J'exige le vouvoiement de la part de mes élèves depuis près de 12 ans. Grand bien m'en fasse. À une demande d'un enfant, j'avais répondu de cette façon. Pourquoi? La phrase du jeune contenait un sacre et un ordre: «Passe-moé don' une flûte s'tie!». J'enseigne la musique au primaire. L'enfant était alors en 5e année.

J'exige le vouvoiement de la part de mes élèves depuis près de 12 ans. Grand bien m'en fasse. À une demande d'un enfant, j'avais répondu de cette façon. Pourquoi? La phrase du jeune contenait un sacre et un ordre: «Passe-moé don' une flûte s'tie!». J'enseigne la musique au primaire. L'enfant était alors en 5e année.

Il est plus difficile de conjuguer un verbe en sacrant ou en étant impoli, voire offensant. Si un enfant passe par le tutoiement et se montre impoli, je lui répète qu'il doit me vouvoyer d'abord. L'enfant devient alors rapidement empêtré dans ses conjugaisons. On peut alors reprendre la discussion calmement! De plus, vouvoyer apporte l'obligation de penser autrement et attire l'approbation des adultes. Toutefois, le sujet dépasse largement les relations entre les adultes et les jeunes: j'entendais récemment deux cégépiennes se traiter de maudites «plotes» et de «crisses» de vagins en faisant la course pour se rendre à leur auto... Le problème serait-il alors sociétal?  

Je pose alors la suivante: je montre aux enfants le savoir-vivre depuis bien plus longtemps que le dernier discours inaugural et il y a encore des jeunes qui s'expriment tellement mal. Lorsque j'interroge mes collègues sur ce sujet, vouvoiement ou pas, je remarque qu'ils ont intégré dans leur pratique des normes de politesse, de respect et de savoir-vivre en société. Ça ne date donc pas d'hier. Nous enseignions, nous enseignons et enseignerons la politesse parce que la profession d'enseignant existe. Les relations humaines, ça fait partie de notre job.

Se pourrait-il que les enfants apprennent à se comporter ainsi en dehors de l'école et que ce soit accepté ou ignoré dans cet ailleurs? Je suis donc en droit d'exiger que ce que j'enseigne à l'école soit repris dans la vie quotidienne. Je suis également en droit de m'inquiéter du fait que l'enseignement «obligatoire» (?) du savoir-vivre à l'école permettra à plus de parents de ne pas se soucier de l'enseigner à leurs propres enfants lorsqu'il sera officiellement au programme du MELS. Sommes-nous prêts, en tant que société, à nous investir dans ce sens? Le savoir-vivre est d'abord et avant tout une affaire de société. Tout le monde doit participer.