Le personnage n'attire pas la sympathie, sa cause était douteuse, et pourtant Marc Bellemare a la cote sur le premier ministre Jean Charest et le juge Michel Bastarache. La Cour suprême avait feint de ne voir dans le kirpan qu'un signe religieux, et voilà qu'un sondage la désavoue à 92%.

Le personnage n'attire pas la sympathie, sa cause était douteuse, et pourtant Marc Bellemare a la cote sur le premier ministre Jean Charest et le juge Michel Bastarache. La Cour suprême avait feint de ne voir dans le kirpan qu'un signe religieux, et voilà qu'un sondage la désavoue à 92%.

Les Québécois possèdent une histoire lourde de causes étouffées, de «solutions» ambiguës, et d'une incapacité intellectuelle et pratique d'identifier et de résoudre leur aspiration identitaire et politique fondamentale. Ce grand désir de fond, jamais exprimé clairement, toujours déçu par les «élites», revient sans cesse les hanter par des biais inattendus.  

Pour bien entendre les événements et les interpréter avec justesse, il faut les replacer dans le cadre national et y voir l'affleurement d'un énorme refoulé.

Le kirpan n'est que très secondairement une arme mais, en dépit de l'abondante «réflexion» sur le sujet, il soulève l'ire et le rejet des Québécois pour une raison que l'on ne dit pas. N'est-ce pas, derrière les prétendus droits de la personne, une atteinte à l'identité nationale et le signe de notre dilution programmée dans une société «multiculturelle»? Or ce recul identitaire et juridique est dicté par la Constitution canadienne et asséné par le bras séculier de celle-ci: la Cour suprême du Canada.    

M. Bellemare obéit plus à des motifs personnels qu'à une action politique et nationale, mais il tombe dans la résonnance des «complexes» collectifs. Voilà pourquoi, on l'approuve sans retenue, selon une logique tordue, mais avec un sûr instinct de l'effet global, car le Parti libéral a trop d'accointances avec Ottawa pour être perçu comme vraiment québécois, et le juge Bastarache représente la Cour suprême qui s'est prononcée nombre de fois contre la loi 101, ce symbole de notre identité nationale, et dans tous les domaines où cette cour peut assujettir le Québec aux vues et aux intérêts du Canada anglais.