Il me semble qu'il est plus que temps que l'Amérique du Nord, et le Canada en particulier, rattrape son retard en matière d'infrastructure ferroviaire.

Il me semble qu'il est plus que temps que l'Amérique du Nord, et le Canada en particulier, rattrape son retard en matière d'infrastructure ferroviaire.

Les voies empruntées par les trains de passagers (souvent celles du CN) sont dans un état que l'on pourrait qualifier de pathétique quand on les compare à ce qui se fait en Europe.

Les seules lignes qui remuent autant en France sont des lignes secondaires peu fréquentées, construites au début du siècle dernier, jamais refaites depuis et proches de l'abandon. Et encore, certaines sont électrifiées.

En fait, le seul train que j'ai pris en France qui offrait une expérience comparable au Montréal-Gaspé, c'était le Bordeaux-Lyon avec les vieilles rames à turbine à gaz: sept heures et demie de trajet, quatre demi-tours, des voies qui swinguent et qui claquent, le bruit des turbines, l'odeur du mazout, et tout le temps d'admirer le paysage.

Pourquoi évoquer le turbotrain? D'abord pour l'ironie d'avoir utilisé cette technologie de trains rapides, qui a permis de nombreuses avancées et a servi de précurseur aux TGV, sur des voies lentes. Aussi, parce qu'au Canada, on a déjà construit, utilisé et mis au rancart des turbotrains sur ce fameux corridor Québec-Windsor. Cette technologie a même établi un record de vitesse à 275 km/h en 1967 sur une voie du New Jersey.

Hélas, sur les voies du CN, des problèmes d'usure des voies, de sécurité, de confort et de signalisation ont contraint à limiter la vitesse à 160 km/h, une vitesse qu'atteignent certains trains de banlieue en France et les trains actuels de VIA Rail, qui n'ont alors même plus besoin d'être pendulaires.

Ce qui menace le plus le projet de train rapide Montréal-Toronto, c'est l'idée qu'ont certains qu'on pourrait le faire en utilisant les voies actuelles, ou même les emprises actuelles, du CN. Oubliez ça. Enterrons cette idée au plus vite, ce n'est même pas la peine d'en débattre. Cela ne fonctionnera pas plus maintenant que cela n'a fonctionné il y a 40 ans.

Le CN et ses actionnaires seraient très certainement ravis que les contribuables canadiens subventionnent massivement les rénovations parfois urgentes de ses voies et de ses ouvrages d'art, mais le résultat pour les voyageurs serait un gain de temps et de confort minime.

Le tracé historique n'est pas optimal, le système de signalisation conçu pour les trains de marchandises ne sera pas vraiment revu, il y aura toujours des trains à attendre et croiser, et le pire, c'est qu'on continuerait à faire avancer ces trains au pétrole. Ça coûterait quand même des milliards, mais avec un gain théorique réaliste d'une heure dans les meilleures conditions (soit 3h45 au lieu de 4h45), c'est certain que la clientèle risque de ne pas être au rendez-vous et préférer continuer à prendre l'avion, l'autobus ou sa voiture. En tant que contribuable, je préfère encore le statu quo.

En tirant parti des technologies disponibles aujourd'hui, un train rapide et efficace pourrait mettre Toronto à environ 1h50 de Montréal. À titre de comparaison, Paris-Valence, une distance similaire, se fait en 2h11, mais les normes de construction déjà anciennes (20 et 30 ans) limitent la vitesse à 270 ou 300 km/h.

Les nouvelles lignes construites en France permettraient une vitesse en service commercial de 350 km/h, qui n'est pas encore exploitée. Mais cela demande des tracés rectifiés, aucun passage intégral de l'emprise pour éviter que des animaux et des personnes ne s'y introduisent, etc. C'est évidemment rentabilité de ce type d'infrastructure sur le long terme.

C'est certain que si, de Québec, j'avais la possibilité de rejoindre les centres de Montréal en 1h, Ottawa en moins de 2h, Toronto en environ 3h, et New York en moins de 4h, j'irais certainement visiter plus souvent ces villes.