L'Unité permanente anticorruption a mené une perquisition dans les locaux du Parti libéral au mois de juillet. Le mandat a été mis «sous scellé" et des médias tentent de faire lever ce secret.

Les conséquences catastrophiques de cette nouvelle sont assez évidentes pour le PLQ. Les concepts juridiques en cause le sont peut-être un peu moins...

Voici donc une tentative de clarification.

1. Qu'est-ce qu'un «mandat de perquisition» ?

Il s'agit d'une autorisation donnée par un juge à des agents de l'État - des policiers, généralement - d'entrer dans un lieu privé et d'y chercher des preuves.

2. Comment les policiers obtiennent-ils un mandat?

Un policier fait une déclaration sous serment affirmant 1) qu'un crime a été commis; 2) qu'il a des motifs «raisonnables et probables» de penser qu'il trouvera une preuve dans l'endroit visé. Le policier doit résumer son enquête, parfois révéler des sources, pour faire sa démonstration et prouver qu'il ne va pas "à la pêche».

3. Le suspect peut-il empêcher qu'un mandat soit accordé contre lui?

Par définition, les demandes de mandat sont secrètes et la personne visée n'en est évidemment pas informée. Sachant qu'ils n'ont que la version des policiers, les juges doivent en principe exiger la preuve d'une enquête sérieuse avant d'autoriser une violation aussi importante de la vie privée.

Si, par la suite, on se rend compte que le policier a menti, exagéré ou caché une information importante (par exemple sur la crédibilité de son informateur), toute la preuve trouvée dans la perquisition peut être exclue, même si elle est accablante pour l'accusé.

4. Si la procédure est secrète, comment se fait-il que les médias font régulièrement état des descentes de police?

Différentes sources, généralement policières, informent les médias (une fois l'effet de surprise passé) pour rendre publique une opération policière. Le but est parfois stratégique (mettre de la pression sur d'autres suspects, examiner leur réaction) ou politique (montrer qu'une escouade est efficace et «frappe fort»).

5. Les mandats restent-ils secrets?

Quand une perquisition a été effectuée et qu'elle a rapporté quelque chose, le mandat devient en principe public.

Dès 1982, la Cour suprême a déclaré que les procédures judiciaires sont publiques même avant le stade des accusations. En principe, donc, le public devrait avoir accès au contenu des mandats dès que la perquisition a eu lieu. «Ce qu'il faut viser, c'est le maximum de responsabilité et d'accessibilité, sans aller jusqu'à causer un tort à un innocent ou à réduire l'efficacité du mandat de perquisition comme arme dans la lutte continue de la société contre le crime», écrivait la Cour.

Mais ce principe souffre de plusieurs exceptions...

6. Qu'est-ce qu'une «mise sous scellé" ?

C'est le maintien du secret après la perquisition.

Pour différentes considérations, il est possible de s'adresser à un juge pour que le mandat ne soit pas rendu public durant une période donnée.

Les procureurs de la poursuite veulent généralement protéger l'enquête, protéger des informateurs, ne pas trop divulguer de détails de l'enquête aux futurs accusés et garder leur «effet de surprise».

Au jour le jour, ce sont moins les médias que les personnes visées par les enquêtes qui demandent la «levée des scellés».

7. Puisque la police présente son mandat lors de la perquisition, en quoi est-il secret?

Ce n'est pas le mandat, qui est une ordonnance, mais l'annexe du mandat qui est intéressante. C'est là qu'on trouve «l'histoire»: le policier y résume toute son enquête.

C'est une mine d'informations qui, parfois, ne sortiront dans aucune procédure, puisque la majorité des accusés plaident coupable.

8. L'information contenue dans ces annexes est-elle fiable?

Elle devrait l'être, puisque le policier jure sous serment l'avoir vérifiée... Mais elle n'a pas encore été testée à la Cour, ni contredite, ni éclairée par la version du suspect.

Un juge peut vouloir protéger les «tiers innocents». Par exemple, si une perquisition a lieu chez X mais que l'enquête vise Y.

9. Quel est l'argument des médias pour faire «lever le scellé" ?

En 2005, la Cour suprême a restreint passablement le droit de maintenir le scellé. C'est à celui qui le demande de prouver que c'est nécessaire pour éviter un «risque grave et précis pour l'intégrité de l'enquête criminelle». La barre est haute!

On arrive souvent à des solutions mitoyennes selon les circonstances: un scellé pour quelques mois, le temps que l'enquête avance.

Le principe est clair, pourtant: ces documents doivent être... aussi publics que possible... aussi vite que possible.