Le nouveau CHUM, ça fait des années que ça branle. Des années que ça tergiverse. On va le faire ici. Non, on va le faire là. Non, on va le faire ici. On va le faire dans le privé. Non, on va le faire dans le public. Non, on va le faire dans un peu des deux. En attendant, il ne se fait pas. Pas pantoute. PPP: pas pantoute pantoute.

En attendant, qu'est-ce qu'on fait sans ce super-hôpital indispensable à la santé publique? On s'en passe. On attend notre tour, cordés aux urgences, dans de vieux hôpitaux sales et désuets. On survit. Un jour, les décideurs vont bien finir par se décider. Nous sommes des patients patients, habitués à la lenteur de nos gouvernements.

On a appris, au cours des derniers jours, que le pont Champlain est à la veille de tomber. Deux études de la firme Delcan font état de la dégradation avancée de son tablier et recommandent qu'un nouveau pont soit érigé au plus tôt. Au plus tôt! Vous avez bien lu. Les personnes qui ne sont pas capables, en 20 ans, de bâtir un hôpital doivent bâtir un pont au plus sacrant. C'est pas rassurant! On est aussi bien d'aller se jeter en bas du pont tout de suite ou plutôt que le pont se jette en dessous de nous immédiatement.

Cette semaine, le maire Tremblay a demandé que Québec et Ottawa se mettent très rapidement à l'oeuvre pour lancer la conception et la construction du nouveau pont. Angoisse! Quand il faut compter sur le maire Tremblay pour activer les autres ordres de gouvernement, aussi bien compter sur Scott Gomez pour dire aux autres joueurs du CH de ne pas se pogner le cul.

Parlant des Glorieux, ils empruntent le pont Champlain au quotidien pour aller s'entraîner à Brossard. Veut-on un remake du film Lance et Compte? Un autobus qui plonge dans le fleuve, ça fait encore plus mal que Zdeno Chara.

Pourtant, on ne sent pas l'empressement de nos dirigeants à amorcer les travaux du nouveau pont. Pas pantoute pantoute. Chuck Strahl, ministre fédéral des Transports, a déclaré que le pont Champlain était sûr pour encore 10 ans. Pourquoi se presser? Facile à dire pour Chuck Strahl. Il est député de Chilliwack-Fraser Canyon, en Colombie-Britannique, il ne le prend pas tous les matins, le pont Champlain. Un pont, ce n'est pas un yogourt. La date de péremption est peut-être un peu plus approximative. Si le pont n'est plus bon dans dix ans, peut-être qu'il y a des bouts qui ne seront plus bons dans cinq ans ou dans un an.

Selon les études, le pont Champlain n'a déjà plus la capacité de soutenir de lourdes charges. C'est pratique, pour un pont. C'est sa fonction. C'est comme si un avion n'avait plus la capacité de voler mais qu'on le prenait quand même. Parce que c'est ça, le drame, avec le pont Champlain: c'est qu'on continue de le prendre. Le pont n'en peut plus, et nous continuons de rouler dessus.

On est dans le déni total. Pendant que, à la radio, on nous avertit qu'il y a un grand risque d'effondrement partiel du pont, nous, nous le traversons. Pas grave. On risque seulement un effondrement partiel, ce ne sera pas tout le pont au complet. Quand ça va commencer à s'effondrer, on accélérera, on devrait être bons pour arriver à Longueuil sans être mouillés.

Nous sommes aussi inconscients que nos leaders. Sauf que nos leaders sont inconscients pour nous, pas pour eux. Durant la campagne électorale, combien vous pariez que l'autobus du Parti conservateur va entrer à Montréal par le pont Jacques-Cartier? Déjà que le gouvernement vient de tomber, on ne prendra pas le risque que le premier ministre tombe dans le Saint-Laurent. Surtout que Stephen Harper a une lourde charge, pas seulement sur les épaules, mais autour de la ceinture aussi.

Faut arrêter d'être mous. C'est nous qui risquons notre vie en empruntant ce tas de tôle. Tant qu'on ne verra pas une grue en train d'en bâtir un autre, on ne roule plus sur le pont Champlain. C'est la seule solution. Il ne faut pas attendre qu'ils le ferment, ils ne le fermeront pas, ce serait trop désastreux pour l'économie de la métropole. Un pont qui tombe, c'est moins catastrophique pour les gouvernants qu'une économie qui s'écroule. Ils vont donc tenter le diable jusqu'au bout en espérant que le pont Champlain se lance dans le fleuve Saint-Laurent en pleine nuit plutôt qu'à 7h30 du matin. À nous d'être moins irresponsables qu'eux.

Bien sûr, ça veut dire qu'on va être pris dans d'énormes bouchons sur les autres ponts. Mieux vaut arriver en retard sur terre qu'arriver à l'heure au ciel. Air Canada pourrait songer à une ligne Dorval-Saint-Hubert pour les gens pressés.

Une chose est sûre, il faut apprendre de nos erreurs. Si le pont Champlain est en décrépitude, c'est parce que, il y a 50 ans, les décideurs ont choisi la solution économique. Il fallait que ça ne coûte pas trop cher. Cinquante ans plus tard, il faut le refaire pour 2 milliards de dollars. C'est ce qu'on appelle ne pas voir plus loin que le pont.

Qui pourrait bien mettre un turbo sur ce dossier et s'assurer que les citoyens auront l'infrastructure nécessaire le plus rapidement possible? J'ai une idée. Après tout, il s'appelle Champlain, découvreur de la ville de Québec, et, quelque part, par extension, il relie Montréal et la capitale...

- Bonjour monsieur le maire Labeaume, est-ce que ça vous tenterait de permettre aux gens de Montréal d'aller voir jouer les Nordiques?