Les chroniqueurs d'ici ont fait peu de cas des résultats de la rencontre du G20 tenue à Washington, il y a trois semaines. C'est pourtant à une véritable révolution qu'on nous a conviés. Les leaders politiques de ces pays, responsables de près de 90% de la production mondiale, ont paraphé une déclaration d'une puissance et d'une portée inégalée afin d'éviter que ne se reproduise, à l'avenir, une crise financière de l'ampleur de celle que nous vivons. La déclaration comporte cinq principes, dont trois qui devraient retenir notre attention:

- accroître la transparence et la reddition de compte des marchés financiers;

- accroître l'intégrité par des mesures de surveillance accrues;

- et renforcer la coopération internationale par une réglementation coordonnée entre les nations.

Cette déclaration constitue un appel au resserrement des règles nationales en matière financière et un pas important pour une réglementation mondiale comme celles de l'OMC pour le commerce. Référant à la transparence, à la surveillance et à l'intégrité, c'est également un parti pris en faveur d'une lutte acharnée contre les paradis fiscaux où trônent la culture du secret et la non-coopération.

La moitié des capitaux mondiaux, presque libre de tout impôt, transite par ces pays et la crise de liquidité que nous vivons est exacerbée par leurs pratiques. La France, l'Allemagne et surtout la Chine, avec plus de vigueur encore, ont fait de l'établissement de règles financières mondiales et de la lutte contre les paradis fiscaux leur cheval de bataille depuis le tout début de la crise financière. La déclaration du G20 reflète leurs convictions.

Refus historique

Il importe peu que Georges W. Bush exprime le refus historique des États-Unis de se soumettre à une réglementation internationale des marchés financiers. Le président Obama, qui entrera officiellement en fonction dans quelques semaines, a déjà parrainé comme sénateur un projet de loi qui visait à resserrer les règles du secteur financier et à s'attaquer aux pratiques des paradis fiscaux.

Il y a donc plus de chance qu'il compte parmi les alliés des pays «réformateurs du capitalisme mondial», renversant la position traditionnelle des États-Unis. S'il advenait en cours de route que les arguments lui manquent afin de convaincre le Congrès américain de la nécessité de ces réformes, la Chine pourrait lui en fournir de nouveau et de percutants. Ce pays dispose de 2000 milliards de dollars de réserve de changes, dont 70% est libellé en dollars américains, et de 1500 milliards de titres américains. Les États-Unis ont un urgent besoin de liquidités afin de financer les interventions du Trésor et de la Banque centrale et reluquent du côté de l'Empire du Milieu.

S'il advenait que la Chine, frustrée de la position des États-Unis face aux réformes, boude les nouvelles émissions ou qu'elle décide de liquider les titres américains déjà en sa possession, cela engendrerait une catastrophe pour les États-Unis qui repousserait, dans un horizon très lointain, la fin de la crise. Chine et États-Unis, alliés objectifs obligés, qui l'eût cru?

L'auteur est économiste et conseiller principal au cabinet de relations publiques National.