Petits, enfin, je ne le sais pas. J'ai appris à me méfier des photos officielles de suspect. Peut-être avons-nous affaire à de gros cons.

Mais si ces allumeurs de pétards pensent aider une cause quelconque, c'est qu'ils sont réellement stupides, comme l'observait hier Amir Khadir.

Quelqu'un devrait leur enseigner la notion d'allié objectif.

Un allié objectif est un acteur politique qui aide la cause de son adversaire par la stupidité de ses actions.

Un exemple théorique: un militant étudiant allume un pétard fumigène dans le métro? Jean Charest monte d'un point dans les sondages. Deux pétards? Deux points.

Je dis militant étudiant; vous me direz qu'il n'y a pas de preuve qu'ils en soient. C'est vrai. Un très grand nombre de personnes arrêtées lors des émeutes n'étaient pas des étudiants du tout.

Il n'y a par ailleurs ici aucun lien entre ces allumeurs et le mouvement étudiant organisé. Rien n'indique que les responsables de la panique et de la paralysie dans le métro de Montréal hier matin soient autre chose que des agitateurs isolés.

Sauf qu'ils n'ont pas fait ça pour la Journée commémorative française de l'abolition de l'esclavage (10 mai) ou les droits des animaux.

Cela arrive dans un contexte d'embourbement du conflit étudiant, qui pourrit la vie sociale montréalaise depuis trois mois. Un contexte de multiplication des manifs, manifs régulièrement infectées par des casseurs et sympathisants casseurs. Et où un certain climat de laxisme donne une sorte d'autorisation morale au vandalisme.

Disons que ce serait un fâcheux hasard que ces bombes de fumée n'aient rien à voir avec le conflit étudiant, même si c'est mathématiquement possible.

Ça ne fait rien avancer, donc. Mais ça, ils s'en doutent, j'imagine. Peut-être ne veulent-ils rien faire avancer. Peut-être veulent-ils simplement perturber. Crier une révolte, un refus, sans rien revendiquer d'autre qu'un espace délinquant pour exprimer leur écoeurement.

Hey, Opinion publique, on t'emmerde!

L'Assemblée nationale, tous partis confondus, a dénoncé cet acte. Ces déclarations, aussi prévisibles soient-elles, ne servent pas à rien. Il faut redire le refus de la violence, et plusieurs ont raté l'occasion récemment. Ou assortissait toujours leur condamnation d'une égale condamnation de «l'irresponsabilité du gouvernement», comme dans une sorte d'équivalence morale.

Amir Khadir, qui soutient le mouvement étudiant au point d'avoir participé à plusieurs manifs, a parlé d'un «crime qui porte atteinte au droit à la sécurité». Et qui n'a rien à voir avec la «désobéissance civile». Et de conclure: «Les gens stupides existent.»

Très bien dit. C'est rare que le député de Québec solidaire parle aussi fermement que le ministre de la Sécurité publique.

Il ne faudrait pas pour autant appeler ça du «terrorisme», comme certains commençaient à le dire hier. Le terrorisme est un acte commis pour une cause, qui entraîne la mort, des blessures graves ou met en danger la vie; ou qui cause des dommages «considérables» ou perturbe «gravement» un service.

On est loin de ces dimensions tragiques.

Mais qui sait ce qui peut arriver dans la panique? Une bousculade, quelqu'un perd pied, une vieille dame trébuche... sauve qui peut... On n'est pas à l'abri d'un drame sérieux dans ce genre de situation. Les gens prisonniers des wagons n'ont pas seulement été incommodés ou retardés. Certains ont eu très peur. On en a vu éclater en sanglots après, ne sachant pas qui se passait vraiment.

Bah, ce ne sont toujours que des méfaits, n'est-ce pas? Dommages matériels, économiques, interruption de service...

Avis aux intéressés: à partir du moment où un méfait met sérieusement en danger la vie, il est punissable théoriquement par l'emprisonnement à perpétuité. Ça n'a pas été le cas. Mais ça aurait pu mal tourner.

On pourra accuser le gouvernement d'avoir tardé à négocier et sans doute aura-t-on raison. Mais faire croire aux militants qu'on peut encore obtenir le gel n'est pas plus responsable. Cela aussi contribue au sentiment d'injustice -qui inspire apparemment des dérapages de plus en plus sérieux.

Ça n'augure rien de bon si ce conflit devient de moins en moins politique et de plus en plus policier.