Bonjour, Yves,

On est bien aujourd'hui, non?

Le CH joue à 12h30 et ça nous donne une excuse pour ne pas aller faire les courses...

Entre nous, nos p'tits gars ont commis un vol de grand chemin à Boston jeudi soir. Ils n'auraient jamais dû gagner ce match. Mais les Bruins sont aussi à blâmer et c'est la faute de Guy Lafleur.

Lorsque les Bruins voient ce chandail maudit, bleu, blanc et rouge, tournoyer autour d'eux, ils se mettent à douter, ils lancent à côté du but, ils prennent des pénalités...

Tu as vu combien leurs patrons, Cam Neely et Claude Julien, étaient nerveux avant le match. Lafleur et sa bande leur ont laissé un traumatisme profond à force de les terrasser en quelques secondes magiques. Lafleur était un démon au vieux Garden de Boston. Sans peur et sans aucun doute dans sa tête, il était aussi à l'aise au milieu de l'hostilité... que P.K. aujourd'hui.

Lorsque les Bruins ont aligné un certain John Wensink, un goon qui promettait de régler son cas, Lafleur rigolait et en remettait...

Et si, par hasard, le gardien du Canadien se trouve en état de grâce, Neely et Julien se souviennent de Ken Dryden et de Patrick Roy...

Cette victoire sous haute tension n'est donc pas si étonnante. Même si vous êtes inquiet, que votre bâton tremble et que votre cerveau est confus, il faut tout de même tirer la rondelle dans le but et non pas sur le poteau. Une fois de plus que l'autre équipe. C'est là le but de l'exercice.

Sinon, comme ils disent à Boston, s'il fait trop chaud pour vous, sortez de la cuisine...

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J'ai lu, Yves, les méchancetés que tu as écrites à propos de René Rancourt. Ça m'a fait de la peine.

À l'époque où je suivais le Canadien comme un paparazzi, je prenais toujours le temps d'aller saluer M. Rancourt. Il était tellement content de parler en français. On bavardait dans la salle de presse en buvant un café. Il me parlait de sa mère, de sa jeunesse franco-américaine. Il me rappelait Jack Kerouac, une idole de notre époque.

M. Rancourt était très gentil, mais le mot qui me vient à l'esprit lorsque je pense à lui est «bizarre». Il était excessivement jovial, comme s'il connaissait Dieu personnellement ou comme s'il prenait des médicaments très forts.

Et puis je te parle d'il y a plus de 20 ans, et René Rancourt paraît plus jeune aujourd'hui. Il grisonnait à l'époque, il ne grisonne plus. Ah! les merveilles de l'esthétique.

Si j'étais à Boston aujourd'hui, je lui apporterais les paroles françaises d'Ô Canada - je m'en souviens, comme de celles du Star-Spangled Banner, en raison de tous ces matchs de hockey auxquels j'ai dû assister - et je pense que j'arriverais à le convaincre de changer sa routine.

On s'aimait bien, tous les deux.

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Mes amis 2.0 - oui, Yves, j'en ai et je t'inclus dans le groupe - me disent que, sur les réseaux sociaux, des gens de Boston sont très racistes envers P.K. Subban.

Je ne suis pas surpris. Tu sais que j'ai fait des études en Nouvelle-Angleterre avant de beaucoup fréquenter les Bruins et le Canadien. Crois-moi, il y a une face cachée à cette ville que nous aimons tant.

Derrière les huit ou neuf universités, derrière les noms prestigieux de M.I.T. et de Harvard, derrière la belle société intello, il y a un Boston violent et toujours raciste.

Les Red Sox ont été les derniers à embaucher un baseballeur noir et ils le faisaient moins que les autres clubs. Les jeunes durs de Boston avaient l'habitude d'encercler et de tabasser un Noir pour égayer leurs samedis soir...

À l'époque de Guy-Guy-Guy, c'était les maudits frogs. (Larry Robinson riait lorsqu'on le traitait de crapaud.)

Aujourd'hui, c'est P.K. et le mot n... que je n'aime même pas écrire.

Tu avais bien raison, Yves, il y a de quoi haïr les Bruins.