La signalisation routière n'a jamais été notre fort. En 1534, Jacques Cartier voulait se rendre aux Indes, il s'est retrouvé à Gaspé. Au lieu de découvrir la route des épices, il a découvert celle de la poutine.

Il y avait déjà des gens qui vivaient au Québec, depuis 10 000 ans: les Amérindiens. Malheureusement pour eux, dans ce temps-là, les immigrants qui arrivaient n'essayaient pas de s'intégrer aux locaux. C'était plutôt l'inverse, ils désintégraient les locaux. Les Français ont donc pris le contrôle de la place. Et la première chose qu'ils ont faite, ils ont ouvert un magasin La Baie où se faisait la traite des fourrures.

Nos premiers ancêtres sont donc des coureurs des bois. Aujourd'hui, on n'est toujours pas sorti du bois, mais on ne court plus. On marche. Souvent tout nu. Dans ce temps-là, ils couraient après toutes les petites bêtes à poil parce que les Parisiennes aimaient beaucoup se promener en manteau de vison ou avec un boa en castor. Brigitte Bardot n'existait pas encore. Elle est âgée, mais pas à ce point-là.

En 1608, Champlain fonde Québec. Et pendant 16 ans, Québec est la plus grosse ville de l'Amérique, jusqu'à ce que Maisonneuve et Jeanne Mance, les Khadir-David de leur époque, fondent Montréal. Qui était vraiment dans ce temps là au goût du maire du Plateau; pas de pont ni de chars. Plein de colons de Québec ont décidé d'aller vivre dans la métropole, mais ceux qui avaient de vieux chevaux se sont arrêtés à mi-chemin pour fonder Madrid.

Tout allait bien, dans ce temps là, la Nouvelle-France était en pleine expansion. Elle s'étendait jusqu'en Louisiane. Méchant Plan Sud. Imaginez si c'était demeuré comme ça, il n'y en aurait pas, de problème, les Coyotes de Phoenix seraient déjà une équipe québécoise!

Notre territoire a commencé à refouler quand les Anglais sont arrivés. Eux autres aussi voulaient de la fourrure pour mettre autour des chapeaux de la reine, l'hiver.

Le 13 septembre 1759, les Anglais remportent la bataille des plaines d'Abraham, écrasant tout sur leur passage, même Anarchopanda. Le traité de Paris est signé le 10 février 1763. Les Français échangent le Québec aux Anglais en retour de la Guadeloupe. C'est un petit dur pour notre ego. C'est beau, la Guadeloupe, mais quand même! Les Français ont cédé un territoire de 1 667 441 km2 pour une île faisant 1628 km2. C'est encore pire que d'échanger Higgins et McDonagh aux Rangers pour Gomez.

Le Québec devient donc une colonie anglaise. Mais ce n'est pas parce qu'on était une colonie qu'on n'avait pas de colonne. Les Québécois s'entêtent à parler leur langue, à pratiquer leur religion et à chanter du Mes Aïeux. Au grand dam des Anglais qui auraient bien aimé nous assimiler comme le reste de l'Amérique du Nord. En 1774 est promulguée une loi protégeant la langue française. Grâce à qui? Grâce aux Américains! Les Anglais nous concèdent le droit de parler notre langue pour ne pas qu'on se rallie aux indépendantistes américains. (Tout au long de notre histoire, les Anglais vont souvent nous concéder des petits bouts d'affaires pour ne pas qu'on se rallie aux indépendantistes.) Ce qui rend jalouses les autres colonies vraiment anglaises. Pour les calmer, on divise le Québec qui s'appelait encore le Canada en deux, le Haut-Canada et le Bas-Canada. Nous autres, on a hérité, bien sûr, du Bas. On était bien dans le Bas. Le Haut, ce n'était pas pour nous. Si le Canada avait été un costume d'âne, on aurait été le derrière. On suivait. Mais pas tout le monde, heureusement. En 1837, les Patriotes se sont rebellés. Bien que les loyalistes aient réussi à avoir leur peau, les actions des Patriotes sont restées vivantes dans la mémoire populaire. Plusieurs Québécois sont alors devenus des résistants. Des résistants tranquilles, mais des résistants quand même.

En 1840, on a eu beau fusionner le Haut et le Bas en the Province of Canada et déclaré l'anglais langue officielle, les Canadiens-français continuent à se servir de leurs langues, pas juste pour parler, mais aussi pour faire des bébés. Le Canada-Est francophone est beaucoup plus peuplé que le Canada-Ouest anglophone. Ce qui sera toujours plus fort que le pouvoir et l'argent, c'est la vie, les vies.

En 1867, l'Acte de l'Amérique du Nord britannique crée quatre provinces: l'Ontario, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et le Québec. Si vous suivez bien, on a commencé en étant toute la tarte, après ça, on est devenu la moitié de la tarte, puis le quart de la tarte, pour finir par être le dixième de la tarte. C'est ce qu'on appelle le régime minceur.

En 1880, pour souligner la fierté des Canadiens-français et leur attachement à leur culture, on chante pour la première fois, lors de la Saint-Jean Baptiste à Québec, l'Ô Canada. Cela dit, je ne vous conseille pas de le chanter, ce soir sur les Plaines ou demain au parc Maisonneuve. Au fil du temps, l'hymne a pris un autre sens, pour ne pas dire le sens inverse. C'est comme si dans 100 ans, Libérez-nous des libéraux devenaient l'hymne national du Canada. Ça pourrait même arriver plus vite qu'on le pense, on ne sait jamais, Harper pourrait bien passer une loi qui l'imposerait.

Et puis, l'histoire continue: les caisses Desjardins, Le Devoir, le CH, la Grande Noirceur, la Révolution tranquille, Octobre, la Baie-James, la loi 101, les référendums...

À travers toutes nos réalisations et nos chicanes, le Québec s'est défini en tant que nation. Une nation, à la fois divisée et unie, qui dit non, qui dit oui, qui voit rouge, qui voit vert. Mais qui se bat et se débat ensemble.

Espérons que nos chicanes demeureront toujours un moteur de transformation et ne deviendront jamais la raison de notre résignation.

Car, l'histoire le prouve, nous sommes à la fois notre meilleur ami et notre pire ennemi.

Si nous sommes encore là, c'est grâce à nous. À 478 ans de nous.

Si nous disparaissons, ce sera à cause de nous. À quelques années de nous.

Bonne Saint-Jean! Soyons fiers et vivants!

C'est la fête du respect que l'on doit à chacun de nous.