Non, rien n'a changé pour les conjoints de fait. Mais en braquant les projecteurs sur les couples qui vivent en union libre, la saga de Lola et d'Éric a quand même permis aux conjoints de fait de prendre conscience des risques et périls de leur statut matrimonial. Pour cela, on peut dire merci à Lola. Je lui donne A" pour ses efforts pédagogiques auprès des Québécois!

Bien sûr, Lola a perdu sur toute la ligne. Vendredi dernier, la Cour suprême a déterminé que les conjoints de fait n'ont pas à partager leurs biens en cas de rupture, ni même à verser une pension alimentaire à leur ex, comme l'avait décidé la Cour d'appel du Québec, en 2010.

Désormais, la situation a le mérite d'être claire: les conjoints de fait ne sont pas reconnus en vertu du Code civil. Ils n'ont ni droits ni obligations envers l'autre. Tenez-vous-le pour dit. En cas de séparation ou en cas de décès, c'est comme si votre conjoint de fait n'avait jamais existé.

Même si la loi sur le patrimoine familial ne s'est jamais appliquée aux conjoints de fait, certains ont pu avoir la fausse impression qu'ils étaient considérés au même titre que des couples mariés. Il faut dire que presque toutes les autres lois du Québec leur accordent les mêmes droits, même si la définition de conjoint de fait n'est pas uniforme.

Pour le programme de Soutien aux enfants, par exemple, vous devenez conjoint de fait après un an de vie commune (ou dès qu'il y a un enfant), tandis que pour la Régie des rentes du Québec (RRQ), les conjoints de fait doivent avoir vécu trois ans ensemble (un an lorsqu'ils ont un enfant). Mais attention, pour que votre conjoint de fait soit reconnu à la RRQ, il ne faut pas que vous soyez encore marié à quelqu'un d'autre!

Ces règles disparates ont pu semer la confusion dans le passé. Et les définitions mériteraient d'être uniformisées.

N'empêche que maintenant, les couples ne peuvent plus se mettre la tête dans le sable. La saga ultramédiatisée de Lola et d'Éric a réveillé les conjoints de fait sur les dangers qui les guettent.

Alors, prenez vos choses en main! C'est à chaque couple vivant en union libre d'établir ses propres règles pour éviter la zizanie en cas de rupture ou de décès.

Imaginons un scénario catastrophe... Patrice tombe amoureux de Judith et décide d'emménager dans la maison qu'elle a achetée il y a quelques années. Elle continue de rembourser son hypothèque toute seule, tandis que Patrice s'occupe des autres dépenses courantes.

Ça part mal! En cas de séparation, Judith sera propriétaire de 100% de sa maison et Patrice se retrouvera sans rien sur le trottoir.

Mais continuons le film... Après quelques années, le couple a trois enfants. Pour se donner une meilleure qualité de vie familiale, Patrice décide d'abandonner son emploi, tandis que Judith met la pédale au fond dans sa carrière. Et ils n'ont toujours aucun document légal pour se protéger. Ni eux-mêmes. Ni leurs enfants.

Grave erreur. En cas de rupture, Patrice n'aura droit à aucune pension alimentaire, même s'il a mis sa carrière en veilleuse durant de longues années et qu'il ne réussit jamais à retrouver un emploi aussi bien rémunéré que celui qu'il occupait avant de rencontrer Judith.

Pourtant, le couple aurait pu éviter ces iniquités en rédigeant un contrat de vie commune, dès le début de leur relation. Avec ce document, les conjoints de fait peuvent faire un «copier-coller» des règles du patrimoine familial, comme ils peuvent dessiner leur propre régime matrimonial sur mesure.

Pour les conjoints de fait qui arrêtent de travailler afin de s'occuper de leur famille, le contrat de vie commune est un incontournable.

Mais revenons à Judith et Patrice. Disons que leur histoire se termine vraiment mal. Judith meurt dans un accident d'auto... sans laisser de testament.

À titre de conjoint de fait, Patrice n'est pas reconnu comme héritier légal par le Code civil. Il n'a droit à rien. Ce sont ses enfants qui vont hériter, ce qui pose un problème puisqu'ils sont mineurs. En plus, ils devront payer l'impôt sur la succession, car le roulement des actifs à l'abri du fisc est possible uniquement entre conjoints.

D'où la nécessité de faire un testament et un mandat en cas d'inaptitude. Et ici, la recommandation vaut pour tous les couples, mariés ou pas. Si vous avez des enfants, faites un testament, ça presse!