Le 1608 n'a pas un an de vie et déjà, il est si populaire que des fromagers de Charlevoix cherchent de nouveaux producteurs laitiers qui seraient intéressés à s'installer près de chez eux avec un petit troupeau de vaches canadiennes.

Le 1608 est ce fameux fromage de la laiterie Charlevoix, lancé à l'automne. On en avait fait grand cas car au-delà du fromage, il y avait un autre mandat: ramener une race perdue dans la région de Charlevoix. La vache canadienne a été délaissée au fil des ans au profit de la populaire Holstein, plus productive. Il n'y en a plus beaucoup dans les étables de la province. Environ 500 au Québec et moins de 250 de race pure, dans tout le monde.

L'idée de la laiterie Charlevoix a vraisemblablement fait vibrer des cordes sensibles.

«Ce n'est pas juste un outil de marketing, on veut que des jeunes s'installent ici, explique Jean Labbé, rencontré cette semaine à la fromagerie de Baie-Saint-Paul. C'est une question d'occupation du territoire.» La laiterie donne 10cents supplémentaires à l'agriculteur pour chaque litre de lait de vache canadienne. À la fin de l'année, ça peut représenter un revenu additionnel de 20 000$.

«Ça leur permet d'avoir un niveau de vie intéressant, explique M. Labbé, avec de petits troupeaux, de 30 à 40 vaches.»

Le fromager utilise aussi le précieux lait pour faire un caramel et un glacier du village en met dans sa crème-glacée. Il n'y a, pour l'instant, que deux troupeaux de canadiennes dans la région. Le fromager se rend directement chez les producteurs chercher le précieux lait dans la citerne, au besoin.

«On voulait aussi trouver une façon d'arrêter la mort des fermes, explique Jean Labbé. On croit que ça fait aussi partie de notre mandat et c'est comme ça qu'on va se démarquer.»

Malgré une impressionnante mise en valeur d'une agriculture de niche, Charlevoix a perdu presque la moitié de ses fermes durant les 25 dernières années.

Pour augmenter la production de 1608, la fromagerie a construit une toute nouvelle salle d'affinage. Les meules sont affinées deux mois. Elles pourraient l'être plus longtemps, explique Jean Labbé, mais la popularité du fromage ne le permet pas pour l'instant.

Et sa réputation a dépassé le Québec. Après un article dans le Globe and Mail, le fromager Labbé a reçu un appel émotif d'une consommatrice potentielle de l'Ouest, une dame en pleurs qui avait des souvenirs liés au fromage fait avec du lait de vaches canadiennes. La fromagerie de Charlevoix ayant un permis national, elle peut vendre ses produits à l'extérieur de la province, ce qu'elle fait. Pour l'instant, 80% du 1608 est vendu au Québec, le reste, dans les autres provinces. Il pourrait y en avoir plus, mais il faut maintenant plus de lait.

Rêviez-vous d'un retour à la terre?

ASPERGES

Les producteurs locaux misent sur l'élastique jaune


La saison des asperges vient de commencer au Québec et les producteurs doivent déjà travailler fort pour faire leur place dans les grands supermarchés. Question de prix. L'asperge québécoise est une goutte d'eau dans la production mondiale. Environ 85% des asperges du monde sont produites en Chine, mais la plupart sont aussi mangées là-bas. Au chapitre de l'exportation, c'est le Pérou qui est au premier rang, explique Stéphane Roy, président du Comité Asperge des producteurs maraîchers québécois. Et l'asperge péruvienne ne coûte vraiment pas cher. «Elle arrive sur le marché de Montréal au prix que je voudrais avoir pour la mienne», confie le producteur maraîcher de Saint-Ligori. Mais la concurrence ne s'arrête pas là. Même en saison, l'asperge québécoise côtoie celle du New Jersey, de l'Ontario, de la Californie et, évidemment, du Pérou. C'est d'ailleurs pour cette raison que les producteurs québécois utilisent maintenant un élastique jaune distinctif. Ceux qui veulent acheter local peuvent la reconnaître au premier coup d'oeil. Mais, selon Stéphane Roy, au-delà du patriotisme alimentaire et des principes écologiques, il y a un avantage indéniable à acheter ses asperges: elles sont meilleures. «L'asperge n'est pas un légume qui se conserve bien, dit-il. Il faut l'acheter et la manger immédiatement, sinon elle devient fibreuse. Plus elle est fraîche, meilleure elle est.»

Et la grosseur? «C'est un mythe, déclare Stéphane Roy. Les gens croient que la petite est meilleure au goût, mais c'est simplement qu'elle cuit plus vite. Une grosse asperge est plus tendre si on la cuisine comme il faut.»

La saison des asperges se termine autour de la Saint-Jean.