«On devient vieux quand les jeunes nous abandonnent.» (Marcel Pagnol)

La crise que traverse le Québec est exceptionnelle, encore plus que la loi déposée jeudi, parce qu'elle touche à ce qu'un pays possède de plus précieux: sa jeunesse.

Voilà pourquoi il ne faut pas la gérer comme on gère Rambo.

Bien sûr, ce n'est pas toute la jeunesse du Québec qui est dans la rue. C'est 150 000 jeunes sur un million et demi. Mais 150 000 personnes, c'est quand même une grosse gang, surtout quand on pense que 50 individus, c'est assez, selon le projet de loi 78, pour mettre en danger la société. Et c'est sans compter tous les jeunes qui ne marchent pas, mais qui se cherchent eux aussi.

Quand la jeunesse se révolte, il faut savoir l'écouter. Il faut savoir l'apprivoiser.

Bien sûr, Léo, Martine et Gabriel n'ont pas toujours raison. Parfois, ils sont dans le champ, dans le beau champ, même. Mais ils y sont par principe, et pas par intérêt. Ils n'y sont pas pour trouver du gaz de schiste, mais pour trouver la vérité. Et Dieu sait qu'il faut creuser.

Ils sont jeunes. C'est pourquoi on ne peut être contre eux, car ce serait être contre notre avenir. Ce serait être contre ce que nous avons fait de mieux: eux.

Si la jeunesse n'a pas toujours raison, la société qui la frappe a toujours tort.

Cette citation est de François Mitterrand. Il a fait cette déclaration à l'Assemblée nationale française en mai 1968. Elle n'a pas vieilli d'une seconde. Elle est toujours actuelle.

Un gouvernement a le devoir d'aimer sa jeunesse comme les parents ont le devoir d'aimer leurs enfants. Le pire est à craindre d'une jeunesse mal aimée.

Certains diront que la jeunesse québécoise est faite d'enfants-rois trop gâtés qui méritent la méthode forte.

Nos jeunes aiment le luxe, ont de mauvaises manières, se moquent de l'autorité et n'ont aucun respect pour l'âge. À notre époque, les enfants sont des tyrans.

Ce n'est pas un chroniqueur montréalais qui s'est exprimé de la sorte cette semaine; c'est Socrate qui a dit cela, 450 ans avant Jésus-Christ. C'est pour dire...

C'est le propre des jeunes, depuis toujours, de tout vouloir. Et de déranger. Les cheveux gominés des années 50, les cheveux longs des années 60, les barbus à la Paul Piché des années 70 tapaient autant sur les nerfs des plus vieux que les petits poils hirsutes de Nadeau-Dubois irritent les bien rasés.

Si on pouvait recouvrer l'intransigeance de la jeunesse, ce dont on s'indignerait le plus, c'est de ce qu'on est devenu.

Celle-là, elle est d'André Gide. Dans le fossé entre jeunes et vieux, il y a beaucoup de cela. Comme si les plus âgés avaient oublié comment ils étaient à l'âge de Léo. Je suis assez vieux pour me souvenir d'un jeune député conservateur, mais fringant, aux cheveux bouclés comme Peter Pringle, qui disait parler au nom de la jeunesse. Aujourd'hui, il est premier ministre, responsable du dossier jeunesse, et il évite de rencontrer les leaders étudiants.

Père absent, négociation manquée.

Pourquoi? Parce que les trois intrépides jeunes gens sont trop impétueux? C'est leur nature. C'est leur âge. Faut les comprendre.

La plus inquiétante jeunesse est celle qui n'a pas d'opinions extrêmes.

Ces propos furent tenus par le comte de Chambord, qu'on peut difficilement assimiler à Amir Khadir puisqu'il fut prétendant à la couronne de France au milieu du XIXe siècle. Cet homme avait comme dessein de s'asseoir sur le trône après la prise de la Bastille et, pourtant, il se méfiait d'un jeune qui n'était pas révolutionnaire. Notre politique manque dramatiquement de philosophes.

L'homme n'est pas fait pour vivre longtemps: l'expérience le corrompt. Le monde n'a besoin que de jeunesse et de poètes.

Encore là, vous serez surpris de savoir que cette citation ne provient point d'Ariane Moffatt, mais d'un auteur de droite né en 1884: Jacques Chardonne.

Pour purifier ce monde corrompu, on a besoin de jeunes idéalistes. C'est le seul antidote possible. Faut pas les museler, faut les écouter. Et leur parler.

Les jeunes vont en bandes, les adultes en couples et les vieux, tout seuls (proverbe suédois).

Je ne sais pas quelles seront les conséquences de la loi spéciale, mais empêcher les jeunes de se rassembler, c'est comme empêcher Jean-François Brault de chanter avec Marie-Ève Janvier. C'est impossible. Et c'est surtout bien mal les connaître.

Chaque coup de colère est un coup de vieux, chaque sourire est un coup de jeune (proverbe chinois).

Je nous souhaite que les jeunes sachent répondre pacifiquement à la tournure des événements. Sinon, j'ai bien peur que le Québec prenne un méchant coup de vieux.

Question de garder espoir, je terminerai mon cours de jeunesse 101 avec la célèbre phrase de Picasso: «Il faut longtemps pour devenir jeune.»

Je nous souhaite à tous, carrés rouges, carrés verts, carrés blancs et carrés aux dattes, de l'être très bientôt.

La jeunesse et l'été vont si bien ensemble.