L'arrivée de candidats-vedettes constitue toujours un moment fort dans une campagne électorale, mais la secousse a atteint des sommets, dimanche, avec l'officialisation de la candidature de Jacques Duchesneau à la Coalition avenir Québec (CAQ).

Excellent coup médiatique de la CAQ, sans contredit, mais sur le plan politique, le cas Duchesneau démontre une fois de plus que les candidats-vedettes sont davantage un mal nécessaire qu'une bénédiction en politique.

Nécessaire parce que ces candidats apportent notoriété et prestige aux partis, mais les inconvénients d'avoir de fortes personnalités à bord surpassent souvent les avantages.

On l'a bien vu hier, premier jour officiel de campagne de Jacques Duchesneau, qui s'est mis le pied dans la bouche à sa toute première entrevue en affirmant qu'il aurait le pouvoir, avec François Legault, de nommer des ministres. Oups! Soit MM. Duchesneau et Legault se sont vraiment mal compris sur le fonctionnement d'un éventuel cabinet Legault, soit le candidat-vedette de la CAQ a dévoilé ses véritables ambitions. Quoi qu'il en soit, cette déclaration a provoqué un branle-bas de combat tôt hier matin parmi le personnel politique de la CAQ, qui a dû prestement remettre les pendules à l'heure.

Prise deux, donc, quelques heures plus tard. Jacques Duchesneau a dû expliquer dans de nouvelles entrevues que le choix des ministres est la prérogative du premier ministre... tout en insistant néanmoins pour dire qu'il sera consulté. Je sens que certains collègues de M. Duchesneau n'ont pas apprécié.

Reconnaissant s'être trompé, Jacques Duchesneau a par la suite déclaré à RDI qu'il «venait d'apprendre qu'en politique, on ne peut pas prendre de raccourci». Ah bon, il en prenait avant d'être en politique? C'est, en tout cas, ce que lui reprochent ses adversaires.

La bourde vient de Jacques Duchesneau, mais son chef en est le premier responsable. J'ai vu bien des candidats-vedettes débarquer en politique, mais je ne me souviens pas qu'aucun n'ait reçu, au préalable, l'assurance écrite d'accéder à telle ou telle fonction. François Legault a présenté M. Duchesneau comme futur vice-premier ministre de son éventuel gouvernement, ce qui a été écrit dans un communiqué de la CAQ. Un peu plus et François Legault déroulait le tapis rouge sur la 20 pour conduire M. Duchesneau jusqu'à Québec au son d'une fanfare.

Les chefs prudents ne font pas ça. Ils laissent leurs conseillers mener les pourparlers et ils rencontrent ledit candidat pour une poignée de main une fois que le candidat a décidé de se présenter.

Le duo Legault-Duchesneau fait penser au système présidentiel américain, avec le candidat à la présidence et son colistier qui deviendra automatiquement vice-président.

Mais François Legault voulait absolument recruter Jacques Duchesneau, et est allé jusqu'à lui remettre les livres comptables de la CAQ. Normalement, ce sont les partis qui mènent des enquêtes sur leurs candidats, pas l'inverse.

Évidemment, le PQ et le PLQ se sont délectés de la boulette de M. Duchesneau. Jean Charest avait même du mal à cacher son plaisir en se payant la tête de la CAQ.

François Legault a répliqué qu'il préfère consulter Duchesneau que Fava...

Tout cela est de bonne guerre en campagne électorale, mais si j'étais le chef de la CAQ, je m'inquièterais un peu. Il semble y avoir un «pattern» avec M. Duchesneau. Il fait des entrées fracassantes partout où il passe, mais ça finit souvent mal.

Ce fut le cas lors de sa campagne à la mairie de Montréal, en 1998. Puis, à la tête de l'Agence canadienne de sécurité dans les transports (d'où il a été congédié) et, ensuite, à l'Unité anticorruption, d'où il est parti avant la fin de son mandat. Il semble que M. Duchesneau ait eu du mal à se soumettre à l'autorité de son supérieur, Robert Lafrenière, patron de l'Unité permanente anticorruption. Pas nécessairement rassurant pour M. Legault, tout ça.

Malgré le départ laborieux de M. Duchesneau dans sa nouvelle carrière et l'importance souvent disproportionnée qu'on accorde à de tels candidats vedettes, la récolte abondante de grosses pointures en 2012 est plutôt une bonne nouvelle.

La valeur de l'engagement des candidats ne se mesure pas à leur degré de notoriété, bien sûr, mais dans le climat moche actuel, il est rassurant de voir que des gens de qualité, connus et respectés, acceptent encore de plonger dans la vie publique.

Le côté négatif, toutefois, c'est l'augmentation du nombre de parachutés, une pratique devenue totalement banale et qui ne semble plus offusquer personne.

L'immense majorité des candidats vedettes ne se présentent pas où ils vivent, parce que les partis veulent leur donner des circonscriptions sûres ou prenables. J'ai demandé aux partis combien de candidats vivent dans leur circonscription. Je vous tiendrai au courant lorsque j'aurai la réponse.

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