Après la fin de session en queue de poisson de Michael Ignatieff à Ottawa, il y a deux semaines, on aurait pu penser que les libéraux partiraient en vacances sans trop insister sur la question de l'assurance emploi.

Pourtant, les libéraux essayent encore de taper sur le clou des «360 heures» qu'ils ont eux-mêmes tordu en cédant devant le premier ministre Harper.

 

J'ai reçu cette semaine dans ma boîte à lettres, comme des milliers de foyers, une brochure du Parti libéral accusant le gouvernement conservateur de priver 150 000 Canadiens de prestations en refusant d'appliquer partout au pays la règle des 360 heures pour se qualifier.

Le dépliant affirme ceci: «Plus de la moitié des Canadiens au chômage n'ont pas droit à l'assurance emploi et beaucoup d'entre eux ont du mal à faire face au coût de la vie. Les conservateurs ont rejeté un plan qui aurait permis à 150 000 Canadiens de plus de recevoir une prestation.»

Heureusement pour les libéraux que la grande majorité des électeurs ont déjà la tête aux vacances et qu'ils ne porteront pas trop attention à ce curieux message parce que celui-ci nous rappelle surtout que Michael Ignatieff avait fait de la règle des 360 heures une condition incontournable et qu'il a finalement battu en retraite piteusement pour éviter des élections estivales.

Le chef libéral aurait pu faire tomber le gouvernement Harper sur cette question de l'accessibilité à l'assurance emploi, mais il a reculé, se contentant d'une vague promesse de M. Harper de mettre sur pied un comité bipartisan pour étudier le dossier. Dans les faits, M. Harper a été très clair: pas question d'étendre la règle des 360 heures, mais on verra ce que l'on peut faire pour les travailleurs autonomes.

Si la chose tenait tellement à coeur à Michael Ignatieff, il pouvait s'opposer, mais ne l'ayant pas fait, il est plutôt complice de la misère des 150 000 chômeurs dont il se fait aujourd'hui le défenseur.

D'autant que ce sont les précédents gouvernements libéraux (de ça, la brochure ne parle pas, évidemment) qui ont restreint l'accessibilité dans les années 90, au point où, comme le note le Parti libéral, la moitié des chômeurs ne se qualifient plus à l'assurance emploi.

Quand on vit dans une maison de verre...

Forces et faiblesses...

Hier matin, en lisant ma Presse (eh oui, je lis ENCORE le journal en papier en prenant mon café...), je ne pouvais m'empêcher de sourire en juxtaposant le texte de mon collègue Joël-Denis Bellavance à propos d'un sondage Nanos et cette brochure du PLC.

En gros, la firme Nanos a découvert qu'une majorité de Canadiens sont incapables de trouver un point fort aux conservateurs et aux libéraux.

Pas très étonnant. Côté idées fortes, vision et convictions, nous ne vivons pas des années de grands crus. Si les Canadiens n'arrivent pas à identifier la marque de commerce des deux principaux partis, c'est tout simplement parce que ceux-ci sont incapables d'en imposer une.

La brochure partisane des libéraux sur l'assurance emploi en est l'illustration parfaite. On ne peut pas dire, par ailleurs, que Michael Ignatieff se soit imposé dans quelque dossier que ce soit au cours des derniers mois.

Ce n'est pas plus concluant du côté des conservateurs. Ceux-ci souffrent même de dédoublement de personnalité. Que reste-t-il de «conservateur» chez un gouvernement qui a pondu et vanté un budget... libéral et qui a même «nationalisé» un géant de l'auto comme GM? Où sont passés les points forts de Stephen Harper lorsque les Canadiens pensent que le manque de transparence et l'arrogance font plutôt partie de la liste de ses points faibles?

Remarquez, l'absence d'idées fortes, de priorités clairement définies et de points forts ne condamnent pas nécessairement un parti à sa perte. En politique, on tire d'abord sa force de la faiblesse de notre opposition.

Voyez Jean Charest, à Québec.

On a de l'argent pour ça?

Apparemment, les fonds de tiroirs du gouvernement fédéral sont d'une profondeur abyssale et, en grattant bien, on y trouve encore quelques réserves, même en ces temps de disette.

Et même si le gouvernement est formé de conservateurs qui déchiraient leur chemise lorsque les précédents régimes libéraux dépensaient de l'argent dans des comités, des études, des commissions, des groupes d'experts...

Ainsi, le ministre des Finances, Jim Flaherty, père du plus grand déficit budgétaire jamais enregistré en ce pays, vient de trouver des sous pour créer un groupe de travail «sur la littératie financière».

Le mandat de ce groupe de travail (duquel fera partie le banquier montréalais Jacques Ménard) est de proposer des moyens d'améliorer les connaissances des Canadiens sur les produits et les services financiers et ainsi les aider à mieux gérer leurs finances, selon les informations recueillies par notre bureau d'Ottawa.

On a vraiment de l'argent pour ça dans les coffres du ministère des Finances?

Cela dit, si le fédéral a de l'argent pour faire des campagnes sur les sièges d'auto pour enfants, sur la violence aux aînés, sur la préparation des ménages en cas de catastrophe naturelle, sur la manipulation des matières dangereuses, et j'en passe, pas surprenant qu'il en ait aussi pour dire aux Canadiens comment gérer leur bas de laine.

Sur ce, je pars recharger mes batteries quelques semaines en vue des élections fédérales de l'automne. Bon été.