«Je vous prie de bien vouloir m'excuser pour cette intrusion. Vous avez bien raison de vous méfier, vous ne me connaissez pas et je ne vous connais pas.»

Ça y est : encore une autre de ces lettres du Nigeria qui encombre ma boîte de courriels. Pas de quoi écrire à ma mère. Eh bien non ! Cette fois, le courriel vient de Mme Perron, 4527, rue Berri à Montréal. Oui, oui, une Canadienne pure laine qui réside en plein coeur du Plateau Mont-Royal. Ça, c'est du jamais-vu !

« Mon mari et moi exerçait [sic] dans le négoce de pétrole brut, de métaux et de minéraux. Malheureusement il y'a eu un accident tragique [re-sic] qui s'est déroulé en 2001 aux États-Unis, qui avait fait 265 morts, j'ai perdu mon mari et son fils dans à un crash d'avion d'un Airbus. Après sa mort j'ai du cédé [re-re-sic] sa participation majoritaire de sa société à ses cadres... »

L'auteure qui se dit en phase terminale d'un cancer veut me faire part de ses dernières volontés. À moi... et à tous mes voisins de bureau qui ont reçu le même courriel cette semaine.

Le scénario ressemble en tous points à celui des fameuses lettres du Nigeria et autres arnaques de l'héritage. Un grand classique.

Les escrocs se disent de riches héritiers qui veulent mettre leur fortune à l'abri. Pour transférer l'argent au Canada, ils ont besoin d'un intermédiaire qu'ils sont prêts à payer grassement. Si vous mordez à l'hameçon, ils vous demanderont de l'argent pour enclencher les démarches. Puis, ils vous raconteront toutes sortes d'histoires incroyables pour que vous allongiez encore plus d'argent.

Je suis vraiment abasourdie de voir que cette arnaque continue de faire des ravages même si elle est connue depuis au moins 20 ans. Depuis le début de l'année 2014, le Centre antifraude a reçu pas moins de 1177 plaintes de Canadiens, incluant 145 victimes qui ont perdu 2,6 millions. Cela fait pratiquement 18 000 $ par personne. Aïe !

Et il ne s'agit que de la pointe de l'iceberg, car le Centre antifraude estime que seulement 5 % des victimes portent plainte.

Et puis d'autres types de fraudes causent encore plus de dommages que les lettres du Nigeria. Voici le top 5 des escroqueries les plus « à la mode » depuis le début de 2014.

La fraude par transfert de fonds

> 250 plaintes

> 105 victimes

> 20,7 millions de pertes

La fraude par transfert de fonds vise davantage les entreprises, ce qui explique les pertes particulièrement élevées (197 000 $ par victime).

Les fraudeurs s'y prennent de toutes sortes de manières pour qu'une entreprise lui transfère des fonds par erreur. Parfois, ils se fabriquent une adresse courriel pratiquement identique à celle du patron d'une entreprise et l'utilisent pour demander au comptable d'envoyer des fonds dans leur compte.

Certains demandent par courriel à la banque ou au courtier de la victime de lui transférer de l'argent. Si le conseiller financier ne vérifie pas l'identité... Pouf ! l'argent disparaît à l'étranger.

D'autres escrocs vont même jusqu'à pirater le courriel du fournisseur étranger d'une entreprise. Les pirates informent ensuite l'entreprise que le compte bancaire a changé, afin de s'approprier les paiements que l'entreprise doit faire à son fournisseur.

La fraude à l'eau de rose

> 1270 plaintes

> 880 victimes

> 12,1 millions de pertes

Vous rencontrez la flamme de votre vie sur l'internet. Sur sa photo, l'homme ou la femme est magnifique. Il vous chante la pomme. Se dit prêt à venir vous voir au Canada. Vous demande de payer son billet d'avion, car il est fauché. Zut ! il se casse une jambe et a besoin d'une autre somme pour les soins de santé... et ainsi de suite jusqu'à ce que vous réalisiez que la belle photo est un leurre et qu'un réseau de fraudeurs se cache derrière.

Vous avez gagné un prix

> 3484 plaintes

> 554 victimes

> 4 millions de pertes

Félicitations : vous avez gagné une auto ! Ou peut-être une croisière ? Mais pour récupérer votre prix, il vaudra verser un peu d'argent. Et encore et encore...

La fraude d'investissement

> 147 plaintes

> 112 victimes

> 3,7 millions de pertes

On vous offre des rendements astronomiques, totalement garantis et à l'abri de l'impôt par-dessus le marché. Trop beau pour être vrai. Mais certains épargnants ne peuvent résister à l'appât du gain. Depuis le début de l'année, 112 victimes ont été dépouillées de 3,7 millions, environ 33 000 $ par personne.

La fraude de marchandise

> 2929 plaintes

> 1635 victimes

> 2,6 millions de pertes

Les escrocs développent un faux site web qui ressemble à s'y méprendre à celui d'un détaillant connu. Les consommateurs piégés envoient de l'argent pensant acheter un manteau, des vêtements de sport ou toute autre marchandise.

D'autres internautes se font aussi berner sur les sites web de petites annonces. Certains expédient un bien à un fraudeur qui ne les paiera jamais. D'autres paient pour un produit qui n'existe pas.

Si vous êtes victimes d'une fraude, n'hésitez pas à la dénoncer, ce que trop peu de victimes font. Cela ne vous ramènera probablement pas votre argent, mais votre geste permettra peut-être de freiner les bandits, d'alerter la population et d'éviter que d'autres personnes tombent dans le panneau.

Pour contacter le Centre antifraude >>

Si vous avez reçu un courriel malveillant, vous devriez aussi informer le Centre de notification des pourriels. Depuis l'été dernier, la loi antipourriel interdit d'envoyer des messages électroniques sans la permission du destinataire.

Au début d'octobre, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) est justement intervenu pour stopper l'envoi de pourriels malveillants en provenance d'une petite entreprise de la Saskatchewan.

Le serveur de la PME qui avait été infecté par un maliciel aurait envoyé près de 100 millions de pourriels, en juin et en juillet seulement, complètement à l'insu du propriétaire de l'entreprise.

Contactez le Centre de notification des pourriels >>

Transférez un pourriel à l'adresse suivante : pourriel@combattrelepourriel.gc.ca