter la vie avec vous, leurs clients, qui les enrichissez à coup de milliards.