Dans un match nul, il n'y a ni vainqueur ni perdant, et les quatre élections partielles d'hier ne permettront à aucun parti de triompher, si ce n'est Québec solidaire, qui pourra s'enorgueillir de son score étonnant dans Verdun.

Les deux principaux partis de l'opposition, le Parti québécois (PQ) et la Coalition avenir Québec (CAQ), n'ont pas réussi hier soir à départager un gagnant pouvant se présenter comme la solution de rechange évidente aux libéraux en vue des prochaines élections générales en octobre 2018.

Les libéraux, eux, n'avaient théoriquement pas grand-chose à perdre, sachant qu'ils étaient assurés de garder Verdun, mais l'érosion de leur vote dans les quatre circonscriptions en jeu leur causera sans doute quelques soucis. Ils ne pourront pas toujours s'en remettre à la division du vote entre leurs adversaires et à leurs châteaux forts de Montréal. Le 450 et la grande région de Québec pourraient éventuellement leur échapper s'ils ne remontent pas auprès de l'électorat francophone.

Hier encore, les libéraux laissaient entendre qu'ils pourraient créer la surprise et rafler la mise dans Arthabaska, où ils n'ont pu faire mieux que 25%. Dans Marie-Victorin, les libéraux ont terminé quatrièmes, un résultat gênant pour un parti au pouvoir.

De son côté, la CAQ de François Legault doit se contenter d'un seul point, au lieu de voir l'embellie détectée par les récents sondages se concrétiser en une nouvelle victoire sur le terrain, dans Saint-Jérôme, où ils ont mis toute la gomme au cours des derniers mois.

Encore une fois, la CAQ maintient ses acquis, mais n'arrive pas à prendre son envol dans des coins pourtant favorables, comme Saint-Jérôme.

Saint-Jérôme était une cible particulièrement importante pour François Legault, qui s'est rendu dans cette circonscription à une douzaine de reprises depuis juin. La CAQ détient quatre circonscriptions près de Saint-Jérôme, dans les Basses-Laurentides, et elle a déjà remporté Saint-Jérôme en 2012 avec Jacques Duchesneau.

Pour le Parti québécois, pas de quoi sabler le champagne non plus. Avec un tout nouveau chef, le PQ a gardé ses deux circonscriptions, mais il perd des plumes dans Verdun. C'était un premier bulletin pour Jean-François Lisée, élu chef du PQ depuis tout juste deux mois, et la note n'est pas très impressionnante.

Le PQ n'est pas en position de gagner du terrain, mais se devait de garder Marie-Victorin et Saint-Jérôme. Surtout dans Saint-Jérôme, où le candidat du PQ, Marc Bourcier, a mis la barre haute en parlant de cette partielle comme d'une première étape vers la victoire aux générales de 2018.

M. Lisée pourra se targuer d'avoir eu raison de dire que le vote additionné du PQ et de Québec solidaire aurait permis de battre les libéraux, ce pourquoi il avait offert une alliance formelle.

Il se réveille toutefois ce matin avec un réel problème : comment relancer les négociations avec QS, qui fera valoir sa nouvelle position de force? QS n'apporterait rien au PQ hors des circonscriptions francophones de Montréal, dans lesquelles les militants solidaires rejettent le rapprochement avec les péquistes. À première vue, c'est insoluble, et c'est sans compter les graves problèmes d'arrimage des deux partis sur les questions économiques et identitaires.

Ces élections partielles auront permis d'envoyer deux femmes de plus à l'Assemblée nationale (jeunes femmes, qui plus est) : Isabelle Mélançon dans Verdun et Catherine Fournier dans Marie-Victorin. Au total, dans ces quatre partielles, on ne comptait que 13 femmes sur 38 candidatures, ce qui prouve que l'important, ce n'est pas tant le nombre de candidates que leurs chances de se faire élire dans des circonscriptions sûres ou prenables.

On dit souvent que les élections partielles permettent aux électeurs de passer un message au gouvernement et de lui faire connaître leur mécontentement, surtout en fin de mandat. Cela dit, depuis son élection il y a 30 mois, le gouvernement Couillard s'en tire assez bien : il a conservé ses six circonscriptions et il a même réussi à en arracher une à la CAQ (Chauveau, remportée par Véronyque Tremblay, après le départ de Gérard Deltell vers Ottawa).

Durant cette période, le PQ n'a ajouté aucune circonscription et la CAQ en a perdu une.

Depuis les élections générales d'avril 2014, il y a eu maintenant 13 élections partielles, dont une seule pour force majeure, soit la mort de Sylvie Roy, dans Arthabaska, et une autre pour cause de maladie (Marjolain Dufour, dans René-Lévesque). Les 11 autres partielles ont été rendues nécessaires par la démission de députés partis pour un autre emploi, pour un autre Parlement ou par frustration et désabusement de la chose publique. Le cas de Pierre Karl Péladeau entre toutefois davantage dans la catégorie «raisons familiales».

On pourra au moins se consoler en rappelant qu'il est dorénavant interdit aux députés démissionnaires de toucher la fameuse «allocation de transition» à moins de raisons médicales ou familiales sérieuses. Le dernier à avoir eu droit à cette indemnité de départ aura été Stéphane Bédard, ex-député du PQ dans Chicoutimi.

Néanmoins, ces élections partielles coûtent cher (7 millions pour les quatre d'hier), et de plus en plus de voix s'élèvent pour réclamer un engagement moral, sinon légal, des députés à terminer leur mandat. Ironiquement, ce principe d'obligation morale a été évoqué il y a quelques années par l'ex-député péquiste Bernard Drainville, parti depuis animer une émission de radio à Québec...