La lumière du soleil va peut-être revenir dans le stade olympique autrement que par une déchirure dans la toile du toit.

La firme d'ingénierie Dessau et le constructeur ontarien EllisDon ont soumis vendredi un projet inspiré du concept de toit rétractable de François Delanay. Le projet est présenté comme un toit fixe, parce que c'était une des exigences de la RIO, mais si un nouvel appel d'offres est lancé, l'idée est d'en faire un toit rétractable.

Depuis cinq ans, l'affaire semblait pourtant entendue: le toit serait fixe, en acier, point final.

Cela voulait dire renoncer à une série d'événements à ciel ouvert, que ce soit du sport ou des grands spectacles. Mais après des consultations internationales, on en était venu à la conclusion que c'était la seule possibilité. Il resterait toujours les foires, les réunions et les autres activités sportives et culturelles qui peuvent se faire sous un toit.

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Après tout, nous en sommes à la troisième solution «définitive». La première toile de kevlar, rétractable, installée 11 ans après les Jeux olympiques de 1976, s'est déchirée après seulement quatre ans, en 1991.

On l'a remplacée en 1998 par une toile plus légère, conçue par Birdair. Elle serait permanente et le manufacturier en garantissait la longévité. Mais elle n'était pas encore totalement installée qu'elle commençait elle aussi à se déchirer. La Régie des installations olympiques a poursuivi Birdair, une cause réglée à l'amiable récemment.

Ce toit comporte deux étages. De l'intérieur du stade, on aperçoit une toile bleue. Mais par-dessus, un bric-à-brac de poutres, de chauffrettes et de câbles retiennent et réchauffent la «vraie» toile, celle qu'on voit de l'extérieur, qui est blanche.

La moindre chute de neige un peu conséquente menace de la déchirer, d'où ces chauffrettes. L'eau s'accumule à différents endroits, ce qui menace également la toile. Elle est d'ailleurs recouverte de petits sparadraps pour réparer la cinquantaine de déchirures plus ou moins grandes qu'on découvre chaque année...

Il y a déjà plus de cinq ans, la RIO et le gouvernement, exaspérés par les «solutions définitives» qui viraient au désastre technique et financier, ont lancé une consultation internationale pour régler le problème une fois pour toutes. Il fallait d'abord que la solution soit sécuritaire. Et ensuite qu'elle soit garantie financièrement par ses concepteurs sur une période de 25 ans. On en a marre de courir après les fabricants pour se faire rembourser leurs échecs.

L'ère de l'expérimentation et des projets révolutionnaires était terminée. On en est au point où le peu d'activités qui restent fuient le stade, incapable qu'on est à la RIO d'offrir des garanties pour la période d'hiver.

Démolir le stade? L'opération relève du casse-tête technique, durerait une éternité et coûterait une fortune.

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Au bout du compte, donc, seul le toit fixe en acier de Lavalin a été présenté. Personne d'autre ne voulait s'engager à prendre un risque technique et financier aussi considérable.

Voilà cinq ans que la décision est prise en principe... Sauf que Québec ne s'est jamais résolu à engloutir 300 millions dans l'aventure.

Mais pendant que le stade se dégrade et voit sa réputation ternie un peu plus chaque année, dans son coin, le concepteur François Delanay concocte cette idée de toit en acier, indépendant de la structure du stade... et qui s'ouvre.

L'homme est un inventeur de talent, mais tout de même... le toit du stade! On est loin des portes de garage. Est-il sérieux? Est-il seulement ingénieur? Il n'a pas le titre, mais il a l'ingéniosité et le sérieux.

Tandis qu'il intéresse de plus en plus de gens à ses idées, y compris l'architecte Roger Taillibert et des ingénieurs de la première heure du projet olympique, la RIO se voit forcée, cette année, de lancer un appel à tous, pour voir si d'autres firmes sont intéressées à présenter un nouveau projet.

Comme il faut pour se qualifier avoir non seulement une expérience de ce genre de projets, une expertise technique et garantir 50 millions... On ne s'attendait pas à la RIO à voir le projet Delanay sur les rangs.

Pourtant, Dessau, firme de génie-conseil bien connue, et EllisDon, qui a notamment construit le stade Rogers à Toronto, ont soumis ce projet.

Un jury dira bientôt s'il faut refaire un appel d'offres. Espérons que ce soit le cas. D'abord, parce qu'il y aura enfin de la concurrence - Dessau prétend faire son toit à 200 millions, alors que le toit Lavalin coûterait sensiblement plus cher.

Ensuite, surtout, parce qu'un projet crédible de toit ouvrant serait sur la table, présenté par des firmes dont on ne peut pas douter du sérieux.

Ce n'est plus l'affaire d'un rêveur dans son atelier.

Remarquez, une chance qu'il y ait eu ce rêveur dans son atelier. Il est la dernière chance de renaissance de ce stade mal aimé.