Au début de décembre, Daniel Olivier veut acheter une carte GPS de la France en prévision d'un voyage. En tapant sur Google le modèle de son appareil, un GPS MIO C220, il repère rapidement un site web où l'on offre la carte appropriée.

Mais c'est un piège. Au lieu d'obtenir la carte, M. Olivier se retrouve avec un abonnement à trois sites porno: Megadownloadpass, Bookmark et Discount Video Pass.Les trois sites, qui ont le même centre de service à la clientèle, lui facturent sur-le-champ une dizaine de dollars sur sa carte de crédit. Par la suite, les abonnements lui coûteront près de 90$ par mois, lui précise-t-on dans trois confirmations électroniques.

Réalisant l'arnaque, M. Olivier appelle l'émetteur de sa carte de crédit, la Banque Nationale. À sa grande surprise, le préposé lui répond de joindre les responsables du site web pour réclamer l'annulation du contrat. M. Olivier parle à un superviseur et obtient la même réponse.

«Je trouve cette demande pour le moins paradoxale: d'un côté, MasterCard demande aux détenteurs de cartes de protéger leurs renseignements personnels, et de l'autre on me demande de joindre ces fraudeurs», s'exclame M. Olivier.

À quoi bon tenter de négocier avec des fraudeurs? D'autres internautes lésés ne sont parvenus à rien de cette façon, comme en témoignent de nombreuses plaintes déposées sur des sites web de consommateurs. Des exemples:

- «Si vous les appelez, vous n'aurez jamais de réponse. J'aimerais savoir qui peut les punir.»

- «C'est une vraie arnaque. J'ai mis je ne sais combien de temps à résilier les comptes et j'espère sincèrement que ça a fonctionné.»

M. Olivier ne comprend pas pourquoi la banque n'accède pas à sa requête tout de go. Pourtant, la politique de «responsabilité zéro de MasterCard» est censée libérer les clients «de toute responsabilité en cas d'achat non autorisé».

De surcroît, les nouvelles dispositions de la Loi sur la protection du consommateur (LPC) prévoient qu'un détenteur de carte de crédit peut exiger de l'émetteur de sa carte une «rétrofacturation» dans la mesure où il ne reçoit pas le produit acheté lors d'une vente à distance (internet, téléphone, etc.).

Clairement, M. Olivier n'a pas reçu le produit commandé et il n'a jamais autorisé les trois abonnements. Alors, pourquoi tant de chichi pour le remboursement?

«Pourquoi le client doit-il rappeler le commerçant? C'est la règle de MasterCard et nous devons la suivre», a expliqué à La Presse Affaires la porte-parole de la Banque Nationale, Marie-Claude Lavigne. Et les nouveaux articles de la LPC précisent que le consommateur lésé doit d'abord exiger du commerçant l'annulation du contrat, ajoute Mme Lavigne.

Après avoir reçu l'avis, le commerçant dispose de 15 jours pour rembourser le consommateur. S'il refuse, «le consommateur qui a effectué le paiement au moyen d'une carte de crédit peut, dans les 60 jours suivant, demander à l'émetteur de cette carte la rétrofacturation», dit la loi. Par la suite, l'émetteur dispose de 30 jours pour accuser réception et de 90 jours pour rembourser.

Voilà donc pourquoi la Banque insistait tant pour que M. Olivier entre en contact avec le supposé commerçant. Pas tant pour négocier avec lui, mais plutôt pour annuler le contrat en bonne et due forme.

Or, M. Olivier a coupé court à ces formalités. Pour se débarrasser des fraudeurs, il a exigé une nouvelle carte de crédit.

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La situation

Une fraude sur une carte de crédit lors d'un achat truqué dans l'internet.

Le hic

La Banque Nationale veut que son client s'arrange avec les fraudeurs.

«D'un côté, MasterCard demande aux détenteurs de cartes de protéger leurs renseignements personnels, et de l'autre on me demande de joindre ces fraudeurs.» - Daniel Olivier

Au bout du compte

La banque veut que son client annule son contrat avec le commerçant avant de procéder à la rétrofacturation, comme le prévoit la Loi sur la protection du consommateur.