Il n'y a pas que la douane qui accuse un problème de lenteur à l'aéroport Montréal-Trudeau. Les voyageurs doivent parfois s'armer de patience au carrousel à bagages. Et c'est très souvent le bordel au débarcadère de taxis.

Vous en avez fait l'expérience ?

Mercredi, en fin de journée, j'y suis allée, histoire de vérifier des infos que vous m'aviez transmises. Les voyageurs faisaient la queue, résignés, devant le seul débarcadère de taxis de tout l'aéroport. Une longue queue en serpentin, derrière les portes vitrées.

- Depuis combien de temps attendez-vous ?

- Vingt minutes, m'a-t-on répondu.

Vingt minutes, mercredi. Mais l'attente peut dépasser une heure, selon le moment de la journée et le jour de la semaine. Le problème, ce n'est pas juste d'avoir à attendre, au milieu d'un bordel à peine descriptible, c'est de ne pas comprendre pourquoi il faut attendre. Comment se fait-il qu'on ne puisse pas prévoir ce qui est hautement prévisible : l'arrivée des avions et de leurs passagers ? Et ajuster l'offre en fonction de la demande ?

Plus de passagers, plus de taxis. Moins de passagers, moins de taxis.

Ce serait trop simple.

Aéroports de Montréal (ADM) organise chaque année une loterie pour accorder 325 permis de taxi qui permettent aux chauffeurs de prendre des passagers à l'aéroport. Pas un de plus. Ces permis valent une petite fortune : le marché de l'aéroport est évalué à 90 millions de dollars par année. L'an dernier, 4200 chauffeurs propriétaires (sur 4438) ont sorti 40 $ de leur poche pour participer au loto taxi. Faites le calcul : ADM a fait 168 000 $ juste en frais d'inscription à son tirage.

Une fois gagné, ce permis spécial coûte 4167 $ (ce qui rapporte 1 354 000 $ à ADM). Mais il serait très souvent revendu 20 000 $ pour l'année ou loué 1000 $ par semaine. Une manoeuvre qui enrichit le propriétaire de permis et appauvrit le chauffeur.

Ah oui, j'oubliais, depuis juin, Téo Taxi, la société de taxis électriques d'Alexandre Taillefer, a le droit d'avoir 12 voitures à l'aéroport. Des Tesla. Le contraste est frappant avec le parc de taxis traditionnels. Des chauffeurs en uniforme, des voitures impeccables, un service quatre étoiles. Vous devez commander votre voiture sur l'application Android ou iPhone et l'attendre à l'étage des départs, porte 9.

Mais les chauffeurs dénoncent cette entente d'une durée de 18 mois qu'ils jugent déloyale. Téo Taxi a obtenu ses 12 places sans tirage au sort et sans payer 4167 $ par place. Elle verse une indemnité par course à ADM, dont on ignore le montant.

Une autre aberration du système actuel, c'est que les chauffeurs de taxi qui déposent des passagers à l'aéroport doivent retourner à Montréal sans client et que les détenteurs de permis spécial reviennent du centre-ville sans passager. Une incroyable perte de temps et d'argent.

Et pourquoi n'y a-t-il qu'un seul débarcadère à l'aéroport ? On aurait tout avantage à les multiplier pour accélérer le service. Au lieu de quoi on se retrouve avec un énorme bouchon, un goulot d'étranglement.

On l'a dit, mais il faut le redire : ce premier contact des touristes avec la ville nuit à l'image de Montréal.

Et même si l'article 115 du Règlement sur le transport par taxi stipule que les chauffeurs doivent porter un pantalon ou une jupe de couleur noire, une chemise blanche ou un polo avec des manches, sous peine d'une amende de 125 à 375 $, ils ne le font pas. Plusieurs portent des jeans, des chemises de toutes les couleurs et même des shorts.

Le Bureau du taxi, à qui j'ai posé la question hier, affirme avoir donné 300 avertissements et 30 contraventions depuis l'entrée en vigueur du règlement, en janvier. « Il y a 10 563 chauffeurs de taxi à Montréal et seulement 14 inspecteurs », m'a dit la porte-parole, Marie-Hélène Giguère.

Comptez-vous chanceux si l'on vous aide à mettre vos bagages dans le coffre. Et n'espérez pas, en plus, qu'on vous ouvre la portière.

En attendant, ADM a annulé son tirage au sort annuel en juillet et prolongé de six mois les permis existants, qui prendront fin le 30 avril 2017 plutôt que le 30 octobre prochain.

Un plan de réorganisation est-il en marche ? On le souhaite parce qu'il y a des limites à attendre. Encore plus, quand on ne comprend pas pourquoi.