Les familles peuvent critiquer Pauline Marois qui vient de renier sa promesse électorale, mais l'indexation du tarif des garderies à 7 $ reste une mesure tout à fait sensée.

Dans son budget déposé jeudi, le ministre des Finances Nicolas Marceau a annoncé que le tarif des garderies subventionnées passera à 8 $ par jour à partir de septembre prochain, puis à 9 $ l'année suivante, pour être ensuite indexé à l'inflation.

Tant mieux! Si cela avait été le cas dès le lancement du réseau en 1997, on aurait évité les hausses subites et les psychodrames à répétition.

«Il vaut mieux une petite hausse de 2 % par année, qu'un rattrapage de 28 % sur deux ans», comme le disait Stéphane Leblanc, fiscaliste associé chez EY, lors du huis clos à Québec.

Pour les parents qui ont un enfant à la garderie, le passage du tarif à 8 $ et à 9 $ se traduira par une augmentation de 260$ l'an prochain et de 520 $ l'année suivante. Mais en réalité, la hausse sera un peu moins salée, car les frais de garde donnent droit à une déduction d'impôt fédérale qui permet de réduire la facture de 12,5 % à 24 %.

À terme, ces changements coûteront tout de même 125 millions par année aux parents des 250 000 tout-petits qui fréquenteront la garderie subventionnée lorsque le réseau sera complété dans deux ans.

Et cette facture ne tient pas compte des 200 000 écoliers inscrits à un service de garde à 7 $ en milieu scolaire qui sont aussi visés par la hausse.

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Bien des parents en voudront à Pauline Marois qui leur avait promis le gel du tarif à 7 $ jusqu'à la fin de son mandat. Voilà qu'elle annonce une augmentation, alors que son mandat n'est pas terminé... quoique le dépôt du budget ressemblait beaucoup au lancement d'une campagne électorale.

Les péquistes avaient aussi promis le gel jusqu'à ce que le réseau des garderies soit complété. Or, le réseau n'atteindra sa maturité qu'en 2016-2017, si on parvient à ajouter 30 000 places comme prévu, ce qui est loin d'être acquis. N'empêche, cela permet au gouvernement de jouer sur les mots. «On va arriver à l'indexation au moment où le réseau sera complété. C'est raisonnable», s'est défendu Nicolas Marceau, jeudi.

Avec le dégel, les péquistes se donnent aussi le beau rôle puisqu'ils acceptent les recommandations d'un comité qui vient de conclure qu'une hausse de la contribution parentale était nécessaire. Mais il faut dire que le PQ avait mis en place ce comité après avoir imposé des compressions aux garderies l'an dernier.

Alors, pour les associations de garderies qui participaient à ce chantier, la hausse de la contribution parentale était la planche de salut permettant d'espérer des augmentations de salaire, dans un contexte où le gouvernement doit limiter ses dépenses pour atteindre l'équilibre budgétaire.

De leur côté, les partis de l'opposition n'ont pas manqué de s'en prendre à la hausse du tarif à 9 $.

Trop rapide, trop soudaine au goût des libéraux. «C'est un choc tarifaire important, a décrié Philippe Couillard. Je vous annonce que pour nous, la politique sera celle de l'indexation», a dit le chef du Parti libéral.

Mais faut-il rappeler que ce sont les libéraux qui ont haussé le tarif de 5 à 7 $ d'un coup sec en 2004? Partant de 5 $, cette hausse était beaucoup plus costaude que celle du PQ qui constitue essentiellement un rattrapage de l'inflation depuis que le tarif est gelé à 7 $ en 2004.

Mais quand on remonte jusqu'à la création du réseau en 1997, on réalise que la hausse du prix des garderies a dépassé l'inflation. Si Québec s'était contenté d'indexer le tarif de 5 $, la garderie coûterait 6,80 $ par jour en 2014.

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Même si les parents doivent payer 9 $, les garderies subventionnées resteront un choix avantageux pour la plupart des couples, comme le démontrent nos tableaux préparés par EY.

Par contre, plusieurs familles monoparentales auront avantage à envoyer leurs enfants dans une garderie non subventionnée, si elles peuvent en dénicher une à 35 $ par jour. En réalité, cette garderie leur coûtera seulement 5,50 $ par jour, en tenant compte de la fiscalité (déduction et crédit d'impôt, soutien aux enfants, prestation fiscale canadienne pour enfant, etc.).

Un pensez-y-bien pour les parents qui peinent à trouver une place en garderie subventionnée...

Tarif quotidien en tenant compte de la fiscalité

FAMILLE MONOPARENTALE AVEC DEUX ENFANTS

[Revenus de travail familial : Subventionné (Frais de 9 $ par jour) Coût net | Non subventionné (Frais de 30 $ par jour) Coût net | Non subventionné (Frais de 35 $ par jour) Coût net]

30 000 $ : 7,87 $ | 5,59 $ | 7,13 $

50 000 $ : 7,37 $ | 5,54 $ | 7,48 $

70 000 $ : 7,37 $ | 7,99 $ | 10,22 $

Hypothèses: Illustration à partir du 1er septembre 2015. Les enfants sont âgés de moins de 7 ans. Montants calculés selon les taux d'imposition de 2013 pour une famille résidant au Québec. Le revenu provient d'un emploi.

FAMILLE MONOPARENTALE AVEC DEUX ENFANTS

[Revenus de travail familial : Subventionné (Frais de 9 $ par jour) Coût net | Non subventionné (Frais de 30 $ par jour) Coût net | Non subventionné (Frais de 35 $ par jour) Coût net]

60 000 $ : 7,87 $ | 9,04 $ | 11,27 $

80 000 $ : 7,87 $ | 9,04 $ | 11,27 $

140 000 $ : 7,37 $ | 12,91 $ | 15,78 $

Hypothèses: Illustration à partir du 1er septembre 2015. Les enfants sont âgés du moins de 7 ans. Montants calculés selon les taux d'imposition de 2013 pour une famille résidant au Québec. Les revenus proviennent d'un emploi. La répartition du revenu entre les conjoints est de 50 % - 50 %.