L'analogie ne fera rire ni les partisans du Canadien ni ceux de Jean Charest, mais il est cocasse de constater à quel point la destinée des deux semble suivre le même parcours ces temps-ci.

En novembre, le CH et Jean Charest étaient dans une forme resplendissante et en route vers la gloire. Les voilà tous deux, quatre mois plus tard, en bien fâcheuse position.

 

Dans les deux cas, même diagnostic: usure prématurée, et ce, au pire moment.

Poursuivons la comparaison: certains pensent maintenant qu'il pourrait arriver à Jean Charest la même chose qu'à Guy Carbonneau.

Vous n'avez pas la berlue. À peine 100 jours après sa réélection, on parle ouvertement de l'avenir de Jean Charest!

Du calme, du calme, nous n'en sommes pas là. Aussi mauvaise puisse être la performance du premier ministre depuis décembre, il a gagné une chose inaliénable: le droit de choisir quand et comment il partira. S'il décide de partir, ce qui, de toute façon, ne devrait pas arriver dans la première année de son troisième mandat.

Nous nous amuserons donc plus tard (c'est promis) à dresser la liste des prétendants potentiels et peut-être même à démonter cette théorie bancale envoyant Jean Charest à la tête du Parti conservateur du Canada.

Pour le moment, «première priorité», comme dirait M. Charest: le budget, dévoilé aujourd'hui à l'Assemblée nationale.

À quoi s'attendre? Pas grand-chose que vous ne savez pas déjà. Si vous avez vu si peu de fuites à propos du budget au cours des derniers jours, c'est probablement parce qu'il y a peu à dire.

Retour du déficit, donc, le seul suspense étant de savoir de combien. Et pour combien de temps, ce qui nous permettra de connaître les prévisions du gouvernement quant à une éventuelle reprise.

On parlera aussi beaucoup de travaux d'infrastructures. Comme Ottawa et Québec se sont finalement entendus sur les critères des projets admissibles, on peut s'attendre à un coup (nécessaire) d'accélérateur de la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget.

À partir de cet après-midi, ce sera la course entre les municipalités pour obtenir leur part du gâteau. Les maires de toute la province vont se bousculer comme les chasseurs d'aubaines chez Future Shop le 26 décembre.

On connaît les immenses besoins à Montréal (les transports en commun, l'échangeur Turcot, le réseau d'eau, entre autres). Juste à Laval, où le maire Gilles Vaillancourt milite depuis plus de 10 ans pour des investissements majeurs dans les infrastructures, il est question de la rénovation des usines de traitements des eaux, d'un centre de foire et d'un centre sportif.

Voilà pour le gros morceau du budget. Par ailleurs, il est possible que le gouvernement annonce aussi la création de places en garderie, mais récession oblige, cela ne suffira pas à combler tous les besoins.

Politiquement, un bon budget de relance permettrait de redonner du ressort à ce gouvernement atone. Il faudrait toutefois pour cela prendre des décisions courageuses, mais nécessaires pour la suite.

Il faudrait être capable d'expliquer aux Québécois qu'en période difficile, il est normal que tous poussent à la roue. Il faudrait pour cela être capable de parler directement aux Québécois, ce qui est, malheureusement, la principale lacune de Jean Charest.

Nous tombons ici dans le registre de ce que vous ne verrez pas dans ce budget.

Par exemple, une augmentation lente et progressive des frais dans les CPE, ce qui garantirait la pérennité du réseau tout en favorisant son expansion. L'idée de hausser la contribution parentale de 7$ par jour compte des partisans au sein du gouvernement, mais comme Jean Charest a promis le gel en campagne électorale, ainsi soit-il.

La mesure serait certes impopulaire, mais certainement pas déraisonnable. Lorsque vous déduisez l'allocation directe de 100$ par mois versée aux parents par le fédéral, la place dans un CPE revient, en réalité, à environ 2$ par jour (chaque place coûte près de 40$ par jour à Québec).

Même chose pour les droits de scolarité: serait-il à ce point déraisonnable d'annoncer une hausse progressive (au-delà de la très modeste augmentation déjà décidée par le gouvernement Charest) de façon à refléter les coûts réels de l'éducation supérieure et ainsi donner un peu d'air aux universités?

Le moment aurait été également bien choisi pour lancer un plan national contre le décrochage, comme nous l'a démontré (encore une fois!) Jacques Ménard cette semaine dans son percutant rapport sur le phénomène. Le constat de M. Ménard est accablant, mais les solutions existent. Question de courage politique, une fois de plus.

Ce rapport est probablement arrivé trop tard pour inspirer un chapitre dans le budget d'aujourd'hui.

Souhaitons seulement qu'il ne connaisse pas le même sort que l'immense majorité des rapports reçus au fil des ans par le gouvernement Charest: la tablette.

Autre épineuse question: que faire avec le CHUM, ce projet mal foutu, bancal, qui ressemble de plus en plus à un nouveau Stade olympique qu'à un nouvel hôpital?

Dans ce dossier, nous n'en sommes plus à un délai près. Alors, peut-être vaudrait-il mieux revoir sa structure financière, mise à mal par la crise économique.

L'idée d'un PPP, chère à la ministre Jérôme-Forget, n'a plus aucun intérêt à partir du moment où c'est le gouvernement qui prend les risques financiers.

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