La retraite en a pris pour son rhume depuis 10 ans. Les Québécois, qui étaient les champions de la retraite anticipée, constatent aujourd'hui qu'ils vont devoir travailler pas mal plus longtemps, comme en témoigne un nouveau sondage dévoilé ce matin par Question Retraite pour lancer le mois de la planification de la retraite.

Depuis 10 ans, les Québécois ont repoussé de deux ans et demi l'âge prévu de leur retraite, qui est passé d'environ 60 ans en 2003 à 62 ans et demi en 2013, révèle le sondage réalisé par SOM en collaboration avec la Régie des rentes du Québec (RRQ).

Désormais, la moitié des Québécois (49%) pensent attendre à 65 ans ou plus tard avant de prendre leur retraite contre seulement le tiers (32%) en 2003. Parmi ceux qui pensent quitter plus tard le marché du travail, on retrouve une plus forte proportion de gens qui sont nés à l'extérieur du Canada, de travailleurs à revenus modestes (de 20 000 à 40 000$) et d'employés de PME.

À l'inverse, la retraite anticipée perd du terrain. En 2003, le tiers des Québécois (34%) rêvait de partir avant 60 ans. Aujourd'hui, seul 1 travailleur sur 7 (14%) a encore cet objectif en tête. Il s'agit le plus souvent de fonctionnaires et d'employés qui comptent sur le régime de retraite de leur employeur pour assurer leurs vieux jours.

Voilà une preuve de plus que le système de retraite fonctionne à deux vitesses au Québec. Une retraite rapide et sans tracas pour les chanceux (de plus en plus rares) qui bénéficient d'un bon régime de retraite ; une retraite tardive et incertaine pour les autres... à moins d'avoir commencé à épargner très jeune.

C'est le message que répète sans relâche Question Retraite. Depuis sa création il y a 10 ans, l'organisme fait la promotion de la planification de la retraite chez les jeunes de 25 à 45 ans. «Le message est passé: les gens sont plus conscientisés. Mais ils ne savent pas encore comment faire pour y arriver. Ils ne passent pas à l'action», déplore la présidente de Question Retraite, Jocelyne Houle-LeSarge.

«Il faut se prendre en main, insiste-t-elle. Quand on veut prendre des vacances, on met de l'argent de côté. On n'attend pas de gagner à la loto. Pour la retraite, c'est la même chose.» Autrement, il n'y aura pas de miracle. Il vous faudra prendre votre retraite plus tard.

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Et ne comptez pas sur votre employeur pour vous indiquer la sortie. Avec la baisse de la population active, les entreprises sont plus désireuses de garder leurs travailleurs âgés dans leurs rangs, du moins dans les secteurs où la pénurie de main-d'oeuvre est plus criante.

Ainsi, la majorité (54%) des jeunes retraités sont partis à la retraite de leur plein gré (contre seulement 40% en 2003). Ils sont beaucoup moins nombreux à s'être fait montrer la porte par leur patron (17% en 2013 contre 27% en 2003). Tant mieux! Cette baisse marquée découle surtout de la disparition des indemnités de départ offertes par les employeurs (nommées par seulement 2% des jeunes retraités contre 11% en 2003).

De leur côté, les gouvernements encouragent aussi les travailleurs à rester plus longtemps au boulot avec la carotte et le bâton.

En 2012, Ottawa a annoncé le report de 2 ans de l'âge d'admissibilité à la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV), qui passera graduellement de 65 ans à 67 ans entre 2023 et 2029. Ce n'est pas pour tout de suite, mais il faudra s'y faire.

Mais une autre mesure pour encourager les gens à reporter leur retraite est déjà en place. Depuis juillet, les Canadiens peuvent différer le paiement de leur PSV. Pour chaque mois d'attente, la pension est bonifiée de 0,6% jusqu'à concurrence de 36% pour ceux qui attendent jusqu'à 70 ans pour toucher leur PSV.

La RRQ a aussi augmenté sa bonification pour les Québécois qui attendent après 65 ans pour demander leur rente. Depuis janvier dernier, sa rente peut être bonifiée de 42% pour ceux qui patientent jusqu'à 70 ans, au lieu de 30% auparavant.

La RRQ sortira le bâton en 2014. Elle pénalisera davantage les travailleurs qui optent pour une retraite anticipée. Présentement, la rente est réduite de 0,5% pour chaque mois précédant 65 ans, soit une pénalité de 6% par année. À partir de janvier, cette pénalité augmentera à 0,6%, soit 7,2% par année, jusqu'à concurrence de 36% pour ceux qui la demandent dès 60 ans.

Mais en même temps, la RRQ facilitera la retraite progressive. Les Québécois pourront recevoir leur rente, dès l'âge de 60 ans, tout en continuant de travailler à temps plein ou à temps partiel. Les conditions actuelles seront éliminées. Une solution mitoyenne pour ceux qui veulent prendre une retraite à temps partiel.

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LE PORTRAIT DE LA RETRAITE DEPUIS 10 ANS

> La moitié des Québécois (49%) pensent attendre à 65 ans ou plus tard avant de prendre leur retraite contre seulement le tiers (32%) en 2003.

> Depuis 10 ans, les Québécois ont repoussé de 2 ans et demi l'âge prévu de leur retraite, qui est passé d'environ 60 ans en 2003 à 62 ans et demi en 2013.

> La préretraite perd du terrain. En 2003, le tiers des Québécois (34%) rêvait de partir avant 60 ans. Aujourd'hui, seul 1 travailleur sur 7 (14%) a cet objectif.

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