C'est aujourd'hui, 1er mai, qu'entrent en vigueur les nouvelles règles fédérales sur les cartes prépayées. Mais l'offensive d'Ottawa est loin de révolutionner cette industrie qui a déjà reçu un bon coup de balai en 2010.

L'Office de la protection du consommateur (OPC) avait alors réglementé les cartes prépayées en interdisant les dates d'expiration et les frais cachés qui privaient les consommateurs de leur argent. Un grand ménage très bénéfique.

Mais Québec avait préféré ne pas trop se mêler des cartes prépayées émises par les institutions financières (American Express, Visa, MasterCard) qui imposent pourtant des frais très salés. C'est précisément ce type de cartes qu'Ottawa va maintenant encadrer, mais avec des règles beaucoup plus timides que celles de Québec.

C'est trop peu, trop tard, selon Option consommateurs, qui réclame depuis plus de cinq ans un cadre réglementaire harmonisé pour l'ensemble des moyens de paiements électroniques: crédit, débit, cellulaire, prépayé, textos, alouette! «Les consommateurs ont droit à des règles équivalentes, peu importe le mode de paiement», martèle Me Alexandre Plourde.

Mieux que rien

Les nouvelles règles fédérales vont quand même aider les consommateurs à y voir plus clair dans l'univers des cartes prépayées d'institutions financières. Désormais, les frais doivent être divulgués en langage simple et clair dans un encadré informatif figurant bien en évidence sur l'emballage du produit.

Prenez les cartes Vanilla qui portent la mention sournoise «Aucuns frais après l'achat». Pour se conformer aux règles, on a collé au verso de la carte un encadré qui précise quels sont les frais d'activation.

Pour la transparence, il s'agit d'un grand pas en avant. Maintenant, les consommateurs verront que les frais d'activation (souvent de 4 à 15$, selon la carte) peuvent gruger 10% de leur argent avant même qu'ils aient utilisé la carte. Pas fameux.

Mon conseil: si vous pensez offrir ce genre de carte-cadeau prépayée à votre grand ado de neveu, mettez-lui donc un beau billet de 50$ flambant neuf dans une enveloppe à la place; il en aura plus pour son argent.

Autre avancée: les dates d'expiration sont maintenant interdites. La règle s'applique pour toutes les cartes en circulation, pourvu que la date d'expiration soit après le 1er mai.

Malheureusement, les frais sont là pour de bon. Il est vrai qu'Ottawa a interdit les frais de tenue de compte, mais seulement sur certaines cartes et seulement pour la première année.

Mais rien n'interdit les frais d'activation, les frais d'utilisation, les frais de recharge, les frais lorsque vous appelez au service à la clientèle et tous les autres frais qu'une banque peut inventer avec un minimum d'imagination.

Tout cela fait en sorte que l'utilisation d'une carte prépayée coûte beaucoup cher que celle d'une carte de crédit, ce qui est absurde puisqu'il ne s'agit pas d'argent prêté, mais bien de l'argent que le consommateur a lui-même versé sur la carte, dénonce l'Union des consommateurs.

Tout un méli-mélo

Voici les détails pour démêler les règles de Québec et d'Ottawa sur les cartes prépayées:

- Cartes d'institutions financières non rechargeables: Les dates d'expiration sont interdites. Les institutions n'ont plus le droit d'imposer des frais de tenue de compte, aussi appelés frais mensuels ou frais d'inactivité, pendant les 12 premiers mois suivant l'activation.

- Cartes d'institutions financières rechargeables: Les dates d'expiration sont interdites, mais il n'y a aucune restriction quant aux frais, dans la mesure où les clients sont bien informés.

- Cartes émises par un commerçant: En vertu de la Loi sur la protection du consommateur (LPC), les dates d'expiration sont interdites sur les cartes-cadeaux, les chèques-cadeaux et les cartes prépayées et les cartes d'appels interurbains. Tous les frais qui peuvent gruger le montant sont aussi interdits, et les commerçants doivent rendre la monnaie lorsqu'il reste un solde de 5$ ou moins (sauf exception).

- Cartes multi-enseignes: En vertu d'une exception à la LPC, les cartes qu'on peut utiliser chez plusieurs commerçants (ex.: cartes émises par un centre commercial) peuvent prélever soit des frais d'activation (3,50$ max.), soit des frais d'inutilisation (max. 2,50$ par mois, ne pouvant être réclamés avant le 15e mois, et même le 18e mois si le consommateur en fait la demande). Mais ces frais doivent être divulgués au verso de la carte.

- Cartes prépayées de téléphonie mobile: Elles sont exclues de certaines dispositions de la LPC. Ainsi, ces cartes peuvent avoir une date d'expiration et elles n'ont pas à rembourser le solde minimal.

- Les cartes associées à un service: lorsque la carte peut être échangée contre un service (ex.: un massage de 60 minutes) plutôt qu'un montant d'argent, elle peut indiquer une date après laquelle le consommateur devra payer un surplus si la valeur du service a augmenté. Par exemple, si le prix du massage passe de 70 à 75$, le commerçant pourrait réclamer un extra de 5$.

- Les cartes promotionnelles: Les cartes offertes gratuitement par un commerçant ne sont pas visées par les nouvelles règles fédérales ni par celles de l'OPC. Conseil: si un commerçant vous offre une carte-cadeau dans le cadre d'une promotion ou d'un programme de récompenses, dépêchez-vous de l'utiliser!