Normalement, les élections, comme les Jeux olympiques, reviennent tous les quatre ans. Le temps de se remettre des dernières, de s'intéresser à autre chose, le temps de s'en ennuyer un peu, et puis quin! Elles reviennent! Youpi! La fièvre s'empare de nous. On en mange durant des semaines.

Normalement, avant. Parce que normalement, maintenant, des élections, il y en a tout le temps, aussi souvent que 30 vies. Au cours des sept dernières années, les Québécois sont allés voter, au provincial, en 2007, en 2008 et en 2012. Il semble bien qu'ils vont y retourner dans quelques semaines. Ça va faire quatre fois en sept ans. Deux fois plus que la règle. Trop, c'est comme pas assez.

Habituellement, avant le déclenchement d'élections, on sent de l'excitation. En sentez-vous? L'imminence d'un scrutin excite moins l'électeur, en ce moment, qu'un match de curling entre le Danemark et la Chine.

Bien sûr, c'était à prévoir. Quand on élit un gouvernement minoritaire, il ne faut pas croire qu'on aura la paix durant 1460 jours. C'est un peu notre faute. D'ailleurs, je ne serais pas du tout étonné que le prochain gouvernement soit majoritaire, juste à cause de ça. Parce que le peuple est tanné des discours, des autobus et des débats. Parce que le peuple veut un congé de quatre ans.

Aussi, j'aurais un conseil à donner aux partis, avant la prochaine campagne: faites-en le moins possible. Less is more, comme on dit à Westmount. Laissez faire le gros autobus polluant et le coûteux hélicoptère, faites du pouce, ça va vous rapprocher des gens. Ne placardez pas tout le Québec de vos nouvelles pancartes. Donnez l'exemple, faites du recyclage. Prenez vos pancartes des élections d'il y a à peine 18 mois, et ajoutez au stylo-feutre votre nouveau slogan. Ce sera un geste écologique et en plus, vous aurez l'air plus jeunes sur les poteaux.

Rafraîchissez vos pubs télé, au nombre de fois où elles passent en ondes, ça va faire du bien. On est tannés des paysages bucoliques, des enfants qui agitent le fleurdelysé et du chef qui marche vers nulle part, après avoir déclamé un slogan avec autant de conviction que Guy Lafleur vantant les mérites du Revitive Circulation Booster. Engagez Martin Matte, il fait de bonnes pubs, lui. Il est disponible, il n'est plus porte-parole de Honda. Il ferait un bon duo avec Philippe Couillard, deux spécialistes des beaux malaises. Comme produits dérivés, le PLQ, qui s'oppose à la Charte, devrait distribuer de beaux foulards que les militants agiteraient durant les assemblées.

Le PQ devrait renouer avec l'hymne patriotique rassembleur, stratégie qui lui a si bien servi dans les années 70 grâce au doué Stéphane Venne. Cette année, ce n'est pas le choix qui manque: Tout le monde en même temps de Louis-Jean Cormier, Tous les mêmes de Marc Dupré ou Comme on attend le printemps de Jérôme Couture. Évitez cependant On leur a fait croire d'Alex Nevsky ou Aujourd'hui, ma vie c'est d'la marde de Lisa LeBlanc. François Legault, le présumé underdog de cette course, peut être le plus audacieux des chefs. Les détracteurs du père de la CAQ le trouvent trop drabe, trop ordinaire, trop mononcle. Pourquoi ne pas s'inspirer de Rob Ford? Un bon gros scandale! Quelque chose de juteux! Une soirée dentelle avec l'ancien maire de Laval? Une vidéo de François Legault faisant du twerking aux Foufounes électriques! Une neknomination au Cinzano dans la cuvette de l'Assemblée nationale? Une controverse virale, rien de mieux pour monter dans les sondages! Les bad boys sont les plus populaires.

Et Françoise David? Que peut faire Françoise David pour rendre plus intéressante la prochaine campagne électorale? Si on l'invite à tous les débats, ce sera déjà un grand pas.

Encourageons-nous en nous disant que si les élections sont comme les routines de patinage artistique, plus on en fait, meilleur on devient, les prochaines devraient être éblouissantes. Des discussions franches, des idées neuves, des promesses sincères, des votes éclairés. On peut rêver.

Permettez-moi de terminer cette chronique verglaçante avec un conseil sérieux aux quatre leaders: mesdames Marois et David, messieurs Couillard et Legault. Soyez charmantes. Soyez charmants. C'est ce qu'on attend de vous. Trudeau père était très souvent hautain, mais en campagne, il mettait une fleur à sa boutonnière et un sourire aux lèvres, et tout le pays succombait à sa dégaine. Lévesque était pas mal bougonneux, mais en campagne, il avait son regard d'enfant perdu au centre commercial et le courant passait.

Il faut que vos électeurs aient envie d'aller souper avec vous. Ce que l'on veut avant tout, c'est être dirigé par un ami. Pas par «un t'chum, c'est un t'chum». Par un vrai ami. Le dernier à avoir déclenché une vague de sympathie au Québec fut Jack Layton. Le charme a opéré.

Bonne campagne, puisque ça s'en vient dans pas long.

D'ici là, ne manquez pas le match de la médaille d'or en hockey sur glace à Sotchi, demain matin. Ça ne reviendra pas avant quatre ans.