Au départ, la première rencontre entre Justin Trudeau et les premiers ministres des provinces, aujourd'hui à Ottawa (la première rencontre fédérale-provinciale du genre en six ans), devait permettre de mettre la table pour le sommet de Paris sur le climat, mais les attentats du 13 novembre dans cette ville modifieront l'ordre du jour et les réfugiés syriens s'inviteront à la table.

Le gouvernement Trudeau dévoilera publiquement demain les détails du plan d'accueil des 25 000 réfugiés, mais il y a fort à parier que le nouveau premier ministre voudra rassurer ses homologues provinciaux en leur expliquant la suite. Selon des sources bien au fait du dossier, ce n'est pas le nombre et plus tellement les délais qui préoccupent le plus les provinces (et les grandes villes) que de savoir qui va payer. Plus exactement : combien le fédéral est-il prêt à dépenser ?

Jean Chrétien, qui a tenu quelques rencontres épiques avec les premiers ministres, notamment sur la santé, s'était rapidement lassé de ces exercices, disant que les provinces arrivent toujours à Ottawa avec des principes... mais veulent repartir avec un chèque.

Pour Justin Trudeau, ce sera aussi l'occasion d'expliquer son plan aux Canadiens, le grand point faible de son début de mandat. D'où viendront les réfugiés ? Qui sont-ils ? Où iront-ils ? Quelles ressources seront déployées ?

À Québec, une certaine confusion persiste. On n'est même pas tout à fait fixé sur le nombre de réfugiés qui pourraient débarquer ici. Le budget, aussi, pose problème : 29 millions sont déjà prévus, mais cela ne suffira pas, prévient-on.

Par contre, on sait déjà d'où ils viendront et qui ils sont, pour la plupart, puisqu'ils sont parrainés par des organismes religieux chrétiens ou communautaires. Ainsi, un fort contingent de familles viendra du Liban, où 1000 dossiers (représentant 2400 personnes) ont déjà été traités et approuvés.

Il s'agit de réfugiés chrétiens, des Syriens d'origine arménienne, dont les ancêtres ont été chassés une première fois de leur pays lors du génocide arménien. Québec n'a pas volontairement choisi des réfugiés chrétiens, c'est que certaines communautés d'ici venant en aide à ces familles ont été très actives ces derniers mois.

En plus du Liban, des réfugiés viendront de camps installés en Turquie et en Jordanie.

Au Québec, spécifiquement, un autre aspect de l'accueil des réfugiés pourrait causer des remous : les commissions scolaires se disent prêtes à accueillir les enfants syriens dans leurs écoles, dont la commission scolaire English-Montreal (CSEM), qui souhaite ouvrir ses classes à 1000 élèves. Or, pour ce faire, Québec devrait accorder une dérogation à la CSEM pour contourner la loi 101, qui oblige les enfants d'immigrants à fréquenter l'école francophone.

Si le gouvernement fait appel à la CSEM, il y a fort à parier que l'opposition péquiste s'oppose au passage d'un si grand nombre d'élèves dans le réseau anglophone.

GROSSE SEMAINE À QUÉBEC AUSSI

Est-ce en train de devenir « personnel » entre le président du Conseil du trésor Martin Coiteux et les syndiqués de la fonction publique ?

Certains leaders syndicaux le croient et accusent, en privé, M. Coiteux d'avoir une attitude hautaine et dogmatique et de mener une lutte personnelle contre eux.

Récemment, un leader syndical a fait à la télévision une déclaration qui a déplu à M. Coiteux. Quelques minutes plus tard, le chef syndical en question a reçu un coup de fil d'une assistante de M. Coiteux, qui lui a dit que son patron était très fâché et déçu. « J'avais l'impression de me faire sermonner comme un enfant d'école ! », m'a confié ce syndicaliste, qui ne veut pas en rajouter, question de ne pas empoisonner davantage les relations.

On dit, par ailleurs, que le président du Conseil du trésor ne décolère pas depuis que le chef de la FTQ a déclaré que les dernières offres de Québec étaient « quatre trente sous pour une piasse ».

Martin Coiteux, qui est entré en politique en 2014 pour lutter contre le projet de charte des « valeurs » de l'ex-gouvernement péquiste, s'est trouvé une nouvelle bataille : retrouver l'équilibre budgétaire, en mâtant les syndicats, s'il le faut.

« Lorsqu'il décide de telle ou telle compression, tu peux parler, pleurer, crier ou faire la danse du bacon, il ne bronche pas !, dit un collègue libéral du président du Conseil du trésor. Oui, il est très tranchant, il n'a aucun problème à dire NON, mais c'est précisément ce dont nous avons besoin. On ne veut pas d'une Mère Teresa au trésor ! »

La loi spéciale, qui n'a pas été évoquée explicitement par le gouvernement, est-elle prête ? Philippe Couillard s'en défend, mais son président du Conseil du trésor n'éprouvera aucun état d'âme s'il faut, avant longtemps, recourir à ce moyen ultime.

La semaine qui commence s'annonce cruciale.

COMMISSION CHARBONNEAU : RAPPORT FINAL

Autre événement très attendu à Québec cette semaine : le dépôt (enfin !) du rapport final de la commission Charbonneau.

Malgré l'annonce d'une imminente pluie de blâmes, le gouvernement libéral est étonnamment serein. Il faut dire que parmi les personnes qui risquent le plus de casquer, très peu sont encore dans le giron du PLQ.

Il faut dire aussi qu'il reste près de 30 mois avant les prochaines élections, ce qui laisse largement le temps d'effacer les souvenirs d'une histoire qui s'est déjà passablement étiolée.