Chers professeurs, j'aimerais vous aviser que mes enfants vont rater la dernière journée d'école. Comme des milliers d'autres élèves du primaire et du secondaire de la Commission scolaire de Montréal (CSDM), ils seront absents mardi prochain, le 25 juin. Une journée qui n'aurait jamais dû avoir lieu.

De mémoire, c'est la première fois que les classes se terminent après la fête de la Saint-Jean-Baptiste. Cette année, la CSDM n'a pas réussi à s'entendre avec le syndicat des professeurs pour récupérer à un moment plus judicieux la journée perdue en raison des élections du 4 septembre dernier.

À cause de ces enfantillages de grandes personnes, tout le monde est perdant.

La journée du 25 juin embête tout le monde, à commencer par les élèves et leurs parents qui ont déjà fait d'autres plans pour la première semaine des vacances scolaires.

Je sais, les écoles seront compréhensives, comme en témoigne une note sur le site web de la CSDM. «Bien sûr, nous comprendrons l'absence des enfants dont les parents auraient prévu d'autres activités le 25 juin, comme un camp de jour, un service de garde, un voyage ou autre.»

À lire cette note, les parents comprennent aussi que les professeurs aimeraient autant que leur classe soit vide. Voulez-vous bien me dire ce que les élèves vont apprendre le 25 juin? Les plus jeunes font déjà la kermesse depuis une semaine. Les plus vieux ont terminé leurs examens. Et les finissants ont déjà eu leur bal. Je les vois mal revenir à l'école mardi!

Malgré tout, certains enfants seront là. Et même si un seul est présent, l'école doit prévoir tous les services habituels, y compris le service de garde et le transport scolaire.

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La CSDM, qui accuse un déficit historique de 45 millions de dollars, assure que la journée du 25 juin n'occasionnera aucuns frais supplémentaires. Les services de garde sont financés par les parents (certains risquent de payer pour le 25, même si leur enfant est absent). Et les contrats de transport scolaire se terminent toujours le 30 juin, d'une manière ou d'une autre.

Mais les sociétés de transport devront garder les chauffeurs jusqu'au 25 juin. Cela signifie qu'elles devront les payer pour la journée du 24, même s'il n'y a pas de classe, et pour la journée du 25 juin, même s'il n'y a qu'un seul enfant qui grimpe à bord de l'autobus jaune avec sa boîte à lunch pour aller à la «vraie» dernière journée d'école.

Normalement, les chauffeurs auraient été mis à pied le vendredi 21 juin, juste avant le long week-end de la Saint-Jean. Vous pensez qu'ils sont contents de travailler un peu plus longtemps? Même pas! Pour plusieurs, ces deux jours de travail repousseront d'une semaine le début des prestations d'assurance-emploi.

Je vous le répète, cette journée du 25 juin embête tout le monde. Tout ça à cause des chicanes entre la CSDM et l'Alliance des professeures et professeurs de Montréal.

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Voici la petite histoire. Lors du renouvellement de la dernière convention collective des professeurs, la CSDM a apporté des modifications au calendrier scolaire qui doit obligatoirement compter 180 jours d'école. Désormais, lorsque les cours sont annulés à cause d'un événement spécial, la journée est reportée au 25 juin.

Durant les négociations, l'Alliance avait indiqué que c'était une idée étrange. Mais les professeurs ont quand même signé la convention qui leur accordait 2 journées pédagogiques additionnelles, pour un total de 20 journées par an, comme dans les autres commissions scolaires de la province.

Cette année, on savait qu'il y aurait de l'école le 25 juin, en raison des élections. La CSDM a proposé aux professeurs de modifier la convention pour annuler une journée pédagogique. Il a été question du 30 novembre et du 26 avril.

Or, la CSDM prétend que l'Alliance a rejeté les propositions faites dès le 11 septembre. De son côté, l'Alliance raconte que la CSDM n'a pas voulu négocier avant le mois de février. Rendu là, il était trop tard. Ça ne laissait pas assez de choix aux professeurs.

OK, il restait moins de choix. Mais il y avait encore des solutions. À la mi-février, la CSDM avait même conclu une entente de principe avec le président de l'Alliance qui a quitté ses fonctions par la suite. Mais les professeurs ont voté contre.

En réalité, les professeurs sont à couteaux tirés avec la CSDM. Notamment, ils ne digèrent pas qu'elle ait utilisé des fonds destinés à leur perfectionnement pour financer d'autres projets.

On peut imaginer que les professeurs, voyant l'employeur forcé d'ouvrir la convention, espéraient obtenir certaines concessions. Mais l'Alliance jure qu'elle n'a pas utilisé le 25 juin comme monnaie d'échange ni comme moyen de pression.

N'empêche, les parents ont quand même le sentiment que la convention collective est passée avant les élèves et le gros bon sens.