L'arrivée d'un nouveau chef dans un Parlement, à plus forte raison au poste de chef de l'opposition officielle, est toujours un événement très suivi par les accros à la politique. Avec PKP, comme pour tout le reste, cette entrée en poste a pris des proportions démesurées.

Depuis l'arrivée de Jean Charest à Québec, en 1998, puis celle de Lucien Bouchard en 1996, je ne me souviens pas d'un chef politique ayant attiré sur lui autant d'attention. À court terme, c'est probablement une bonne chose pour le Parti québécois qui, de manière prévisible, remonte dans les sondages, mais il y a aussi un risque à transformer le PQ en PKP. On l'a vu lors de la dernière campagne électorale, l'ancien patron de Québecor polarise les électeurs. En ce moment, l'électorat est coupé en deux : ceux qui ne veulent rien savoir de M. Péladeau et ceux qui lui vouent une confiance totale. C'est entre ces deux groupes que le nouveau chef du PQ doit marquer des points, chez les nationalistes désabusés et les jeunes, en particulier.

En ce sens, son entrée en matière, mardi à l'Assemblée nationale, aura été plutôt habile.

Reconnu comme cassant et très partisan, il a joué, pour sa première question à Philippe Couillard, la note de l'ouverture et de la collaboration en proposant la tenue d'un grand forum économique en septembre.

Le premier ministre, sans surprise, a rejeté cette suggestion, mais ceux qui attendaient un PKP hargneux, le poing en l'air et le regard mauvais, auront plutôt découvert un chef de l'opposition posé et constructif, préoccupé par l'économie et la création d'emplois. La question était adressée à Philippe Couillard, mais elle visait du coup une victime collatérale, François Legault, qui risque de se faire damer le pion sur son terrain de prédilection.

De l'autre côté du Salon bleu, on a vite constaté que les libéraux ne feront pas de cadeau au nouveau chef de l'opposition. Le ministre Jacques Daoust, piqué par les critiques de Stéphane Bédard sur l'absence de plan économique, a rétorqué que Québecor comptait 60 000 employés lorsque PKP a pris la direction de l'entreprise et qu'il n'en restait que 19 000 à son départ, l'an dernier. Le genre de « dossiers » que les libéraux ont colligé sur leur nouvel adversaire.

L'ombre de Québecor a d'ailleurs très vite rattrapé le chef du PQ, mardi matin, avant même qu'il ne fasse son entrée officielle au Salon bleu. L'annonce de la vente d'Archambault, propriété de Québecor, à Renaud-Bray a ramené à l'avant-scène un débat qui suit M. Péladeau comme son ombre : peut-il rester actionnaire de contrôle de l'empire Québecor tout en menant une carrière politique de si haut niveau ? La question se pose pour l'industrie du livre (librairies, mais aussi maisons d'édition, un autre domaine où Québecor domine au Québec), mais elle pourrait revenir aussi pour d'autres secteurs, comme les médias, la production télévisuelle ou cinématographique et j'en passe.

Il semble (après un certain flou sur la question) que M. Péladeau n'ait pas été consulté pour la vente d'Archambault, mais sa position est quelque peu paradoxale : d'un côté, il dit vouloir garder ses actions pour préserver l'entreprise fondée par son père, mais d'un autre, il se privera de toute intervention dans les grandes décisions touchant l'avenir même de cette entreprise ?

La vente d'Archambault a fait ombrage à un premier sondage post-course à la direction favorable au PQ. Les péquistes auraient tort de bouder leur plaisir, mais la prudence est de mise avec les sondages post-courses.

Tous les partis montent dans les sondages après l'élection d'un nouveau chef, c'est le premier effet naturel d'une visibilité accrue et d'un regain d'intérêt. À cet égard, la remontée du PQ de PKP observée par Léger Marketing est plutôt modeste (attendons toutefois de voir les prochains sondages). Le score atteint par le PQ de PKP est inférieur à celui obtenu par Pauline Marois après son élection à la tête du PQ, en 2007.

En 2006, par exemple, le PQ dirigé par André Boisclair avait atteint 46 % d'intentions de vote (57 % chez les francophones). On connaît la suite.

Même chose pour Stéphane Dion, au fédéral, qui avait fait grimper le PLC de neuf points au Québec en deux mois.

Il reste trois ans avant les prochaines élections. Et quelques douzaines de sondages.